Voyages apostoliques

- Visite du Saint-Père François en Albanie - dimanche 21 septembre 2014

4ème Voyage Apostolique international du Pape François - dimanche 21 septembre 2014

 

 

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Discours du Saint-Père avec les autorités d'Albanie, au palais présidentiel.

 

Monsieur le Président,

Monsieur le Premier Ministre,

Honorables Membres du Corps Diplomatique,

Excellences, Mesdames, Messieurs,

Je suis très heureux d’être avec vous, sur la noble terre d’Albanie, terre des héros qui ont sacrifié leur vie pour l’indépendance du pays, et terre des martyrs qui ont témoigné de leur foi aux temps difficiles de la persécution. Je vous remercie de votre invitation à visiter votre patrie, appelée « terre des aigles », et pour votre accueil festif.

Près d’un quart de siècle s’est écoulé depuis que l’Albanie a retrouvé le chemin, rude mais passionnant, de la liberté. Celle-ci a permis à la société albanaise d’entreprendre un parcours de reconstruction matérielle et spirituelle, de susciter beaucoup d’énergies et d’initiatives, de s’ouvrir à la collaboration et aux échanges avec les pays voisins des Balkans et de la Méditerranée, de l’Europe et du monde entier. La liberté retrouvée vous a permis de regarder vers l’avenir avec confiance et espérance, de lancer des projets et de tisser à nouveau des relations d’amitié avec les nations voisines et lointaines.

Le respect des droits humains, parmi lesquels se distingue la liberté religieuse et d’expression de la pensée, est, en effet, une condition préalable au développement même du pays qu’il soit social ou économique. Quand la dignité de l’homme est respectée et que ses droits sont reconnus et garantis, fleurissent aussi la créativité et l’esprit d’initiative, et la personnalité humaine peut déployer ses multiples initiatives en faveur du bien commun.

Je me réjouis particulièrement d’une heureuse caractéristique de l’Albanie, qui est préservée avec beaucoup de soin et d’attention : je fais référence à la cohabitation pacifique et à la collaboration entre ceux qui appartiennent à différentes religions. Le climat de respect et de confiance réciproque entre catholiques, orthodoxes et musulmans est un bien précieux pour le pays, et acquiert une importance spéciale à notre époque où le sens religieux authentique est travesti par des groupes extrémistes, et où les différences entre les diverses confessions sont déformées et instrumentalisées, en en faisant un dangereux facteur d’affrontement et de violence ; cela au lieu d’en faire une occasion de dialogue ouvert et respectueux, et de réflexion commune sur ce que signifie croire en Dieu et suivre sa loi.

Que personne ne pense pouvoir se faire de Dieu un bouclier lorsqu’il projette et accomplit des actes de violence et de mépris ! Que personne ne prenne prétexte de la religion pour accomplir ses propres actions contraires à la dignité de l’homme et à ses droits fondamentaux, en premier lieu celui à la vie et à la liberté religieuse de tous !

Ce qui se passe en Albanie démontre, au contraire, que la cohabitation pacifique et fructueuse entre personnes et communautés appartenant à des religions différentes est, non seulement souhaitable, mais concrètement possible et réalisable. En effet, la cohabitation pacifique entre les différentes communautés religieuses est un bien inestimable pour la paix et pour le développement harmonieux d’un peuple. C’est une valeur qui est gardée et qui s’accroît chaque jour par l’éducation au respect des différences et des identités spécifiques, ouvertes au dialogue et à la collaboration pour le bien de tous, et par l’exercice de la connaissance et de l’estime les uns des autres. C’est un don qui est toujours demandé au Seigneur dans la prière. Puisse l’Albanie continuer toujours sur cette route, devenant pour beaucoup de pays un exemple dont on s’inspire !

