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Jean Paul II rencontre les jeunes d'Irlande

Publiée le 24-08-2018

Chers jeunes, frères et sœurs de Notre-Seigneur Jésus-Christ,

1. Voici une occasion exceptionnelle et vraiment importante. Ce matin, le Pape fait partie de la jeunesse irlandaise ! J'ai attendu avec impatience ce moment. J'ai prié pour être capable de toucher vos cœurs avec les paroles de Jésus. Je désire rappeler ici ce que j'ai dit si souvent comme Archevêque de Cracovie et que j'ai répété comme Successeur de Pierre : je crois en la jeunesse. Je crois en la jeunesse, de tout mon cœur et avec toute l'ardeur de ma conviction. Et aujourd'hui je vous dis : je crois en la jeunesse d'Irlande ! Je crois en vous qui vous trouvez ici devant moi, en chacun de vous !

Lorsque je vous regarde, je vois l'Irlande de l'avenir. Demain vous serez les forces vives de votre pays et l'Irlande sera ce que vous aurez décidé qu'elle soit. Demain, comme techniciens ou instituteurs, comme infirmières ou secrétaires, comme fermiers ou commerçants, médecins ou ingénieurs, prêtres ou religieux — demain vous aurez le pouvoir de transformer vos rêves en réalités. Demain l'Irlande dépendra de vous !

Lorsque je vous regarde, assemblés autour de l'autel, et que j'écoute s'élever vos prières, Je vois l'avenir de l'Eglise. Dieu a ses plans pour l'Eglise d'Irlande, mais il a besoin de vous pour les réaliser. Ce que l'Eglise sera à l'avenir dépend de votre sincère collaboration avec la grâce de Dieu.

Quand je regarde les milliers de jeunes rassemblés ici devant moi, je vois également les défis que vous devez affronter. Vous êtes venus des paroisses d'Irlande comme représentants de ceux qui n'ont pu venir. Vous portez dans le cœur le riche héritage que vous ont transmis vos parents, vos instituteurs, vos prêtres. Vous portez dans le cœur les trésors que vous ont donnés l'histoire et la culture irlandaises, mais vous avez également reçu en partage les problèmes auxquels l'Irlande doit faire face.

2. Aujourd'hui, pour la première fois depuis que saint Patrick a prêché la foi aux Irlandais, le Successeur de Pierre venu de Rome, pose le pied sur le sol d'Irlande. Vous vous demandez à bon droit quel message il apporte et ce qu'il dira à la jeunesse d'Irlande. Mon message ne saurait être autre que celui du Christ lui-même; mes paroles ne peuvent être que la Parole de Dieu.

Je ne viens pas ici pour apporter une réponse à toutes vos interrogations personnelles. Vous avez vos Evêques qui connaissent les conditions locales et les problèmes locaux ; vous avez vos prêtres, particulièrement ceux que se consacrent à l'assistance pastorale de la jeunesse, une tâche absorbante mais qui en vaut la peine. Ils vous connaissent personnellement et vous aideront à trouver la bonne réponse. Mais je sens que moi aussi je vous connais, parce que je connais et comprends les jeunes. Et je sais que vous, comme les jeunes de votre âge partout dans le monde, vous êtes touchés par tout ce qui se passe dans la société qui vous entoure. Bien que vous viviez dans un milieu où les vrais principes religieux et moraux sont tenus en honneur, vous vous rendez compte que votre fidélité à ces principes est, de différentes façons, mise à l'épreuve. Les traditions religieuses et morales d'Irlande, l'âme authentique de l'Irlande, subissent le défi des tentations qui n'épargnent aucune société de notre époque. Comme de nombreux autres jeunes dans les différentes régions du monde vous entendrez dire que des changements s'imposent, que vous devez jouir de plus de liberté, que vous devez être différents de vos parents, et que toute décision engageant votre vie dépend de vous et de vous seuls.

Il pourra vous sembler que les perspectives d'un progrès économique croissant et les chances d'obtenir une plus large participation aux biens que la société moderne peut offrir, vous constituent l'occasion favorable pour acquérir une plus grande liberté. Vous pourriez être tentés de penser que plus vous possédez, plus vous vous sentirez libres de vous dégager de toute contrainte. Pour faire plus d'argent et avoir plus, et afin d'éliminer les efforts et les préoccupations, vous pourriez être tentés de recourir à des expédients qui mettent en cause l'honnêteté, la vérité et le travail. Le progrès de la science et de la technologie semble inévitable et vous pourriez être enclins à vous tourner vers la société technologique pour avoir une réponse à tous vos problèmes.

