Benoît XVI de A à Z

Oécuménisme - Oécuménisme spirituel - Unité des chrétiens

1 - Nourris et soutenus par l'Eucharistie, les catholiques ne peuvent pas ne pas se sentir encouragés à tendre vers cette pleine unité que le Christ a ardemment souhaitée au Cénacle. Le successeur de Pierre sait qu'il doit de manière particulière prendre en charge cette aspiration suprême du Divin maître. C'est à lui en effet qu'a été confiée la tâche de confirmer ses frères (cf. Lc 22, 32).
C'est donc en toute conscience, au début de son ministère dans l'Eglise de Rome que Pierre a baignée de son sang, que l'actuel successeur prend comme premier engagement celui de travailler sans épargner ses forces, à la reconstruction de l'unité pleine et visible de tous les disciples du Christ. Telle est son ambition, tel est son devoir pressant. Il est conscient que pour cela les manifestations de bons sentiments ne suffisent pas. L'on a besoin de gestes concrets qui pénètrent les âmes et secouent les consciences, incitant chacun à cette conversion intérieure qui est la condition nécessaire à tout progrès sur le chemin de l'œcuménisme.

Le dialogue théologique est nécessaire, l'approfondissement des motivations historiques de choix faits dans le passé est même indispensable. Mais le plus urgent est cette « purification de la mémoire », évoquée si souvent par Jean-Paul II, qui seule peut disposer les âmes à accueillir la pleine vérité du Christ. C'est devant Lui, Juge suprême de tout être vivant, que chacun de nous doit se placer, conscient de devoir un jour Lui rendre compte de ce qu'il a fait ou n'a pas fait pour le grand bien de l'unité pleine et visible de tous ses disciples.

L'actuel successeur de Pierre se laisse interpeller personnellement par cette question et est disposé à faire ce qui est en son pouvoir pour promouvoir la cause fondamentale de l'œcuménisme. Dans le sillage de ses prédécesseurs, il est pleinement déterminé à exploiter toute initiative pouvant apparaître opportune pour promouvoir les contacts et l'entente avec les représentants des différentes Eglises et Communautés ecclésiales. Il leur adresse d'ailleurs, également à cette occasion, le salut le plus cordial, dans le Christ, unique Seigneur de tous….

… Je m'adresse à tous avec cette conscience, également à ceux qui pratiquent d'autres religions ou qui cherchent simplement une réponse aux questions fondamentales de l'existence et qui ne l'ont pas encore trouvée. Je m'adresse à tous avec simplicité et affection, pour les assurer que l'Eglise désire continuer à tisser avec eux un dialogue ouvert et sincère, à la recherche du bien véritable de l'homme et de la société.

J'invoque de Dieu l'unité et la paix pour la famille humaine et je déclare la disponibilité de tous les catholiques à coopérer pour un développement social authentique, respectueux de la dignité de chaque être humain.

Je n'épargnerai pas les efforts et le dévouement pour poursuivre le dialogue prometteur entamé par mes vénérés prédécesseurs avec les différentes civilisations, afin que de la compréhension réciproque naissent les conditions d'un avenir meilleur pour tous - Chapelle Sixtine 20.4.2005


2 - Je voudrais encore souligner une chose: de l'image du pasteur et de celle du pêcheur émerge de manière très explicite l'appel à l'unité.«J'ai encore d'autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix: il y aura un seul troupeau et un seul pasteur» (Jn 10,16), dit Jésus à la fin du discours du bon pasteur. Le récit des 153 gros poissons se conclut avec la constatation joyeuse: «Et, malgré cette quantité, le filet ne s'était pas déchiré» (Jn 21,11). Hélas, Seigneur bien-aimé, aujourd'hui le filet s'est déchiré, aurions-nous envie de dire avec tristesse ! Mais non - nous ne devons pas être tristes! Réjouissons-nous de ta promesse, qui ne déçoit pas, et faisons tout ce qui est possible pour parcourir la route vers l'unité que tu as promise. Faisons mémoire d'elle comme des mendiants dans notre prière au Seigneur: oui Seigneur, souviens-toi de ce que tu as promis. Fais que nous ne soyons qu'un seul Pasteur et qu'un seul troupeau! Ne permets pas que ton filet se déchire et aide-nous à être des serviteurs de l'unité! - Homélie Intronisation 24.4.2005


3 - Avant même que la Providence le conduise à Rome, l'Apôtre avait écrit aux chrétiens de cette cité, capitale de l'empire, sa lettre la plus importante du point de vue doctrinal. Son commencement vient d'être lu, un dense préambule où l'Apôtre salue la communauté de Rome en se présentant comme « le serviteur du Christ Jésus, apôtre par vocation » (Romains 1,1). Et plus loin, il ajoute: « Par Lui [le Christ], nous avons reçu la grâce de l'apostolat pour obtenir l'obéissance de la foi de la part de toutes les nations » (Romains 1,5).