Monsieur le Président, après l’hiver de l’isolement et des persécutions, est venu enfin le printemps de la liberté. À travers des élections libres et de nouvelles formes institutionnelles, le pluralisme démocratique s’est consolidé et cela a favorisé la reprise des activités économiques. Beaucoup de personnes, surtout au début, poussées par la recherche d’un travail et de meilleures conditions de vie, ont pris le chemin de l’émigration et participent à leur manière au progrès de la société albanaise. Beaucoup d’autres ont redécouvert les raisons de rester dans le pays et de le construire de l’intérieur. Les peines et les sacrifices de tous ont contribué à l’amélioration des conditions générales.

L’Église Catholique, de son côté, a pu reprendre une existence normale, reconstituant sa hiérarchie et renouant le fil d’une longue tradition. Des lieux de culte ont été construits ou reconstruits, parmi lesquels se distingue le sanctuaire de Notre Dame du Bon Conseil, à Scutari ; des écoles ont été fondées ainsi que d’importants centres éducatifs et d’assistance, à la disposition de tous les citoyens. La présence de l’Église et son action sont dès lors perçues à juste titre non seulement comme un service à la communauté catholique, mais aussi à la nation tout entière.

La bienheureuse Mère Teresa, avec les martyrs qui ont héroïquement témoigné de leur foi – à eux va notre plus haute reconnaissance et notre prière – se réjouissent certainement au ciel de l’engagement des hommes et des femmes de bonne volonté pour faire refleurir la société et l’Église en Albanie.

Mais maintenant de nouveaux défis se présentent auxquels il faut répondre. Dans un monde qui tend à la mondialisation économique et culturelle, il convient de faire tous les efforts pour que la croissance et le développement soient mis à la disposition de tous, et pas seulement d’une partie de la population. De plus, un tel développement ne sera pas authentique s’il n’est aussi durable et équitable, c’est à dire s’il ne se souvient pas des droits des pauvres et ne respecte pas l’environnement. À la mondialisation des marchés il est nécessaire que corresponde une mondialisation de la solidarité ; la croissance économique doit s’accompagner d’un plus grand respect de la création ; en même temps que les droits individuels, ceux des réalités intermédiaires entre l’individu et l’État doivent être protégés, et la première de toutes ces réalités c’est la famille. L’Albanie aujourd’hui peut affronter ces défis dans un cadre de liberté et de stabilité, qui sont consolidées et qui font bien espérer pour l’avenir.

Je remercie cordialement chacun de vous pour l’accueil délicat et, comme le fit saint Jean Paul II en avril 1993, j’invoque sur l’Albanie la protection de Marie, Mère du Bon Conseil, lui confiant les espérances de tout le peuple albanais. Que Dieu répande sur l’Albanie sa grâce et sa bénédiction.

 

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Homélie du Pape sur la Place Bienheureuse Mère Teresa de Calcutta

en présence de plus de 500 000 fidèles. Homélie de nombreuses fois interrompues par les applaudissements.

 

Aujourd’hui, l’Évangile nous dit que, en plus des douze Apôtres, Jésus appelle soixante douze autres disciples et les envoie dans les villages et dans les villes pour annoncer le Règne de Dieu (cf. Lc 10,1-9.17-20). Il est venu porter dans le monde l’amour de Dieu et il veut le répandre par la communion et la fraternité. Pour cela il forme tout de suite une communauté de disciples, une communauté missionnaire, et il les entraîne à la mission, à « aller ». La méthode missionnaire est claire et simple : les disciples vont dans les maisons et leur annonce commence par une salutation pleine de sens : « Paix à cette maison ! » (v. 5). Ce n’est pas seulement une salutation, c’est aussi un don : la paix. Venant aujourd’hui parmi vous, chers frères et sœurs d’Albanie, sur cette place dédiée à une humble et grande fille de cette terre, la bienheureuse Mère Teresa de Calcutta, je veux vous répéter cette salutation : paix dans vos maisons, paix dans vos cœurs, paix dans votre nation !

