François de A à Z

Evangelium Vitae - 2014

13 janvier 2014 – Vœux au Corps Diplomatique

      Dans le message pour la Journée mondiale de la Paix, consacré à la fraternité comme fondement et chemin pour la paix, j’ai souligné que « la fraternité commence habituellement à s’apprendre au sein de la famille »[1] qui, « par vocation devrait gagner le monde par son amour »[2] et contribuer à faire mûrir cet esprit de service et de partage qui construit la paix[3]. C’est ce que nous raconte la crèche, où nous voyons la Sainte Famille non pas seule et isolée du monde, mais entourée des bergers et des mages, c’est-à-dire une communauté ouverte, dans laquelle il y a de la place pour tous, pauvres et riches, proches et lointains. Et on comprend ainsi les paroles de mon bien-aimé prédécesseur Benoît XVI, qui soulignait combien « le lexique familial est un lexique de paix »[4].

     Malheureusement, souvent ce n’est pas ce qui arrive, parce que le nombre des familles divisées et déchirées augmente, non seulement à cause de la conscience fragile du sens de l’appartenance qui caractérise le monde actuel, mais aussi à cause des conditions difficiles dans lesquelles beaucoup d’entre elles sont contraintes de vivre, au point de manquer des moyens-mêmes de subsistance. Par conséquent, des politiques appropriées qui soutiennent, favorisent et consolident la famille sont rendues nécessaires !

     Il arrive en outre que les personnes âgées soient considérées comme un poids, tandis que les jeunes ne voient pas devant eux des perspectives sûres pour leur vie. Les aînés et les jeunes sont au contraire l’espérance de l’humanité. Les premiers apportent la sagesse de l’expérience ; les seconds nous ouvrent à l’avenir, empêchant de nous refermer en nous-mêmes[5]. Il est sage de ne pas exclure les personnes âgées de la vie sociale pour maintenir vivante la mémoire d’un peuple. De même, il est bon d’investir sur les jeunes, avec des initiatives adéquates qui les aident à trouver du travail et à fonder un foyer domestique. Il ne faut pas éteindre leur enthousiasme ! Je garde vivante dans mon esprit l’expérience de la XXVIIIème Journée mondiale de la Jeunesse de Rio de Janeiro. Que de jeunes heureux j’ai pu rencontrer ! Que d’espérance et d’attente dans leurs yeux et dans leurs prières ! Que de soif de vie et de désir de s’ouvrir aux autres ! La fermeture et l’isolement créent toujours une atmosphère asphyxiante et lourde, qui tôt ou tard finit par attrister et étouffer. Par contre, un engagement commun de tous est utile pour favoriser une culture de la rencontre, parce que seul celui qui est en mesure d’aller vers les autres est capable de porter du fruit, de créer la communion, d’irradier la joie, de construire la paix.

       La paix, de plus, est blessée par certaines négations de la dignité humaine, en premier lieu par l’impossibilité de se nourrir de manière suffisante. Les visages de tant de personnes qui souffrent de la faim, surtout des enfants, ne peuvent nous laisser indifférents, si l’on pense à tant de nourriture gaspillée chaque jour en de nombreux endroits dans le monde, immergés dans ce que j’ai plusieurs fois défini comme « la culture du déchet ». Malheureusement, ce ne sont pas seulement la nourriture ou les biens superflus qui sont objet de déchet, mais souvent les êtres humains eux-mêmes, qui sont « jetés » comme s’ils étaient des « choses non nécessaires ». Par exemple, la seule pensée que des enfants ne pourront jamais voir la lumière, victimes de l’avortement, nous fait horreur ; ou encore ceux qui sont utilisés comme soldats, violentés ou tués dans les conflits armés, ou ceux qui sont objets de marché dans cette terrible forme d’esclavage moderne qu’est la traite des êtres humains, qui est un crime contre l’humanité.

