Jean-Paul II de A à Z

Evangelium Vitae - 1992

 

 

     1992

 

19 décembre 1992 - Aux Evêques d'Allemagne en Visite Ad Limina Apostolorum - ORFL 26.1.1993 - (Extraits)

3 – En tant que Maîtres de la foi, vous avez souvent traité des thèmes qui sont actuels dans la vie de votre société. Les indications que vous avez données, par exemple, pour la défense de la vie méritent une profonde reconnaissance. Il est impossible de mentionner toutes les initiatives proposées, qui existent et qui ont trouvé un soutien dans la direction entreprise par le Président de votre Conférence. Je me réfère en particulier aux nombreuses initiatives  pour la vie, par les quelles les catholiques, les chrétiens appartenant à d’autres confessions et les hommes de bonne volonté, qui ne se reconnaissent  en aucune communauté religieuse, ont manifesté leur conviction que la valeur de la vie humaine est inviolable de l’instant de la conception jusqu’au moment de la mort naturelle. Cela a aussi été rendu possible par la prise de conscience que la raison de la valeur de la vie humaine réside dans son essence même et dans sa dignité naturelle, et ici aucune instance ecclésiastique n’est recherchée de façon particulière, mais une exigence de l’humanité et des droits de l’homme.

            Fondamentalement, on ne peut pas disposer de la vie humaine ; et puisque l’enfant à naître est un homme dès l’instant de sa conception, et pas seulement plus tard, on ne peut pas établir un terme fixe pour disposer de sa vie. Les termes temporels mettent en discussion le fait que le droit doit promouvoir la défense de la vie.

            Votre constitution commence par cette reconnaissance fondamentale et par cette déclaration : « La dignité de l’homme est inviolable ». Il existe cependant des situations ou cette reconnaissance ne semble plus être évidente. Vous ne devez pas vous laisser décourager lors des débats animés pour la défense de la vie et vous devez être conscients du fait que sur cette question in n’existe pas d’arguments modernes ou anciens, mais seulement des considérations justes ou erronées. Le critère de ces considérations doit toujours être le droit à la vie de l’homme, même de celui qui n’est pas encore visible, petit et sans possibilité de s’exprimer. Le droit à la vie dans so totalité et sa richesse donnée par Dieu ne peut jamais être nié aux plus faibles pour qu’un autre puisse jouir de ce droit. L’affirmation eschatologique de Jésus-Christ, qui est venu, « afin qu’ils aient la vie en abondance » (Jn 10,10) vaut assurément pour chaque type de vie.

            C’est avec une profonde satisfaction que j’ai appris vos efforts pour assister les femmes dans leurs souffrances, même si celles-ci ont peut-être pris une décision contre la vie à son stade initial. L’Église agit en faveur des femmes lorsqu’elle tente d’empêcher les interruptions de grossesse. Et l’Église agit ouvertement en faveur des femmes lorsqu’elle s’engage à créer dans notre société des conditions favorables aux enfants.

 

4 – Je voudrais affronter ici un autre défi, qui se présentera ces prochaines années, à nous, chrétiens d’Europe, et qui touche profondément la dignité de l’homme. Nous faisons l’expérience qu’un nombre toujours plus grand de personnes ne savent  pas affronter la mort ; leur vie est orientée de façon à l’éloigner. Nos sociétés modernes et sécularisées courent le risque d’éliminer de la vie personnelle, comme une norme, la souffrance, le vieillissement et la mort. Comme dans la vie rien n’est plus sûr que la mort (cf Si 8;14,12 ; Rm 5,12), nous observons, en conséquence de ce processus d’éloignement, un manque de préparation et une grande confusion à l’égard de la mort. Le délicat thème de l’euthanasie acquiert dans ce contexte une signification  entièrement nouvelle. En Europe, il semble qu’il y ait toujours plus de partisan de l’idée qu’il puisse être permis de mettre fin d’une manière consciente à sa propre vie ou à la vie d’un autre être humain. Le concept de l’euthanasie a perdu depuis longtemps, pour beaucoup de personnes, la connotation d’horreur que les atroces événements du plus sombre et plus triste chapitre de l’histoire de votre pays lui avait conférée. La gravité du suicide et du meurtre est à nouveau atténuée aujourd’hui par des noms comme mort libre et euthanasie.