Dans la mission des soixante douze disciples se reflète l’expérience missionnaire de la communauté chrétienne de tous les temps : le Seigneur ressuscité et vivant envoie non seulement les Douze, mais l’Église entière, il envoie tout baptisé annoncer l’Évangile à tous les peuples. Au cours des siècles, l’annonce de paix portée par les messagers de Jésus n’a pas toujours été accueillie ; parfois les portes se sont fermées. Dans un passé récent, la porte de votre pays a également été fermée, bloquée par le verrou des interdictions et des prescriptions d’un système qui niait Dieu et empêchait la liberté religieuse. Ceux qui avaient peur de la vérité et de la liberté faisaient tout pour bannir Dieu du cœur de l’homme et exclure le Christ et l’Église de l’histoire de votre pays, même si celui-ci a été parmi les premiers à recevoir l’Évangile. Dans la seconde lecture, en effet, nous avons entendu la référence à l’Illyrie qui, aux temps de l’Apôtre Paul incluait aussi le territoire de l’actuelle Albanie.

En repensant à ces décennies d’atroces souffrances et de très dures persécutions contre les catholiques, les orthodoxes et les musulmans, nous pouvons dire que l’Albanie a été une terre de martyrs : beaucoup d’évêques, de prêtres, de religieux et de fidèles laïcs ont payé de leur vie leur fidélité. Les preuves de grand courage et de cohérence dans la profession de la foi ne manquent pas. Combien de chrétiens ne se sont pas pliés devant les menaces, mais ont continué sans vaciller sur la route entreprise ! Je me rends spirituellement à ce mur du cimetière de Scutari, lieu-symbole du martyr des catholiques, où on exécutait les fusillades, et avec émotion je dépose la fleur de la prière et du souvenir reconnaissant et impérissable. Le Seigneur a été à côté de vous, chers frères et sœurs, pour vous soutenir ; il vous a guidés et consolés et enfin il vous a enlevés sur les ailes de l’aigle comme il fit un jour avec l’ancien peuple d’Israël (cf. première lecture). L’aigle, représenté sur le drapeau de votre pays, vous rappelle au sens de l’espérance, à remettre toujours votre confiance en Dieu, qui ne déçoit pas mais qui est toujours à nos côtés, surtout dans les moments difficiles.

Aujourd’hui les portes de l’Albanie se sont rouvertes et le temps d’un nouvel engagement missionnaire pour tous les membres du peuple de Dieu est en train de mûrir : tout baptisé a une place et une tâche à développer dans l’Église et dans la société. Que chacun se sente appelé à s’engager généreusement dans l’annonce de l’Évangile et dans le témoignage de la charité ; à renforcer les liens de la solidarité pour promouvoir des conditions de vie plus justes et plus fraternelles pour tous. Aujourd’hui je suis venu pour vous encourager à faire croître l’espérance en vous et autour de vous ; à impliquer les nouvelles générations ; à vous nourrir assidument de la Parole de Dieu en ouvrant vos cœurs au Christ : son Évangile vous indique le chemin ! Que votre foi soit joyeuse et radieuse ; qu’elle montre que la rencontre avec le Christ donne sens à la vie des hommes, de tout homme.

En esprit de communion entre évêques, prêtres, personnes consacrées et fidèles laïcs, je vous encourage à donner un élan à l’action pastorale et à continuer la recherche de nouvelles formes de présence de l’Église dans la société. En particulier, je m’adresse aux jeunes : n’ayez pas peur de répondre avec générosité au Christ qui vous invite à le suivre ! Dans la vocation sacerdotale ou religieuse vous trouverez la richesse et la joie du don de vous-même pour servir Dieu et vos frères. Tant d’hommes et de femmes attendent la lumière de l’Évangile et la grâce des Sacrements !

Église qui vit en cette terre d’Albanie, merci pour ton exemple de fidélité à l’Évangile ! Beaucoup de tes fils et de tes filles ont souffert pour le Christ, y compris jusqu’au sacrifice de leur vie. Que leur témoignage soutienne tes pas, aujourd’hui et demain, sur la voie de l’amour, de la liberté, de la justice et de la paix. Amen.