 

 

 

 

 

30 janvier 2014, aux Evêques d’Autriche en Visite Ad Limina

     La famille se situe au cœur de l’Église évangélisatrice. « La famille chrétienne, en effet, est la première communauté appelée à annoncer l’Évangile à la personne humaine en développement et à conduire cette dernière, par une éducation et une catéchèse progressives, à sa pleine maturité humaine et chrétienne » (Familiaris consortio, n. 2). Le fondement sur lequel peut se développer une vie familiale harmonieuse, est surtout la fidélité matrimoniale. Malheureusement, à notre époque, nous voyons que la famille et le mariage, dans les pays du monde occidental, subissent une crise intérieure profonde. « Dans le cas de la famille, la fragilité des liens devient particulièrement grave parce qu’il s’agit de la cellule fondamentale de la société, du lieu où l’on apprend à vivre ensemble dans la différence et à appartenir aux autres et où les parents transmettent la foi aux enfants » (Evangelii gaudium, n. 66). La mondialisation et l’individualisme post-moderne favorisent un style de vie qui rend beaucoup plus difficile le développement et la stabilité des liens entre les personnes et ne favorise pas la promotion d’une culture de la famille. Un nouveau domaine missionnaire s’ouvre ici à l’Église, par exemple dans les groupes de familles dans lesquels un espace est créé pour les relations interpersonnelles et avec Dieu, où peut grandir une communion authentique qui accueille chacun de la même façon et qui ne se renferme pas dans des groupes élitistes, qui soigne les blessures, construit des ponts, part à la recherche de ceux qui sont éloignés et aide à « porter les fardeaux les uns des autres » (Ga 6, 2).

     La famille est donc un lieu privilégié pour l’évangélisation et pour la transmission vitale de la foi. Faisons tout notre possible pour que l’on prie dans nos familles et que la foi y soit expérimentée et transmise comme partie intégrante de la vie quotidienne. La sollicitude de l’Église pour la famille commence par une bonne préparation et un accompagnement adapté des époux, ainsi que par l’exposition fidèle et claire de la doctrine de l’Église sur le mariage et la famille. Le mariage comme sacrement est un don de Dieu et, en même temps, un engagement. L’amour de deux époux est sanctifié par le Christ et les époux sont appelés à témoigner et à cultiver cette sainteté à travers leur fidélité l’un envers l’autre.

 

 

 

7 février 2014, aux Evêques de Pologne en Visite Ad Limina

     Dans la mesure où l’on observe aussi un certain fléchissement de la vie chrétienne, sous divers aspects, un discernement est nécessaire, ainsi qu’une recherche des motifs et des moyens d’aborder les nouveaux défis comme, par exemple, l’idée d’une liberté sans limites, une tolérance hostile ou méfiante vis-à-vis de la vérité, ou encore un ressentiment envers la juste opposition de l’Église au relativisme dominant. Avant tout, dans le cadre de la pastorale ordinaire, je voudrais centrer votre attention sur la famille, « cellule de base de la société », « lieu où l’on apprend à vivre ensemble dans la différence et à appartenir à d’autres, et où les parents transmettent la foi à leurs enfants » (Exhort. apost. Evangelii gaudium, 66).

     Mais aujourd’hui, le mariage est souvent considéré comme une forme de gratification affective qui peut s’exprimer de n’importe quelle façon et être modifiée selon la sensibilité de chacun (cf. ibid.). Malheureusement, cette vision a une influence sur la mentalité des chrétiens, facilitant le recours au divorce ou à la séparation de fait. Les pasteurs sont appelés à se demander comment aider ceux qui vivent dans cette situation, afin qu’ils ne se sentent pas exclus de la miséricorde de Dieu, de l’amour fraternel d’autres chrétiens et de la sollicitude de l’Église pour leur salut ; ils doivent aussi chercher comment les aider à ne pas abandonner la foi et à élever leurs enfants dans la plénitude de l’expérience chrétienne.

     D’autre part, il faut se demander comment améliorer la préparation des jeunes au mariage, de sorte qu’ils puissent découvrir de plus en plus la beauté de cette union qui, bien fondée sur l’amour et sur la responsabilité, est en mesure de dépasser les épreuves, les difficultés et les égoïsmes par le pardon mutuel, en réparant ce qui risque d’être ruiné et sans tomber dans le piège de la mentalité du rejet. Il faut s’interroger sur la manière d’aider les familles à vivre et à apprécier les moments de joies comme les moments de souffrance et de faiblesse. Que les communautés ecclésiales soient des lieux d’écoute, de dialogue, de réconfort et de soutien pour les époux, dans leur chemin conjugal et dans leur mission d’éducation. Qu’ils trouvent toujours dans les pasteurs le soutien de pères et de guides spirituels authentiques qui les protègent des menaces des idéologies négatives et les aident à devenir forts en Dieu et dans son amour.

2 février 2014 – Lettre aux familles

    Chères familles,

     Je me présente au seuil de votre maison pour vous parler d’un évènement qui, comme cela est connu, se déroulera au mois d’octobre prochain au Vatican. Il s’agit de l’Assemblée générale extraordinaire du Synode des Évêques convoquée pour discuter sur le thème « Les défis pastoraux de la famille dans le contexte de l’évangélisation ». Aujourd’hui, en effet, l’Église est appelée à annoncer l’Évangile en affrontant aussi les nouvelles urgences pastorales qui concernent la famille.