            Peu de catholiques dans votre pays ont reconnu que les chrétiens ont l’important et précieux devoir d’assistance face à la mort, qui garantisse à l’homme sa propre dignité même au cours de l’ultime phase de sa vie. Une vie sans Dieu et, par conséquent, sans référence à l’éternité, doit capituler face à la mort. D’autre part, et en tant que chrétiens, nous savons que la mort a un sens et qu’elle n’est pas la fin puisque « nous recevrons un édifice qui est l’oeuvre de Dieu, une maison éternelle qui n’est pas faite de main d’homme, dans les cieux » (2 Co 5,1 ; cf 1 Co 15,21; Ph 1,20).

            Mes remerciements et nos encouragements s’adressent à tous les chrétiens qui ravivent l’engagement ancien mais toujours actuel pour les centres d’assistance. La promotion des institutions qui favoriseront l’assistance des catholiques aux mourants sera plus importante à l’avenir que la construction ou l’acquisition d’un nouvel hôpital par une organisation catholique, dans lequel de bons médecins peuvent agir avec les équipements les plus modernes, et sera plus importante aussi  que la rénovation d’un centre de congrès. Il faut que les chrétiens soient porteurs d’espérance. Cela sera pour nous, en tant qu’Eglise, une nouvelle épreuve, car il s’agit de l’inviolabilité de la dignité humaine. Ici, plus que dans d’autres milieux, nous pouvons illustrer ce qui est véritablement important:apprendre la vie par la mort et la mort pas la vie. Si vous parvenez à instituer en Allemagne, en temps utile,d’autres centres d’assistance qui soient des îlots d’humanité, vous empêcherez que se fassent valoir ceux qui affirment aider les mourants, mais qui capitulent en vérité face à ce défi car, ayant recours aux pilules de la mort, ils confondent l’aide face à la mort avec l’aide à mourir. L’homme qui est en train de mourir ne veut pas de médicaments, pour être ensuite laissé tout seul, mais il désire une espérance authentique, de la chaleur humaine et une main tendue. Encouragez vos fidèles à remplir cette tâche  vraiment chrétienne, car la dignité de l’homme est inviolable.

 

5 – La disparition, au sein d’une société, de la sensibilité qui fait que l’appel à la conscience ne soit pas une licence pour tuer un autre homme, aussi bien d’un homme qui grandit dans le sein maternel, que d’un homme âgé ou gravement malade, dont l’existence serait considérée comme une entrave à la liberté du progrès, orientée vers la satisfaction de ses propres intérêts, serait sans doute un symptôme alarmant. Seul un peuple d’égoïstes pourrait ignorer que la conscience digne de ce nom exhorte toujours à empêcher de tuer.

            L’appel à la conscience est souvent lancé aujourd’hui sans un minimum de reflexion sur sa fonction. Le Concile Vatican II souligne qu’ »il arrive souvent que la conscience s’égare, par suite d’une ignorance invincible, sans perdre pour autant sa dignité. Ce que l’on ne peut dire lorsque l’homme se soucie peu de rechercher le vrai et le bien et lorsque l’habitude du péché rend peu à peu sa conscience presque aveugle » (Gaudium et spes, N. 16). Le thème de la dignité de la conscience ne doit pas être utilisé à l’encontre de la signification de la vérité morale, comme si elles n’étaient pas attenantes l’une à l’autre. Cela ne constituerait rien d’autre qu’une interprétation pharisienne de la liberté de conscience. Lorsque la conscience ne s’oriente plus vers des valeurs universellement valables et vers le transcendant, il apparaît difficile de reveiller en elle le sens du péché et de la faute (cf 1 Jn 1,8 ; Reconciliato et paenitentia, N. 18).

            Le manque de conscience des péchés va de pair avec la diminution de la pratique sacramentelle de la pénitence. Le renouvellement et la conversion sous l’aspect sacramentel de la confession individuelle doivent rester un thème central de la pastorale ( Reconciliato et paenitentia, n. 31,I). Pour cette raison, je vous demande fortement d’aider vos prêtres à  attribuer toujours plus d’importance et de valeur à leur service de confesseurs. En même temps, je vous remercie de tout ce que vous faites pour illustrer la signification et l’importance de la discipline ecclésiastique dans un domaine étroitement lié à l’oeuvre de réconciliation. Cherchez à convaincre vos fidèles des grands avantages qui découlent de la confession individuelle. La confession vaut plus et mieux que tout encouragement humain, que n’importe quelle technique psychologique ou de n’importe quelle solution dialectique ou sociologique.

 

publié le : 18 février 2018

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