 

 

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Méditation du Saint-Père lors de la prière de l'Angelus

 

Chers frères et sœurs,

Avant de conclure cette célébration, je désire vous saluer tous, qui êtes venus d’Albanie et des pays voisins. Je vous remercie de votre présence et du témoignage de votre foi.

Je m’adresse en particulier à vous, les jeunes ! Je vous invite à construire votre existence sur Jésus-Christ. Celui qui construit sur le Christ construit sur le roc, parce que lui est toujours fidèle, même si nous manquons de fidélité (cf. 2Tim 2,13). Jésus nous connaît mieux que quiconque ; quand nous nous trompons, il ne nous condamne pas mais il nous dit : « Va et désormais ne pèche plus » (Jn 8,11). Chers jeunes, vous êtes la nouvelle génération de l’Albanie. Avec la force de l’Évangile et l’exemple des martyrs, sachez dire non à l’idolâtrie de l’argent, non à la fausse liberté individualiste, non aux dépendances et à la violence ; et au contraire dire oui à la culture de la rencontre et de la solidarité, oui à la beauté inséparable du bien et du vrai ; oui à la vie dépensée avec grandeur d’âme et fidélité dans les petites choses. Ainsi vous construirez une Albanie meilleure et un monde meilleur.

Nous nous tournons maintenant vers la Vierge Mère, que vous vénérez surtout sous le titre de « Notre Dame du Bon Conseil ». Je me rends spirituellement à son sanctuaire de Scutari, qui vous est si cher, et je lui confie toute l’Église en Albanie et le peuple albanais tout entier, en particulier les familles, les enfants et les personnes âgées. Que la Vierge Marie vous guide pour marcher « ensemble avec Dieu, vers l’espérance qui ne déçoit pas ».

Angelus Domini…

 

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Rencontre avec les responsables des religions -

texte défitinif à venir, car le Saint-Père à plusieurs reprises à ajouter des paroles non préparées d'avance.

 

Chers amis,

Je suis vraiment heureux de cette rencontre, qui réunit les responsables des principales confessions religieuses présentes en Albanie. Je salue avec un profond respect chacun de vous et les communautés que vous représentez ; et je remercie de grand cœur Monseigneur Massafra pour ses paroles de présentation et d’introduction. Il est important que vous soyez ici ensemble : c’est le signe d’un dialogue que vous vivez quotidiennement, en cherchant à construire entre vous des relations de fraternité et de collaboration, pour le bien de la société tout entière.

L’Albanie a été tristement témoin de telles violences et de tels drames que cela peut causer l’exclusion forcée de Dieu de la vie personnelle et communautaire. Quand, au nom d’une idéologie, on veut expulser Dieu de la société, on finit par adorer des idoles, et bien vite aussi l’homme s’égare lui-même, sa dignité est piétinée, ses droits violés. Vous savez bien à quelles brutalités peut conduire la privation de la liberté de conscience et de la liberté religieuse, et comment à partir de ces blessures se forme une humanité radicalement appauvrie, parce que privée d’espérance et de référence à des idéaux.

Les changements survenus à partir des années 90 du siècle dernier ont eu comme effet positif aussi celui de créer les conditions pour une liberté de religion effective. Cela a donné à chaque communauté la possibilité de raviver des traditions qui ne s’étaient jamais éteintes, malgré les persécutions féroces, et a permis à tous d’offrir, également à partir de sa propre conviction religieuse, une contribution positive à la reconstruction morale, avant la reconstruction économique du pays.

En réalité, comme l’a affirmé saint Jean-Paul II dans sa visite historique en Albanie en 1993, « la liberté religieuse […] n’est pas seulement un don précieux du Seigneur pour ceux qui ont reçu la grâce de la foi : elle est un don pour tous parce qu’elle est la garantie fondamentale de toute expression de la liberté […] Il n’est rien qui nous rappelle, autant que la foi, que, si nous avons un unique Créateur, alors nous sommes tous frères ! Ainsi, la liberté religieuse est un rempart contre les totalitarismes et une contribution décisive à la fraternité humaine » (Message à la nation albanaise, 25 avril 1993).