3. L'attrait du plaisir à rechercher toujours et partout où l'on peut le trouver est puissant et pourra vous être présenté comme partie intégrante du progrès vers une plus large autonomie et une plus grande liberté à l'égard des normes. Le désir de se libérer des contraintes extérieures peut se manifester avec force dans le domaine de la sexualité, si étroitement liée à la personnalité humaine. Les idéaux moraux que l'Eglise et la société vous proposent depuis si longtemps, pourront vous être présentés comme dépassés comme obstacles au plein développement de votre personnalité. Les instruments de la communication sociale, les divertissements et la littérature voua proposeront un genre d'existence où bien souvent chacun vit pour soi, et dans laquelle un égocentrisme sans frein ne laisse aucun espace pour s'intéresser à autrui.

Vous entendrez dire que vos pratiques religieuses sont périmées sans retour, qu'elles encombrent votre manière d'être et votre avenir, et qu'avec tout ce que le progrès social et scientifique est à même de vous offrir, vous serez capables d'organiser votre propre vie et que Dieu a épuisé son rôle. Même des personnes d'esprit religieux pourront adopter de telles attitudes, les aspirant dans l'air qui les baigne, sans se rendre compte de l'athéisme pratique qui se trouve à leur origine.

Une société ayant perdu de cette manière ses principes religieux et moraux les plus élevés deviendra facilement la proie de manipulations et de domination par des forces qui, sous prétexte de plus large liberté, la rendront encore plus esclave.

Oui, chers jeunes gens: ne fermez pas les yeux sur la faiblesse morale qui contamine aujourd'hui votre société, et contre laquelle vous ne pourrez vous défendre à vous seuls. Combien de jeunes ont déjà altéré leur conscience, et substitué à la saine joie de vivre les drogues, le sexe et l'alcool, le vandalisme et le vain mirage des biens purement matériels.

4. Autre chose est nécessaire : Quelque chose que vous ne pourrez trouver que dans le Christ. Dans le Christ vous découvrirez la vraie grandeur de votre propre humanité : il vous rendra conscients de votre propre dignité d'êtres humains crées à l'image et à la ressemblance de Dieu" (Gn 1, 26). Le Christ a les réponses à vos questions, et il a la clé de l'histoire : il a le pouvoir d'élever les cœurs. Il vous appelle, il vous invite, Lui qui est "la voie, la vérité et la vie" (Jn 14. 6). Oui, le Christ vous appelle, mais il vou appelle à la vérité. Son appel est exigeant, parce qu'il vous invite à vous laisser "prendre" par lui, complètement, de manière que votre vie tout entière soit vue sous un jour différent. Il est le Fils de Dieu qui vous révèle le visage amoureux du Père. Il est le Maître, le seul dont renseignement ne passera jamais, le seul qui enseigne avec autorité. Il est l'ami qui dit à ses disciples : "Je ne vous appelle plus serviteurs... mais je vous ai appelés mes amis" (Jn 15, 15). Et cette amitié, il l'a prouvée en donnant sa vie pour vous.

Son appel est exigeant parce qu'il nous enseigne ce que signifie être réellement homme. Si vous ne prêtez pas attention à l'appel de Jésus, il vous sera impossible de réaliser votre humanité dans toute sa plénitude. Vous devez bâtir sur la base oui est le Christ (Cf. 1 Co 3, 11) : c'est uniquement avec lui que votre vie aura un sens et qu'elle vaudra la peine d'être vécue.

Vous provenez de familles catholiques ; vous allez régulièrement à la rencontre du Christ dans la sainte communion, le dimanche et même durant la semaine. Nombreux sont parmi vous ceux qui prient en famille chaque jour ; et j'espère que vous agirez ainsi tout au long de votre vie. Mais il pourrait se faire également que vous soyez tentés de vous éloigner du Christ : cela peut arriver notamment si vous constatez dans la vie de certains de vos compagnons une contradiction entre la foi qu'ils professent et la vie qu'ils mènent. Mais — et j'y insiste — je vous prie d'écouter toujours l'appel du Christ, parce que lui seul peut enseigner le vrai sens de la vie et des réalités temporelles.

