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L’Evangile de la Vie : que voulait Jean Paul II ?

Publiée le 22-03-2020

    

     Article paru dans l'Evangile de la Vie du 25 mars 2020 - 1ère partie

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     En Mars 1995, le Saint Père Jean Paul II nous donnait la lettre encyclique Evangelium vitae, adressée "aux prêtres et aux diacres, aux religieux et aux religieuses, aux fidèles laïcs et à toutes les personnes de bonne volonté sur la valeur et l'inviolabilité de la vie humaine". Lorsque que se répandit la nouvelle qu'une lettre encyclique du Pape Jean Paul II, consacrée au respect de la vie, venait d'être publiée, la réaction la plus commune, exprimée en particulier au travers des média, fut celle d'un vague étonnement et d'un intérêt pour le moins relatif: "Pourquoi une telle Encyclique? disait-on. Que peut-elle apporter de nouveau qui n'ait déjà été dit!". 
Ces jugements préconçus étaient erronés. La lettre Encyclique "Evangelium Vitae",  n'est pas une simple répétition des documents préexistant du Magistère à propos de l'avortement ou de l'euthanasie. Elle est une profonde méditation sur la vie, le sens de la vie, la valeur de la vie, en même temps qu'un appel lancé à tous les hommes de bonne volonté, croyants et non-croyants, pour construire ce que le Pape appelle "une culture de vie" contre les dangers d'une envahissante "culture de mort".

   

     Vingt cinq ans plus tard, le message d'Evangelium Vitae demeure on ne peut plus actuel. La "culture de mort" n'a fait que s'aggraver tout en se banalisant et en se diversifiant dans ses propositions. Elle fait désormais partie du "paysage culturel".
L’avortement provoqué fait tellement partie de notre société que l’on n’a plus aucune retenue à son égard et qu’on invoque même  « droit » à son égard.
Personne n'éprouve plus aucune gêne à exprimer ouvertement ses souhaits d'euthanasie pour telle ou telle catégorie d’être humain au nom de la supposée  « indignité » de leur existence.
     L’homme contemporain veut se croire « seigneur et maitre » de sa propre vie, imaginant des façons toujours plus artificielles (et inhumaines) de faire venir les enfants au monde, contre les droits et le bonheur de ces enfants.
     On nous sert comme un avenir prometteur sinon radieux la robotisation de l’être humain, avec l’ « interface cerveau machine », au moment même où un profond recul des valeurs, un individualisme aveugle et un refus de s’engager a plongé l’être humain dans le marasme actuel des « familles » désunies, qui ne transmettent plus d’amour, plus de fidélité, plus de générosité.

     Saint Jean Paul II avait malheureusement prédit tout cela, il y a vingt cinq ans, dans l’Encyclique « Evangelium Vitae », comme il avait prédit l’ « hiver démographique » où nous trouvons, avec ses conséquences économiques et sociales.  Prophète s’il en est un, il avait perçu avec une grande lucidité  la crise de l'esprit qui sous-tend la culture de mort, et qui nous pénètre de façon insidieuse, faisant considérer comme « normal » et même « édifiant » ce qui n’est qu’une dégradation morale prononcée. Cette crise de l’esprit se traduit aujourd’hui dans des propositions aussi variées que l'arrêt volontaire de la grossesse, la "terminaison" des enfants handicapés, des malades inconscients et des vieillards, l'aide au suicide, la perte programmée d'embryons humains dans les fécondations artificielles, le ravalement de l'embryon humain au niveau de matériel de laboratoire, et l'eugénisme des diagnostics prénataux et pré-implantatoires. Et tout cela est accepté comme « normal ».