Mais il faut tout de suite ajouter : « La vraie liberté religieuse a horreur des tentations de l’intolérance et du sectarisme et promeut des attitudes de dialogue respectueux et constructif » (ibid.). Nous ne pouvons pas ne pas reconnaître combien l’intolérance envers celui qui a des convictions religieuses différentes des siennes propres est un ennemi particulièrement insidieux, qui malheureusement se manifeste aujourd’hui en différentes régions du monde. En tant que croyants, nous devons être particulièrement vigilants pour que la religiosité et l’éthique que nous vivons avec conviction et dont nous témoignons avec passion s’exprime toujours par des attitudes dignes du mystère que l’on entend honorer, en refusant avec résolution comme non vraies, parce que non dignes de Dieu ni de l’homme, toutes ces formes qui représentent un usage déformé de la religion. La religion authentique est source de paix et non de violence ! Personne ne peut utiliser le nom de Dieu pour commettre de la violence ! Tuer au nom de Dieu est un grand sacrilège ! Discriminer au nom de Dieu est inhumain.

De ce point de vue, la liberté religieuse n’est pas un droit qui puisse être garanti uniquement par le système législatif en vigueur, qui est aussi nécessaire : c’est un espace commun, une atmosphère de respect et de collaboration qui est construit avec la participation de tous, même de ceux qui n’ont aucune conviction religieuse. Je me permets d’indiquer deux attitudes qui peuvent être d’une utilité particulière dans la promotion de cette liberté fondamentale.

La première, c’est celle de voir en tout homme et en toute femme, même en ceux qui n’appartiennent pas à sa propre tradition religieuse, non des rivaux, encore moins des ennemis, mais bien des frères et des sœurs. Celui qui est assuré de ses convictions propres n’a pas besoin de s’imposer, d’exercer des pressions sur l’autre : il sait que la vérité a sa force de rayonnement propre. Nous sommes tous, au fond, des pèlerins sur cette terre, et au cours de notre voyage, tandis que nous aspirons à la vérité et à l’éternité, nous ne vivons pas comme des entités autonomes et autosuffisantes, ni comme des individus ni comme des groupes nationaux, culturels ou religieux, mais nous dépendons les uns des autres, nous sommes confiés aux soins les uns des autres. Chaque tradition religieuse, à l’intérieur d’elle-même, doit réussir à rendre compte de l’existence de l’autre.

Une seconde attitude est l’engagement en faveur du bien commun. Chaque fois que l’adhésion à sa propre tradition religieuse fait germer un service plus convaincu, plus généreux, plus désintéressé pour la société tout entière, il y a un exercice authentique et un développement de la liberté religieuse. Celle-ci apparaît alors non seulement comme un espace d’autonomie légitimement revendiquée, mais comme une potentialité qui enrichit la famille humaine par son exercice progressif. Plus on est au service des autres, et plus on est libre !

Regardons autour de nous : combien sont nombreux les besoins des pauvres, combien nos sociétés doivent encore trouver des chemins vers une justice sociale plus répandue, vers un développement économique inclusif ! Combien l’âme humaine a besoin de ne pas perdre de vue le sens profond des expériences de la vie et de récupérer l’espérance ! Dans ces domaines d’action, les hommes et des femmes inspirés par les valeurs de leur propre tradition religieuse peuvent offrir une contribution importante, même irremplaçable. C’est là aussi un terrain particulièrement fécond pour le dialogue interreligieux.

Chers amis, je vous exhorte à maintenir et à développer la tradition de bonnes relations entre les communautés religieuses existantes en Albanie, et à vous sentir unis dans le service de votre chère patrie. Continuez à être signe, pour votre pays et pas seulement, de la possibilité de relations cordiales et de collaboration féconde entre des hommes de religions différentes. Et priez aussi pour moi. Que Dieu vous bénisse.

 

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Méditation du Saint-Père lors des Vêpres

Chers frères et sœurs !

