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Lettre du Pape Jean Paul II à l'occasion du centenaire du maertyr de Maria Goretti

Publiée le 02-07-2010

1. Il y a cent ans, le 6 juillet 1902, à l'hôpital de Nettuno, mourait Maria Goretti, sauvagement poignardée le jour précédent dans le petit village de Le Ferriere, dans l'Agro Pontino. En raison de son histoire spirituelle, de la force de sa foi, de sa capacité à pardonner son bourreau, elle figure parmi les saintes les plus aimées du XXème siècle. C'est donc de façon opportune que la Congrégation de la Passion de Jésus-Christ, à laquelle est confié le soin du Sanctuaire dans lequel repose la dépouille mortelle de la sainte, a voulu célébrer cet événement avec une solennité particulière.
 

Sainte Maria Goretti fut une jeune fille à laquelle l'Esprit de Dieu accorda le courage de rester fidèle à la vocation chrétienne, jusqu'au sacrifice suprême de la vie. Son jeune âge, le manque d'instruction scolaire et la pauvreté du milieu dans lequel elle vivait n'empêchèrent pas à la grâce de manifester ses prodiges en elle. C'est même précisément dans ces conditions qu'apparut de façon éloquente la prédilection de Dieu pour les personnes humbles. Les paroles avec lesquelles Jésus bénit le Père céleste pour s'être révélé aux petits et aux humbles, plutôt qu'aux sages et aux savants du monde (cf. Mt 11, 25) nous reviennent à l'esprit.

Il a été observé à juste titre que le martyre de sainte Maria Goretti ouvrit ce qui devait être appelé le siècle des martyrs. C'est précisément dans cette perspective, au terme du grand Jubilé de l'An 2000, que j'ai souligné comment "la vive conscience de la pénitence ne nous a pas empêchés de rendre gloire au Seigneur pour ce qu'il a fait au cours de tous les siècles, en particulier au cours du siècle que nous laissons derrière nous, assurant à son Eglise une vaste cohorte de saints et de martyrs" (Novo millennio ineunte, n. 7).


2. Maria Goretti, née à Corinaldo, dans les Marches, le 16 octobre 1890, dut très tôt prendre la route de l'émigration avec sa famille, arrivant, après plusieurs étapes, à Le Ferriere di Conca, dans l'Agro Pontino. Malgré les problèmes liés à la pauvreté, qui ne lui permirent pas d'aller à l'école, la petite Marie vivait dans un milieu familial serein et uni, animé par la foi chrétienne, où les enfants se sentaient accueillis comme un don et étaient éduqués par leurs parents au respect d'eux-mêmes et des autres, ainsi qu'au sens du devoir accompli par amour de Dieu. Cela permit à la petite fille de grandir de façon sereine en nourrissant en elle une foi simple, mais profonde. L'Eglise a toujours reconnu à la famille le rôle primordial et fondamental de lieu de sanctification pour ceux qui en font partie, à commencer par les enfants.

Dans ce contexte familial, Marie acquit une solide confiance dans l'amour providentiel de Dieu, une confiance qui s'est manifestée en particulier au moment de la mort de son père, frappé par la malaria. "Maman, ne perds pas courage, Dieu nous aidera", disait la petite fille dans ces moments difficiles, réagissant avec force au profond vide laissé en elle par la mort de son père.


3. Dans l'homélie pour sa canonisation, le Pape Pie XII, de vénérée mémoire, indiqua Maria Goretti comme "la petite et douce martyre de la pureté" (cf. Discours et radio-messages, XII [1950-1951], 121), car malgré la menace de mort, elle ne manqua pas au commandement de Dieu.

Quel exemple lumineux pour la jeunesse! La mentalité privée d'engagements, qui envahit une grande partie de la société et de la culture de notre temps, a parfois du mal à comprendre la beauté et la valeur de la chasteté. Il ressort du comportement de cette jeune sainte une perception élevée et noble de sa propre dignité et de celle d'autrui, qui se reflétait dans les choix quotidiens, en leur conférant pleinement leur sens humain. N'y a-t-il pas en tout cela une leçon d'une grande actualité? Face à une culture qui accorde trop d'importance à l'aspect physique de la relation entre homme et femme, l'Eglise continue à défendre et à promouvoir la valeur de la sexualité comme un élément qui touche chaque aspect de la personne et qui doit donc être vécu selon une attitude intérieure de liberté et de respect réciproque, à la lumière du dessein originel de Dieu. Dans cette perspective, la personne se découvre être à la fois la destinataire d'un don et appelée à devenir, à son tour, un don pour l'autre.

Dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, j'observai que "dans la vision chrétienne du mariage, la relation entre un homme et une femme - relation réciproque et totale, unique et indissoluble - répond au dessein originel de Dieu, qui s'est obscurci dans l'histoire par la "dureté du coeur", mais que le Christ est venu restaurer dans sa splendeur originelle, en révélant ce que Dieu a voulu "depuis le commencement" (Mt 19, 8). Dans le mariage, élevé à la dignité de sacrement, est aussi exprimé le "grand mystère" de l'amour sponsal du Christ pour son Eglise (cf. Ep 5, 32)" (n. 47).

Il est indéniable que l'unité et la stabilité de la famille humaine doivent aujourd'hui faire face à de nombreuses menaces. Mais, heureusement, à côté de celles-ci, on constate une conscience renouvelée des droits des enfants à être élevés dans l'amour, protégés de tous les types de dangers et formés de façon à pouvoir, à leur tour, affronter la vie avec force et confiance.


4. Dans le témoignage héroïque de la sainte de Le Ferriere, le pardon offert à l'assassin et le désir de pouvoir le retrouver, un jour, au paradis est également digne d'une attention particulière. Il s'agit d'un message spirituel et social d'une importance extraordinaire pour notre temps.

Le récent grand Jubilé de l'An 2000, parmi d'autres aspects, a été caractérisé par un profond appel au pardon, dans le contexte de la célébration de la miséricorde de Dieu. L'indulgence divine pour les difficultés humaines se présente comme un modèle exigeant de comportement pour tous les croyants. Le pardon, dans la pensée de l'Eglise, ne signifie pas relativisme moral ou permissivité. Au contraire, il exige la pleine reconnaissance de la faute et la prise en charge de ses propres respon-sabilités, comme condition pour retrouver la paix véritable et reprendre avec confiance son chemin sur la route de la perfection évangélique.

Puisse l'humanité avancer de façon décidée sur la voie de la miséricorde et du pardon! L'assassin de Maria Goretti reconnut la faute commise, il demanda pardon à Dieu et à la famille de la martyre, il expia avec conviction son crime et garda pendant toute sa vie cette disposition d'esprit. La mère de la sainte, pour sa part, lui offrit sans réticence le pardon de la famille, dans la salle du tribunal où se tint le procès. Nous ne savons pas si ce fut la mère qui enseigna le pardon à sa fille ou le pardon offert par la martyre sur son lit de mort qui détermina le comportement de sa mère. Il est toutefois certain que l'esprit de pardon animait les relations au sein de toute la famille Goretti, et c'est pourquoi il put s'exprimer avec tant de spontanéité chez la martyre et sa mère.


5. Ceux qui connaissaient la petite Maria, dirent le jour de ses funérailles: "Une sainte est morte!". Son culte s'est diffusé sur tous les continents, suscitant partout l'admiration et la soif de Dieu. En Maria Goretti resplendit le caractère radical des choix évangéliques, qui ne connaît pas d'obstacles, mais au contraire est soutenu par les sacrifices inévitables requis par l'appartenance fidèle au Christ.

Je montre l'exemple de cette sainte en particulier aux jeunes, qui sont l'espérance de l'Eglise et de l'humanité. A la veille, désormais, de la XVIIème Journée mondiale de la Jeunesse, je désire leur rappeler ce que j'ai écrit dans le Message qui leur était adressé en préparation à cet événement ecclésial tant attendu: "Au plus fort de la nuit, on peut se sentir apeuré et peu sûr, et l'on attend alors avec impatience l'arrivée de la lumière de l'aurore. Chers jeunes, il vous appartient d'être les sentinelles du matin (cf. Is 21, 11-12) qui annonçent l'arrivée du soleil qui est le Christ ressuscité!" (n. 3).

Marcher sur les traces du divin Maître comporte toujours une prise de position décidée en Sa faveur. Il faut s'engager à le suivre partout où il va (cf. Ap 14, 4). Toutefois, les jeunes savent qu'ils ne sont pas seuls sur ce chemin. Sainte Maria Goretti et les nombreux adolescents qui, au cours des siècles, ont payé par le martyre l'adhésion à l'Evangile, se trouvent à leurs côtés pour communiquer à leurs âmes la force de rester fermes dans la foi. C'est ainsi qu'ils pourront être les sentinelles d'un matin radieux, illuminé par l'espérance. Que la Très Sainte Vierge, Reine des Martyrs, intercède pour eux!

En élevant cette prière, je m'unis spirituellement à tous ceux qui prendront part aux célébrations jubilaires au cours de ce centenaire et je vous envoie, Vénéré pasteur diocésain, ainsi qu'aux Pères passionnistes bien-aimés qui oeuvrent dans le Sanctuaire de Nettuno, aux fidèles de sainte Maria Goretti et, en particulier, aux jeunes, une Bénédiction apostolique spéciale, propitiatoire d'abondantes faveurs célestes.

Du Vatican, le 6 juillet 2002

 

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