Chers amis, en tant que Successeur de Pierre, je suis ici pour raviver dans la foi cette « grâce de l'apostolat », parce que Dieu, selon une autre expression de l'Apôtre des nations, m'a confié « la sollicitude de toutes les Eglises » (2 Corinthiens 11,28) - A Saint Paul Hors les Murs 25.4.2005


4 - Mes paroles se font aussi affectueuses dans le salut que j'adresse à tous ceux qui, renés par le sacrement du Baptême, ne sont pas encore dans la pleine communion avec nous; et à vous, chers Frères du peuple juif, auxquels nous sommes liés par un grand patrimoine spirituel commun qui plonge ses racines dans les promesses irrévocables de Dieu. Enfin, ma pensée - presque comme une onde qui se répand - va à tous les hommes de notre temps, croyants et non croyants.


5 - Je me souviens aussi des visages et de la cordialité des Représentants de la vénérable Église orthodoxe de Bulgarie, désireuse de raviver le dialogue de la charité dans la vérité. Je vous demande de vous faire l'interprète de mes sentiments de gratitude auprès d'eux, en particulier auprès du vénéré Patriarche bulgare, Sa Sainteté Maxime. Nous avons devant nous un devoir commun : nous sommes appelés à construire ensemble une humanité plus libre, plus pacifique et plus solidaire. - (Audience au Président de la République de Bulgarie 23-5-2005)


6 - Le véritable objectif de notre chemin est la communion avec Dieu - Dieu lui-même est la maison aux nombreuses demeures (cf. Jn 14, 2ss.). - Homélie Corpus Domini, Rome 26.5.2005


7 - Nous touchons ici une autre dimension de l'Eucharistie, que je voudrais encore aborder avant de conclure. Le Christ que nous rencontrons dans le Sacrement est le même ici à Bari qu'à Rome, ici en Europe qu'en Amérique, en Afrique, en Asie, en Océanie. C'est l'unique et même Christ qui est présent dans le Pain eucharistique en tout lieu de la terre. Cela signifie que nous pouvons le rencontrer seulement ensemble avec tous les autres. Nous pouvons le recevoir seulement dans l'unité? N'est-ce pas ce que nous a dit l'apôtre Paul dans la lettre que nous venons d'écouter? En écrivant aux Corinthiens, il affirmait: « Puisqu'il n'y a qu'un seul pain, nous, tout en étant nombreux, nous sommes un seul corps: tous, en effet nous participons à l'unique pain » (1 Co 10,17). La conséquence est claire: nous ne pouvons pas être en communion avec le Seigneur si nous ne sommes pas en communion entre nous. Si nous voulons nous présenter devant Lui, nous devons aussi bouger pour aller les uns vers les autres. Pour cela il faut apprendre la grande leçon du pardon : ne pas laisser travailler dans l'âme le ver du ressentiment, mais ouvrir son coeur à la magnanimité de l'écoute de l'autre, de la compréhension vis à vis de lui, de l'éventuelle acceptation de ses excuses, de la généreuse offrande des nôtres.

L'Eucharistie, répétons-le, est le sacrement de l'unité. Mais hélas les chrétiens sont divisés justement par le sacrement de l'unité. Nous devons d'autant plus, soutenus par l'eucharistie, nous sentir poussés à tendre de toutes nos forces à la pleine unité que le Christ a ardemment désirée au Cénacle. Ici, justement, à Bari, cité qui conserve les reliques de saint Nicolas, terre de rencontre et de dialogue avec nos frères chrétiens d'Orient, je voudrais redire ma volonté d'assumer comme engagement fondamental de travailler de toutes mes énergies à la reconstitution de l'unité pleine et visible de tous les disciples du Christ. Je suis conscient que les manifestations de bons sentiments ne suffisent pas. Il faut aujourd'hui des gestes concrets qui entrent dans les âmes et bouleversent les consciences, en appelant chacun à la conversion intérieure qui est le présupposé de tout progrès sur le chemin de l'œcuménisme » (cf. Discours aux représentants des Eglises et communautés chrétiennes et d'autres religions non chrétiennes, 25 avril 2005). Je vous demande à tous de prendre avec décision la route de cet œcuménisme spirituel qui, dans la prière, ouvre à l'Esprit Saint, qui peut seul créer l'unité. - Homélie Messe à Bari 29.5.2005