C’est pour moi une grande joie de vous rencontrer sur votre terre bien-aimée ; je remercie le Seigneur et je vous remercie tous pour votre accueil ! Me trouvant au milieu de vous, je puis mieux exprimer ma proximité à votre engagement d’évangélisation.

Depuis que votre pays est sorti de la dictature, les communautés ecclésiales ont recommencé à cheminer et à s’organiser pour l’action pastorale, et elles regardent avec espérance vers l’avenir. Ma pensée reconnaissante va en particulier à ces Pasteurs qui ont payé d’un prix élevé leur fidélité au Christ et leur décision de rester unis au Successeur de Pierre. Ils ont été courageux dans la difficulté et dans l’épreuve ! Il y a encore parmi nous des prêtres et des religieux qui ont fait l’expérience de la prison et de la persécution, comme la sœur et le frère qui nous ont raconté leur histoire. Je vous embrasse avec émotion et je rends grâce à Dieu pour votre témoignage fidèle, qui stimule toute l’Église à poursuivre avec joie l’annonce de l’Évangile.

Mettant à profit cette expérience, l’Église en Albanie peut croître dans le zèle missionnaire et dans le courage apostolique. Je connais et j’apprécie l’engagement avec lequel vous vous opposez à de nouvelles formes de "dictature" qui risquent de rendre esclaves les personnes et les communautés. Si le régime athée cherchait à étouffer la foi, ces dictatures, plus sournoises, peuvent étouffer la charité. Je pense à l’individualisme, aux rivalités et aux confrontations exaspérées : c’est une mentalité mondaine qui peut contaminer aussi la communauté chrétienne. Il ne sert à rien de se décourager devant ces difficultés, n’ayez pas peur d’avancer sur la route du Seigneur. Il est toujours à vos côtés, il vous donne sa grâce et vous aide à vous soutenir les uns les autres, à vous accepter comme vous êtes, avec compréhension et miséricorde, à cultiver la communion fraternelle.

L’évangélisation est plus efficace quand elle est mise en œuvre avec unité d’intention et avec une collaboration sincère entre les différentes réalités ecclésiales et entre les missionnaires et le clergé local : cela comporte le courage de poursuivre dans la recherche des formes de travail commun et d’aide réciproque dans les domaines de la catéchèse, de l’éducation catholique, comme aussi de la promotion humaine et de la charité. Dans ces domaines aussi, l’apport des mouvements ecclésiaux, qui savent faire des projets et agir en communion avec les Pasteurs et entre eux est précieux. C’est ce que je vois ici : évêques, prêtres, religieux et laïcs, une Église qui veut marcher dans la fraternité et dans l’unité.

Quand l’amour du Christ est placé au-dessus de tout, même d’exigences particulières légitimes, on devient alors capable de sortir de nous-mêmes, de nos "petitesses" personnelles ou de groupe, et d’aller vers Jésus qui s’approche de nous dans les frères ; ses plaies sont encore visibles aujourd’hui sur le corps de beaucoup d’hommes et de femmes qui ont faim et soif, qui sont humiliés, qui se trouvent en prison ou à l’hôpital. Et vraiment en touchant et en soignant avec tendresse ces plaies, il est possible de vivre l’Évangile jusqu’au bout et d’adorer Dieu vivant au milieu de nous.

Ils sont nombreux les problèmes que vous affrontez chaque jour ! Ils vous poussent à vous immerger avec passion dans une activité apostolique généreuse. Toutefois, nous savons que seuls nous ne pouvons rien faire. « Si le Seigneur ne bâtit la maison, les bâtisseurs travaillent en vain » (Ps 127, 1). Cette conscience nous appelle à donner chaque jour la juste place au Seigneur, à lui consacrer du temps, à lui ouvrir notre cœur, afin qu’il agisse dans notre vie et dans notre mission. Ce que le Seigneur promet à la prière confiante et persévérante dépasse ce que nous imaginons (cf. Lc 11, 11-12) : au-delà de ce que nous demandons, il nous donne aussi l’Esprit Saint. La dimension contemplative devient indispensable, au milieu des engagements les plus urgents et les plus pesants. Et plus la mission nous appelle à aller vers les périphéries existentielles, plus notre cœur sent le besoin intime d’être uni à celui du Christ, plein de miséricorde et d’amour.