     Mais « Evangelium Vitae » n’est pas qu’un réquisitoire douloureux contre la fange dans laquelle beaucoup se roulent, en toute bonne conscience. Elle est d’abord un fort appel à se ressaisir, et à témoigner de la valeur de la vie humaine, don merveilleux et gratuit de Dieu, face à un monde dont la conscience s’est enténébrée, et qui ne sait plus « distinguer sa droite de sa gauche ».
Saint Jean Paul II a confiance en ce témoignage pour la vie, parce qu’il a confiance dans ces familles lumineuses qui continuent à vivre aujourd’hui du « Bel amour », éclairant de couleurs vives les beautés et la grandeur  du don de soi, de la fidélité, de l’amour de la vie dans les enfants.
       La famille, comme « Eglise domestique » a vocation, nous dit Jean Paul II, d’annoncer, de célébrer et de servir l’Évangile de la Vie. Si l’on veut défendre la vie humaine, alors il faut défendre la famille, communauté de vie et d’amour, fondée sur le mariage indissoluble, et qui a la mission de « garder, de révéler et de communiquer l’amour » (EV 92).
     Il ne s’agit pas là d’un message utopique, qui ne « cadre plus » avec « notre temps ». Il s’agit là d’un message très concret, salvateur, plein d’espérance.
     La culture de mort n’a aucune valeur en elle-même, elle est une coque vide, une implosion, une démission, le résultat d’un scepticisme profond, amer, sans espérance. La culture de vie propose au contraire l’exemple de la solidarité et de la compassion, le sentiment de la valeur unique, insubstituable de chaque être humain. 
     La culture de mort possède l’argent, les influences politiques, les moyens de corrompre les âmes.  La culture de vie a les personnes, la raison l’esprit humain, les actes d’héroïsme et de solidarité, au quotidien, désintéressés et discrets. C’est David contre Goliath. Mais David a vaincu, au bout du compte.

Les fruits de l’Encyclique

      Une question peut venir à l’esprit, lorsque l’on évoque l’Encyclique « Evangelium Vitae » : cette Encyclique a-t-elle porté des fruits ? Ou bien a-t-elle été destinée à faire partie de ces documents issus des Congrégations romaines, voués à reposer sagement dans les bibliothèques des Universités Catholiques, et entre les livres de certains prêtres, datant de leurs années de formation et aujourd’hui protégés des épreuves du temps par une épaisse couche de poussière ?
     La réponse est oui : oui, Evangelium Vitae a porté ses fruits et continue d’en porter, même si elle est souvent ignorée du grand public et des chrétiens eux mêmes. Par son langage clair, fort et énergique elle a fait entrer la notion de « Culture de mort » dans les consciences, et fait prendre conscience de l’existence d’une « Culture de Vie » à défendre et à promouvoir. En fait, l’impact d’« Evangelium Vitae » sur l’opinion du grand public en général et des chrétiens en particulier, est comparable à celle qu’ont eu et continuent d’avoir, en bien ou en mal,  toutes les grandes œuvres religieuses, philosophiques ou anthropologiques – comme la « critique de la raison pure » de Kant, l’ « origine des espèces » de Darwin ou « l’introduction à la psychanalyse » de Freud: leur vérité (ou leur erreur masquée) parvient à la connaissance générale par une sorte de transpiration des idées à partir de ceux qui en ont pris directement connaissance et conscience. On savait que l’Eglise était pour la défense et le respect de la vie humaine, qu’elle déconseillait l’avortement, l’euthanasie et les procréations artificielles destructrices d’embryons humains, qu’elle n’avait guère d’affinité avec l’eugénisme et ses conséquences dans le III° Reich et nos sociétés libérales et utilitaristes. Depuis Evangelium Vitae la relative ignorance ou indifférence sur ces sujets n’est plus de mise. La mise en garde contre l’insidieux développement de la « culture de mort », faite de façon magistrale par Saint Jean Paul II a pénétré les consciences des hommes de bonne volonté, ne serait-ce qu’indirectement, par une sorte d’osmose des pensées. On ne peut plus l’ignorer, même si l’on ne la partage pas. Curieusement, on  voit l’influence, certes indirecte, d’Evangelium Vitae sur notre société  même dans l’ « écologisme actuel » et la sensibilité plus grande aux destructions qu’entraîne l’irresponsable « culture de mort ».  Le recul de l’avortement aux États Unis en est un signe, même s’il reste encore limité. Il faudra encore du temps pour que cet « écologisme » à la mode passe d’un apitoiement sur la fonte des glaciers à une inquiétude sur le non respect de la vie humaine.

     A suivre dans EDV du 13 mai 2020

 

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