8 - L'établissement de la paix commence à l'intérieur de chaque pays, par la recherche de relations d'amitié et de collaboration entre les différentes communautés ethniques, culturelles, religieuses. La foi authentique ne peut engendrer la violence, elle favorise au contraire la paix et l'amour. Malgré les difficultés, l'Église catholique s'est engagée à poursuivre ses efforts pour encourager la compréhension et le respect entre les croyants des différentes traditions religieuses. …. En développant des relations de confiance, dans le respect des droits légitimes de chaque communauté, les croyants, en union avec tous les hommes de bonne volonté, contribuent à édifier une société libérée de toute forme de dégradation morale et sociale, afin que chacun puisse vivre dans la dignité et la solidarité. - Au nouvel Ambassadeur de Guinée 16.6.2005


9 - S'appuyer sur une foi éclairée est indispensable pour un progrès authentique dans la recherche de l'unité des disciples du Christ. L'établissement de relations fraternelles et confiantes entre eux doit cependant assumer les exigences de l'identité catholique dans la vérité, évitant tout geste qui pourrait non seulement troubler les fidèles, mais aussi conforter le relativisme religieux. - Aux Evêques du Madagascar, en visite Ad Limina 18.6.2005


10 - J'adresse également avec affection un salut cordial à la Délégation du Patriarcat oecuménique de Constantinople venue en cette circonstance particulière. Comment ne pas rappeler aujourd'hui que le Primat de l'Eglise qui est à Rome et de son Evêque est un primat de service à la communion catholique. Ensuite, à partir du double événement du martyre de Pierre et de Paul, toutes les Eglises commencèrent à regarder l'Eglise de Rome comme le point de référence central pour l'unité doctrinale et pastorale. Le Concile Vatican II affirme: "C'est pourquoi encore il existe légitimement, au sein de la communion de l'Eglise, des Eglises particulières jouissant de leurs traditions propres - sans préjudice du primat de la chaire de Pierre qui préside au rassemblement universel de la charité [cf. S. Ignatius M., Ad Rom., Preaf.: Funk, I, 252], garantit les légitimes diversités et veille en même temps à ce que, loin de porter préjudice à l'unité, les particularités, au contraire, lui soient profitables" (Const. Lumen gentium, n. 13).
Que la Vierge Marie obtienne pour nous que le ministère pétrinien de l'Evêque de Rome ne soit pas vu comme une pierre d'achoppement mais comme un soutien dans la marche sur la voie de l'unité, et nous aide à parvenir au plus tôt à réaliser l'aspiration du Christ: "ut unum sint". Que les saints Apôtres Pierre et Paul intercèdent pour nous. - Angelus 29.6.2005