Et considérant que les prêtres et les personnes consacrées ne sont pas encore en nombre suffisant, le Seigneur Jésus vous répète aussi aujourd’hui : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux ! Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson ! » (Mt 9, 37-38). Il ne faut pas oublier que cette prière part d’un regard : le regard de Jésus, qui voit l’abondance de la moisson. Avons-nous, nous aussi ce regard ? Savons-nous reconnaître l’abondance des fruits que la grâce de Dieu a fait croître, et du travail qu’il y a à faire dans le champ du Seigneur ? C’est de ce regard de foi sur le champ de Dieu que naît la prière, l’invocation quotidienne et pressante au Seigneur pour les vocations sacerdotales et religieuses. Vous, chers séminaristes, et vous, chers postulants et novices, vous êtes le fruit de cette prière du peuple de Dieu, qui précède et accompagne toujours votre réponse personnelle. L’Église en Albanie a besoin de votre enthousiasme et de votre générosité. Le temps qu’aujourd’hui vous consacrez à une solide formation spirituelle, théologique, communautaire et pastorale, est fécond en vue de servir de façon adéquate, demain, le peuple de Dieu. Les gens, plus que des maîtres, cherchent des témoins : des témoins humbles de la miséricorde et de la tendresse de Dieu ; des prêtres et des religieux conformés à Jésus Bon pasteur, capables de communiquer à tous la charité du Christ.

À ce sujet, avec vous et avec tout le peuple albanais, je veux rendre grâce à Dieu pour les nombreux missionnaires, hommes et femmes, dont l’action a été déterminante pour la renaissance de l’Église en Albanie et reste encore aujourd’hui d’une grande importance. Ils ont contribué notablement à consolider le patrimoine spirituel qu’évêques, prêtres, personnes consacrées et laïcs albanais ont conservé, au milieu d’épreuves et de tribulations très dures. Nous pensons au grand travail fait par les Instituts religieux pour relancer l’éducation catholique : ce travail mérite d’être reconnu et soutenu.

Chers frères et sœurs, ne vous découragez pas devant les difficultés ; sur les pas de vos pères, soyez tenaces dans le témoignage rendu au Christ, marchant « ensemble avec Dieu, vers l’espérance qui ne déçoit jamais ». Que sur votre chemin, vous vous sentiez toujours accompagnés et soutenus par l’affection de toute l’Église ! Je vous remercie cordialement pour cette rencontre et je confie chacun de vous et vos communautés, vos projets et vos espérances à la sainte Mère de Dieu. Je vous bénis de grand cœur et je vous demande, s’il vous plaît, de prier pour moi.

 

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Visite du Saint-Père au Centre Bétanie

 

Chers amis du Centre Béthanie,

Je vous remercie de tout cœur pour votre accueil plein de joie ! Et surtout je vous remercie pour l’accueil que vous offrez ici chaque jour à de nombreux enfants et adolescents qui ont besoin de soin, de tendresse, d’un climat serein et de personnes amies qui soient de vrais éducateurs, un exemple de vie et un soutien.

Dans des lieux comme celui-ci nous sommes tous confirmés dans la foi, tous aidés à croire, parce que nous voyons la foi se faire charité concrète. Nous la voyons porter lumière et espérance dans des situations de grande détresse ; nous la voyons se rallumer dans le cœur de personnes touchées par l’Esprit de Jésus qui a dit : « Quiconque accueille en mon nom un enfant comme celui-ci ; c’est moi qu’il accueille » (Mc 9, 37). Cette foi qui opère dans la charité déplace les montagnes de l’indifférence, de l’incrédulité et de l’apathie, et ouvre les cœurs et les mains pour accomplir le bien et pour le répandre. À travers des gestes humbles et simples du service aux petits passe la Bonne Nouvelle que Jésus est ressuscité et vit au milieu de nous.