     Ce rendez-vous important implique le Peuple de Dieu tout entier, évêques, prêtres, personnes consacrées et fidèles laïcs des Églises particulières du monde entier, qui participent activement à sa préparation par des suggestions concrètes et par l’apport indispensable de la prière. Le soutien de la prière est plus que jamais nécessaire et significatif spécialement de votre part, chères familles. En effet, cette Assemblée synodale vous est consacrée d’une façon particulière, à votre vocation et à votre mission dans l’Église et dans la société, aux problèmes du mariage, de la vie familiale, de l’éducation des enfants, et au rôle des familles dans la mission de l’Église. Par conséquent, je vous demande de prier intensément l’Esprit Saint, afin qu’il éclaire les Pères synodaux et qu’il les guide dans leur tâche exigeante. Comme vous le savez, cette Assemblée synodale extraordinaire sera suivie, l’année suivante, de l’Assemblée ordinaire qui portera sur le même thème de la famille. Et, dans ce contexte, en septembre 2015 se tiendra aussi la Rencontre mondiale des Familles à Philadelphie. Prions donc tous ensemble pour que, à travers ces évènements, l’Église accomplisse un véritable chemin de discernement et qu’elle prenne les moyens pastoraux adaptés pour aider les familles à affronter les défis actuels avec la lumière et la force qui viennent de l’Évangile.

      Je vous écris cette lettre le jour où se célèbre la fête de la Présentation de Jésus au temple. L’évangéliste Luc raconte que la Vierge Marie et saint Joseph, selon la Loi de Moïse, portèrent l’Enfant au temple pour l’offrir au Seigneur, et que deux personnes âgées, Siméon et Anne, mues par l’Esprit Saint, allèrent à leur rencontre et reconnurent en Jésus le Messie (cf. Lc 2, 22-38). Siméon le prit dans ses bras et rendit grâce à Dieu parce que finalement il avait « vu » le salut ; Anne, malgré son âge avancé, trouva une vigueur nouvelle et se mit à parler de l’Enfant à tous. C’est une belle image : deux jeunes parents et deux personnes âgées, rassemblées par Jésus. Vraiment, Jésus fait se rencontrer et unit les générations ! Il est la source inépuisable de cet amour qui vainc toute fermeture, toute solitude, toute tristesse. Dans votre cheminement familial, vous partagez beaucoup de beaux moments : les repas, le repos, le travail à la maison, les loisirs, la prière, les voyages et les pèlerinages, les actions de solidarité… Toutefois, s’il manque l’amour, il manque la joie, et l’amour authentique c’est Jésus qui nous le donne : il nous offre sa Parole, qui éclaire notre route ; il nous donne le Pain de vie, qui soutient la fatigue quotidienne de notre chemin.

     Chères familles, votre prière pour le Synode des Évêques sera un précieux trésor qui enrichira l’Église. Je vous remercie, et je vous demande de prier aussi pour moi, pour que je puisse servir le Peuple de Dieu dans la vérité et dans la charité. Que la protection de la Bienheureuse Vierge Marie et de saint Joseph vous accompagne tous toujours et vous aide à marcher, unis dans l’amour et dans le service réciproque. De grand cœur j’invoque sur chaque famille la bénédiction du Seigneur.

 

 

14 février 2014, aux Evêques de Tchéquie en Visite Ad Limina

      Que votre attention soit tournée aussi vers la pastorale familiale : la famille est l'élément porteur de la vie sociale et c'est seulement en travaillant en faveur des familles qu'on peut renouveler le tissu de la communauté ecclésiale et la société civile elle-même.

      Comment ne pas voir l'importance de la présence des catholiques dans la vie publique, comme aussi dans les moyens de communication ? Il dépend aussi d'eux de faire en sorte qu’on puisse percevoir l'Eglise comme l'alliée de l'homme, au service de sa dignité.

 

 

 

20 février 2014 – Aux cardinaux réunis pour le Consistoire Extraordinaire

     Durant ces jours, nous réfléchirons en particulier sur la famille, qui est la cellule fondamentale de la société humaine. Depuis le début, le Créateur a placé sa bénédiction sur l’homme et sur la femme afin qu’ils soient féconds et qu’ils se multiplient sur la terre ; et ainsi la famille représente dans le monde comme le reflet de Dieu, Un et Trine.