11 - En vous accueillant ici pour la première fois depuis le début de mon Pontificat, je suis heureux de saluer en vous la Délégation que, chaque année, Sa Sainteté Bartholomaios I, Patriarche oecuménique, envoie pour la fête des Saints Patrons de l'Eglise de Rome. Je m'adresse à vous avec les paroles de Paul aux Philippiens: "Mettez comble à ma joie par l'accord de vos sentiments: ayez le même amour, une seule âme, un seul sentiment [...] Ayez entre vous les mêmes sentiments qui sont en Jésus Christ" (Ph 2, 2-5). L'Apôtre, conscient de la facilité de succomber à la menace toujours latente de conflits et de disputes, exhorte la jeune communauté de Philippe à la concorde et à l'unité. Aux Galates, il indiquera avec force que toute la loi trouve sa plénitude dans le seul précepte de l'amour, et il les exhortera à marcher selon l'Esprit pour éviter les oeuvres de la chair - discordes, jalousies, divisions, factions, envies - et obtenir ainsi le fruit de l'Esprit qui est au contraire l'amour (cf. Ga 5, 14-23).
L'heureuse tradition d'assurer une présence réciproque dans la Basilique Saint-Pierre et dans la Cathédrale Saint-Georges pour les fêtes des saints Pierre et Paul et de saint André est donc l'expression de cette volonté commune de combattre les oeuvres de la chair, qui tendent à nous diviser, et de vivre selon l'Esprit, qui promeut la croissance de la charité entre nous. Votre visite d'aujourd'hui, ainsi que celle que l'Eglise de Rome vous rendra dans quelques mois, témoignent que dans le Christ Jésus, la foi agit au moyen de la charité (cf. ibid., 5, 6). C'est l'expérience du "dialogue de la charité" inauguré sur le Mont des Oliviers par le Pape Paul VI et par le Patriarche Athénagoras, expérience qui ne s'est pas révélée vaine. En effet, les gestes accomplis jusqu'à présent sont nombreux et significatifs: je pense à l'abrogation des condamnations réciproques de 1054, aux discours, aux documents et aux rencontres promues par les Sièges de Rome et de Constantinople. Ces gestes ont marqué le chemin des dernières décennies. Et comment ne pas rappeler ici que, quelques mois avant sa mort, le Pape Jean-Paul II de vénérée mémoire, a échangé dans la Basilique Saint-Pierre un baiser fraternel avec le Patriarche oecuménique, précisément pour donner un signe spirituel profond de notre communion dans les saints, que nous invoquons tous deux, et pour répéter le ferme engagement d'oeuvrer sans cesse en vue de la pleine unité? Certes, notre chemin est long et difficile, et a été marqué au début par des craintes et des hésitations, mais il est devenu ensuite plus rapide et plus conscient. Un chemin qui a vu croître l'espérance d'un solide "dialogue de vérité" et d'un processus de clarification théologique et historique, qui a déjà donné des fruits appréciables.
Avec les paroles de l'Apôtre Paul, nous devons nous demander: "Est-ce en vain que vous avez éprouvé tant de faveurs?" (Ga 3, 4). Nous ressentons la nécessité d'unir nos forces et de ne pas épargner nos énergies afin que le dialogue théologique officiel, commencé en 1980 entre l'Eglise catholique et les Eglises orthodoxes dans leur ensemble, reprenne avec une vigueur renouvelée. A ce propos, je voudrais exprimer, chers Frères, mes sentiments de reconnaissance à l'égard de Sa Sainteté Bartholomaios, qui se prodigue pour réactiver les travaux de la Commission mixte internationale catholique-orthodoxe. Je désire l'assurer de ma ferme volonté d'appuyer et d'encourager cette action. La recherche théologique, qui doit affronter des questions complexes et trouver des solutions qui ne soient pas réductrices, représente un engagement sérieux, auquel nous ne pouvons pas nous soustraire. S'il est vrai que le Seigneur appelle avec force ses disciples à construire l'unité dans la charité et dans la vérité; s'il est vrai que l'appel oecuménique constitue une invitation pressante à réédifier, dans la réconciliation et dans la paix, l'unité gravement endommagée entre tous les chrétiens; si nous ne pouvons ignorer que la division rend moins efficace la très sainte cause de la prédication de l'Evangile à chaque créature (cf. Unitatis redintegratio, n. 1), comment pouvons-nous nous soustraire au devoir d'examiner avec clarté et bonne volonté nos différences, en les affrontant avec l'intime conviction qu'elles doivent être résolues? L'unité que nous recherchons n'est ni absorption, ni fusion, mais respect de la plénitude multiforme de l'Eglise qui, conformément à la volonté de son fondateur Jésus Christ, doit être toujours une, sainte, catholique et apostolique. Cette consigne a trouvé son plein écho dans la profession de foi intangible de tous les chrétiens, le Symbole élaboré par les Pères des Conciles oecuméniques de Nicée et de Constantinople (cf. Slavorum Apostoli, n. 15). Le Concile du Vatican a reconnu avec lucidité le trésor que possède l'Orient et dont l'Occident "a pris de nombreuses choses"; il a rappelé que les dogmes fondamentaux de la foi chrétienne ont été définis par les Conciles oecuméniques célébrés en Orient; il a exhorté à ne pas oublier combien de souffrances l'Orient a endurées pour conserver sa foi. L'enseignement du Concile a inspiré l'amour et le respect pour la Tradition orientale, il a encouragé à considérer l'Orient et l'Occident comme des tesselles qui composent le visage resplendissant du Pantocrátor, dont la main bénit tout l'Oikoumene. Le Concile est allé plus loin en affirmant: "Il n'est donc pas étonnant que certains aspects du mystère révélé aient été parfois mieux saisis et mieux exposés par l'un que par l'autre, si bien que ces diverses formules théologiques doivent souvent être considérées comme plus complémentaires qu'opposées" (Unitatis redintegratio, n. 17).
Chers frères, je vous demande d'apporter mes salutations au Patriarche oecuménique, l'informant de mon intention de poursuivre avec une ferme détermination dans la recherche de la pleine unité entre tous les chrétiens. Nous voulons continuer ensemble sur la voie de la communion, et accomplir ensemble de nouveaux pas et gestes, qui conduisent à surmonter les incompréhensions et les divisions qui demeurent, en se rappelant que "pour rétablir ou garder la communion et l'unité, il ne faut "rien imposer qui ne soit nécessaire" (Ac 15, 28)" (Ibid., n. 18). Merci de tout coeur à chacun de vous d'être venus de l'Orient rendre hommage aux saints Pierre et Paul que nous vénérons ensemble. Que leur protection constante et surtout que l'intercession maternelle de la Theotokos guident toujours nos pas. "Frères, la grâce de notre Seigneur Jésus Christ soit avec votre esprit!" (Ga 6, 18). - A une délégation du patriarcat oécuménique de Constantinople 30.6.2005


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