Ce Centre, en outre, témoigne qu’une cohabitation pacifique et fraternelle entre des personnes appartenant à différentes ethnies et à des confessions religieuses différentes est possible. Ici, les différences n’empêchent pas l’harmonie, la joie et la paix, elles deviennent même l’occasion d’une connaissance plus profonde et d’une compréhension réciproque. Les différentes expériences religieuses s’ouvrent à l’amour respectueux et efficace envers le prochain ; chaque communauté religieuse s’exprime par l’amour et non par la violence, elle n’a pas honte de la bonté ! À celui qui la fait grandir en lui, la bonté donne une conscience tranquille, une joie profonde même au milieu des difficultés et des incompréhensions. Jusque dans les offenses subies, la bonté n’est pas faiblesse, mais vraie force capable de renoncer à la vengeance.

Le bien a du prix en lui-même et nous rapproche de Dieu, Souverain Bien. Il nous fait penser comme lui, nous fait voir la réalité de notre vie à la lumière de son dessein d’amour sur chacun de nous, nous fait goûter les petites joies de chaque jour et nous soutient dans les difficultés et dans les épreuves. Le bien paie infiniment plus que l’argent, qui au contraire déçoit, parce que nous avons été créés pour accueillir l’amour de Dieu et le donner à notre tour, et non pour mesurer chaque chose sur la base de l’argent ou du pouvoir.

Chers amis, dans son salut votre Directrice a rappelé les étapes accomplies par votre Association et les œuvres nées de l’intuition de la fondatrice, Madame Antonietta Vitale – que je salue cordialement et remercie pour son accueil – et a mis en évidence l’aide des bienfaiteurs et les avancées des diverses initiatives. Elle a cité les nombreux enfants accueillis et soignés avec amour. Mirjan a témoigné par contre de son expérience personnelle, de l’émerveillement et de la gratitude pour une rencontre qui a transformé son existence et l’a ouverte à de nouveaux horizons, lui faisant rencontrer de nouveaux amis et un Ami encore plus grand et meilleur que les autres : Jésus. Il a dit une chose très significative à propos des volontaires qui travaillent ici ; il a dit : "Depuis 15 ans, ils se sacrifient avec joie par amour de Jésus et par amour de nous". C’est une phrase qui révèle combien le don de soi par amour de Jésus suscite joie et espérance, et combien le service des frères se transforme dans le fait de régner ensemble en Dieu. Ces paroles de Mirjan-Paolo peuvent sembler paradoxales à une grande partie de notre monde, qui a de la difficulté à les comprendre et cherche fébrilement dans les richesses terrestres, dans la possession et dans le divertissement pris comme fin en soi-même la clé de sa propre existence, trouvant au contraire aliénation et étourdissement.

Le secret d’une existence réussie est au contraire d’aimer et de se donner par amour. Alors, on trouve la force de "se sacrifier avec joie" et l’engagement le plus prenant devient source d’une joie plus grande. Alors, les choix définitifs de vie ne font plus peur, mais ils apparaissent dans leur vraie lumière, comme une manière de réaliser pleinement sa liberté propre.

Que le Seigneur Jésus et sa Mère, la Vierge Marie, bénissent votre Association, ce Centre Béthanie et les autres centres que la charité a fait surgir et que la Providence a fait croître. Qu’ils bénissent tous les volontaires, les bienfaiteurs et tous les enfants et adolescents accueillis. Que votre Patron, saint Antoine de Padoue vous accompagne sur le chemin. Continuez avec confiance à servir dans les pauvres et dans les abandonnés le Seigneur Jésus et à le prier pour que les cœurs et les esprits de tous s’ouvrent au bien, à la charité agissante, source de joie vraie et authentique. Je vous demande, s’il vous plaît, de prier pour moi et je vous bénis de tout cœur.

 

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publié le : 21 septembre 2014

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