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Famille, bioéthique, projets de loi : Mgr Pontier à Emmanuel Macron

Publiée le 09-04-2018

Extrait du dicours de Mgr Pontier, en présence du Président de la République - Bernardins, 9 avril 2018 :

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     Aujourd’hui la tentation est grande de se servir des progrès scientifiques pour s’assurer une maitrise de l’humain qui éliminerait tout ce qui peut être porteur de fragilités ou d’éventuelles maladies. Le grand débat autour de la révision des lois de bioéthique permet une réflexion commune sur « Quel monde voulons-nous pour demain? » C’est heureux et on ne peut que vous remercier, Monsieur le Président de la République, de l’avoir favorisé. Dans l’encyclique « L’amour dans la vérité », publiée en 2009, le Pape Benoit XVI offrait au numéro 74 un diagnostic tout à fait éclairant que je me permets de vous proposer : « Un domaine primordial et crucial de l’affrontement culturel entre la technique considérée comme un absolu et la responsabilité morale de l’homme est aujourd’hui celui de la bioéthique, où se joue de manière

 radicale la possibilité même d’un développement humain intégral. Il s’agit d’un domaine particulièrement délicat et décisif, où émerge avec une force dramatique la question fondamentale de savoir si l’homme s’est produit lui-même ou s’il dépend de Dieu. Les découvertes scientifiques en ce domaine et les possibilités d’intervention technique semblent tellement avancées qu’elles imposent de choisir entre deux types de rationalité, celle de la raison ouverte à la transcendance et celle de la raison close dans l’immanence technologique. On se trouve devant un « ou bien, ou bien » décisif. Pourtant la ‘rationalité’ de l’agir technique centré sur lui-même s’avère irrationnelle, parce qu’elle comporte un refus décisif du sens et de la valeur. Ce n’est pas un hasard si la fermeture à la transcendance se heurte à la difficulté de comprendre comment du néant a pu jaillir l’être et comment du hasard est née l’intelligence. Face à ces problèmes dramatiques, la raison et la foi s’aident réciproquement. Ce n’est qu’ensemble qu’elles sauveront l’homme. Attirée par l’agir technique pur, la raison sans la foi est destinée à se perdre dans l’illusion de sa toute-puissance. La foi, sans la raison, risque de devenir étrangère à la vie concrète des personnes ».

Légiférer en ces domaines ne peut se faire sans être assuré des conséquences de nos choix sur les générations futures. En d’autres domaines, on n’hésite pas à appliquer le principe de précaution. Comment pourrait-il en être autrement quand il s’agit de l’avenir des générations futures ?

Vous le savez, l’Église catholique avec bien d’autres considère la famille comme un des piliers de la vie en société. En elle, s’expérimentent l’accueil inconditionnel de chacun, la fidélité, l’intergénérationnel, les transmissions de valeurs et le soutien en toutes circonstances. Les français plébiscitent la famille parmi les réalités qui leur paraissent essentielles. Leur désir est de former une famille unie, porteuse d’amour et d’affection. Faut-il aujourd’hui permettre que la loi prive des enfants de père ? Cette reconnaissance produirait une inégalité entre les enfants, ouvrirait un grand risque de marchandisation du corps et remettrait en cause le critère thérapeutique actuel, garant que ne se forme pas un grand marché de la procréation. Accueillir une situation quand elle existe n’est pas l’organiser. C’est pourquoi nous soutenons activement les politiques en faveur de la famille. Elles sont un investissement sûr pour le bien de tous et celui de notre pays.

Nous avons déjà des lois récentes sur d’autres sujets essentiels pour la société qui n’ont pas eu le temps de porter leurs fruits et voilà que certains souhaiteraient qu’on légifère encore. Est-ce bien raisonnable ?

Nous nous sommes exprimés déjà sur tous ces sujets et le ferons encore, conscients de notre responsabilité dans la vigilance pour la sauvegarde des droits de l’enfant, pour la défense des plus faibles, de l’embryon au nouveau-né, de la personne ayant un handicap au paralysé, du vieillard à celui qui est dépendant en toutes choses. On ne peut laisser personne seul. Ce sont nos relations, nos affections qui nous permettent de vivre. Il y va, sans nul doute, du caractère humain de nos sociétés et de nos vies, de celui de savoir puiser en soi les forces de la fraternité vécue. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la solitude ou de l’abandon de celui qui verrait comme une issue enviable, celle de se donner la mort. La société se doit d’offrir des perspectives de vie, d’amitié, de tendresse, de compassion, de solidarité. Les pensées de mort peuvent-elles subsister lorsque s’expriment l’affection des proches, les soins assidus et l’accompagnement qui lutte contre toute douleur ? Peut-on qualifier de « dernier soin » l’acte de donner la mort ? Il y a des limites et des confusions qu’on ne saurait franchir.

Les États Généraux de la bioéthique permettent d’expérimenter le dialogue au sein d’une société devenue de plus en plus plurielle. Dialoguer suppose que chacun puisse s’exprimer et être écouté et que tous sachent vivre le respect, la tolérance, la compréhension mutuelle. Durant le siècle précédent la société française a su trouver les chemins de l’apaisement. Le principe de la laïcité de l’État a permis à la séparation des Églises et de l’État de trouver la juste manière de vivre ensemble dans le respect légitime des différences. Nous ne voudrions pas que les évolutions plus récentes vécues par notre pays entrainent des peurs qui ne verraient de solutions que dans la laïcisation de la société et non plus seulement de l’Etat. L’avenir se bâtira dans la confiance, le respect, l’amour du pays ou alors il s’enfermera dans des rejets dangereux incapables d’offrir une vie paisible et bénéfique pour tous. Ces contextes nouveaux ne doivent pas conduire à se méfier les uns des autres mais à se connaître mieux. Habités par des convictions diverses, en particulier religieuses, nous devons puiser dans nos traditions pour y retrouver le meilleur de ce qu’elles portent : l’amour du frère, l’hospitalité, la fraternité. C’est ce que d’ailleurs souhaitent le plus grand nombre de nos concitoyens. "

 

 

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