     Notre réflexion se souviendra toujours de la beauté de la famille et du mariage, de la grandeur de cette réalité humaine à la fois si simple et si riche, faite de joies et d’espérances, de peines et de souffrances, comme toute la vie. Nous chercherons à approfondir la théologie de la famille et la pastorale que nous devons mettre en œuvre dans les conditions actuelles. Faisons-le en profondeur et sans tomber dans la “casuistique”, parce qu’elle ferait inévitablement abaisser le niveau de notre travail. La famille aujourd’hui est dépréciée, elle est maltraitée, et ce qui nous est demandé, c’est de reconnaître combien il est beau, vrai et bon de former une famille, d’être une famille aujourd’hui ; combien c’est indispensable pour la vie du monde, pour l’avenir de l’humanité. Il nous est demandé de mettre en évidence le lumineux plan de Dieu sur la famille et d’aider les conjoints à le vivre avec joie dans leur existence, en les accompagnant dans beaucoup de difficultés, avec une pastorale intelligente, courageuse et pleine d’amour.

 

 

 

 

 

3 avril 2014, aux Evêques du Rwanda en Visite Ad Limina

             L’éducation de la jeunesse est la clé de l’avenir dans un pays où la population se renouvelle rapidement. « Cette jeunesse est un don et un trésor de Dieu dont toute l’Église est reconnaissante au Maître de la vie. Il faut aimer cette jeunesse, l’estimer et la respecter » (Africae munus, n. 60). Aussi est-il du devoir de l’Église de former les enfants et les jeunes aux valeurs évangéliques qu’ils trouveront en particulier dans la familiarité avec la Parole de Dieu, qui sera alors pour eux comme une boussole leur indiquant la route à suivre. Qu’ils apprennent à être des membres actifs et généreux de la société, car c’est sur eux que repose son avenir. Pour cela il convient de renforcer la pastorale à l’Université et dans les écoles, catholiques et publiques, en cherchant toujours à relier la mission éducative et l’annonce explicite de l’Evangile, qui ne doivent pas être séparées (cf. Evangelii gaudium, nn. 132,134).

     Une vigilance toute particulière doit être portée aux familles, qui sont les cellules vitales de la société et de l’Église, alors qu’elles se trouvent aujourd’hui très menacées par le processus de sécularisation et que, dans votre pays, tant de familles ont été déchirées et recomposées. Elles ont besoin de votre sollicitude, de votre proximité et de vos encouragements. C’est d’abord au sein même des familles que les jeunes peuvent expérimenter les valeurs authentiquement chrétiennes d’intégrité, de fidélité, d’honnêteté, de don de soi qui permettent de connaître le vrai bonheur selon le cœur de Dieu.

 

 

 

7 avril 2014, aux Evêques de Tanzanie en Visite Ad Limina

    Je pense ici en particulier au témoignage des disciples missionnaires (cf. Evangelii gaudium, nn. 119-120) apporté par les agents de l’apostolat de la santé, au sein de l’Église, en particulier ceux qui prennent soin des personnes atteintes du vih/sida et par tous ceux qui s’efforcent avec constance d’éduquer les personnes à la responsabilité sexuelle et à la chasteté. Je pense aussi à toutes les personnes qui se consacrent au développement intégral des pauvres, particulièrement des femmes et des enfants démunis. Que l’Esprit Saint, qui a donné force, sagesse et sainteté aux premiers missionnaires de Tanzanie, continue d’inspirer toute l’Église locale dans son témoignage vital.

     L’œuvre d’évangélisation commence dans les maisons. En Afrique, le don que représentent les familles intègres est ressenti avec une vitalité particulière. En outre, l’amour de l’Église pour la famille, et sa sollicitude pastorale à son égard, sont au cœur de la nouvelle évangélisation. Comme vous le savez, j’ai convoqué pour la fin de cette année un synode consacré à la famille, dont le soin pastoral a été une préoccupation centrale de la deuxième assemblée spéciale pour l’Afrique du synode des évêques de 2009. Puisse notre rencontre d’aujourd’hui représenter un encouragement à examiner votre réponse commune à l’appel du synode en vue d’un apostolat plus énergique de la famille, à travers une assistance spirituelle et matérielle sans compromis et généreuse (cf. Africae munus, n. 43). En promouvant la prière, la fidélité conjugale, la monogamie, la pureté et l’humble service réciproque au sein des familles, l’Église continue d’apporter une contribution inestimable au bien-être social de la Tanzanie, qui, avec les apostolats dans les domaines de l’éducation et de la santé, favorisera certainement davantage de stabilité et de progrès dans votre pays. L’Église ne peut offrir de meilleur service que d’apporter le témoignage de notre conviction de la sainteté du don divin de la vie et du rôle fondamental accompli par les familles spirituelles et stables pour préparer les plus jeunes générations à vivre une vie vertueuse et à affronter les défis de l’avenir avec sagesse, courage et générosité.