5. Permettez-moi, dans ce contexte de rappeler encore une autre phrase de l'Evangile, une phrase dont nous devons nous souvenir même lorsque ses conséquences nous semblent difficiles à accepter. Il s'agit de celle qu'a prononcée le Christ dans le discours de la Montagne : "Aimez vos ennemis ; faites du bien à ceux qui vous haïssent" (Lc 6, 27). Vous avez déjà deviné qu'en me référant à ces paroles du Seigneur, j'ai dans l'esprit les douloureux événements oui depuis plus de 10 ans ont lieu en Irlande du Nord. Je suis certain que tous les jeunes vivent de tels événements, de manière intense et avec douleur et que cela laisse de profondes cicatrices dans vos jeunes cœurs. Ces événements, pénibles comme ils le sont, doivent aussi constituer un stimulant à la réflexion. Ils vous demandent de vous former un jugement intérieur pour déterminer, en conscience, comme jeunes catholiques, où vous en êtes à ce sujet.

Vous avez entendu les paroles de Jésus : "aimez vos ennemis !". Le commandement de Jésus ne veut pas dire que nous ne sommes pas liés d'amour à notre terre natale ; il ne signifie pas que nous devons rester indifférents devant les injustices dans leurs divers aspects temporels et historiques. Ces paroles de Jésus s'attaquent uniquement à la haine. Je vous demande de réfléchir profondément : que serait la vie humaine si Jésus n'avait jamais prononcé ces paroles ? Que serait le monde si, dans nos rapports mutuels, nous accordions la primauté à la haine entre les peuples parmi les classes, parmi les nations ? Quel serait l'avenir de l'humanité si nous fondions sur cette haine l'avenir des individus, et celui des nations ?

On pourrait avoir parfois l'impression devant les expériences de l'histoire et devant des situations concrètes, que l'amour a perdu sa puissance qu'il est devenu impossible à pratiquer. Mais à la longue, l'amour remporte toujours la victoire, l'amour ne connaît jamais la défaite. S'il en était autrement, l'humanité serait vouée à la destruction.

6. Chers jeunes amis, voilà le message que je vous confie aujourd'hui vous demandant de le garder avec vous, de le partager chez vous avec vos familles ; à l'école et au travail avec vos amis. Quand vous serez revenus chez vous, dites à vos parents et à tous ceux qui veulent l'entendre que le Pape croit en vous et compte sur vous. Dites que les jeunes sont la force du Pape qui désire partager avec eux ses espoirs pour l'avenir et ses encouragements.

Je vous ai transmis les paroles de mon cœur. Permettez-moi de vous demander quelque chose en retour. Vous savez que d'Irlande je me rendrai aux Nations Unies. La vérité que j'ai proclamée devant vous est également celle que, pour une forme différente, je présenterai devant le forum suprême des nations. J'espère que vos prières, les prières de la jeunesse d'Irlande, m'accompagnent et me soutiendront dans cette importante mission. Je compte sur vous, car l'avenir de la vie humaine sur cette terre est en jeu, dans chaque pays et dans le monde entier. L'avenir de tous les peuples et nations, l'avenir de l'humanité elle-même, dépend de ceci : que les paroles de Jésus dans le Discours de la Montagne, que le message de l'Evangile soient écoutés encore une fois.

Daigne le Seigneur être toujours avec vous ! Avec sa liberté qui vous fait libres (cf. Jn 8. 32) ; avec sa parole qui dévoile le mystère de 1'homme et révèle à l'homme sa propre humanité ; avec sa mort et sa résurrection qui vous rendent nouveaux et forts.

Mettons ces intentions aux pieds de Marie, Mère de Dieu et Reine d'Irlande, modèle d'amour généreux et de dévouement au service des autres.

Jeunes gens d'Irlande, je vous aime ! Jeunesse d'Irlande je vous bénis ! Je vous bénis au nom de Notre Seigneur Jésus-Christ !

 

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Saint Jean Paul II - Galway, 30 septembre 1979

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