 

 

11 avril 2014 – Au membres du mouvement Pro Vita italien

     Nous le savons, la vie humaine est sacrée et inviolable. Tout droit civil repose sur la reconnaissance du premier droit fondamental, le droit à la vie, qui n’est subordonné à aucune condition, ni qualitative ni économique, et encore moins idéologique. « De même que le commandement de “ne pas tuer” pose une limite claire pour assurer la valeur de la vie humaine, aujourd’hui, nous devons dire “non à une économie de l’exclusion et de la disparité sociale”. Une telle économie tue... On considère l’être humain en lui-même comme un bien de consommation, qu’on peut utiliser et ensuite jeter. Nous avons mis en route la culture du “déchet” qui est même promue» (Exhort. apost. Evangelii gaudium, n. 53). Et ainsi, la vie elle aussi est mise au rebut.

     Un des risques les plus graves auxquels notre époque est exposée, est le divorce entre l’économie et la morale, entre les possibilités offertes par un marché pourvu de toutes les nouveautés technologiques et les normes éthiques élémentaires de la nature humaine, toujours plus négligées. Il faut donc réaffirmer la plus ferme opposition à tout attentat dirigé contre la vie, en particulier innocente et sans défense, et l’enfant à naître dans le sein de sa mère est l’innocent par antonomase. Rappelons les paroles du Concile Vaticanii : « La vie doit donc être sauvegardée avec un soin extrême dès la conception : l’avortement et l’infanticide sont des crimes abominables » (Const. Gaudium et spes, n. 51). Je me souviens d’une fois, il y a très longtemps, à l’occasion d’une conférence avec des médecins. Après la conférence, j’ai salué les médecins — cela a eu lieu il y a très longtemps. Je saluais les médecins, je parlais avec eux, et l’un d’eux m’a pris à part. Il tenait un paquet et il m’a dit : « Père, je veux vous laisser cela. Ce sont les instruments que j’ai utilisés pour faire avorter. J’ai rencontré le Seigneur, je me suis repenti, et à présent je lutte pour la vie ». Il m’a remis tous ses instruments. Priez pour ce brave homme !

     Le témoignage évangélique suivant revient toujours à celui qui est chrétien : Protéger la vie avec courage et amour à toutes ses phases. Je vous encourage à toujours le faire selon le style de la présence, de la proximité : que chaque femme se sente considérée comme une personne, écoutée, accueillie, accompagnée.

     Nous avons parlé des enfants : il y en a beaucoup ! Mais je voudrais également parler des grands-parents, l’autre côté de la vie ! Car nous devons également avoir soin des grands-parents, parce que les enfants et les grands-parents sont l’espérance d’un peuple. Les enfants, les jeunes parce qu’ils le conduiront de l’avant, ils conduiront ce peuple de l’avant ; et les grands-parents parce qu’ils possèdent la sagesse de l’histoire, ils sont la mémoire d’un peuple. Conserver la vie à une époque où les enfants et les grands-parents entrent dans cette culture du déchet et sont considérés comme du matériel jetable. Non ! Les enfants et les grands-parents sont l’espérance d’un peuple !

 

 

 

 

 

 

3 septembre 2014 – Au terme de l’Audience Générale

     Il en faut du courage pour se marier aujourd'hui !  Vous êtes courageux, je vous le dis, parce qu'il faut avoir du courage pour se marier aujourd'hui.

 

 

 

 

1er Novembre 2014 – Homélie de la Messe au cimetière Verano, de Rome

     Lorsque dans la première lecture, nous avons entendu cette voix de l’ange qui cria à grande voix aux quatre anges auxquels il avait été permis de dévaster la terre et la mer et de tout détruire : « Attendez, pour malmener la terre et la mer et les arbres » (Ap 7, 3), il m’est venu à l’esprit une phrase qui n’est pas ici, mais qui est dans notre cœur à tous : « Les hommes sont capables de faire mieux que vous ». Nous sommes capables de dévaster la terre mieux que les anges. Et c’est ce que nous faisons, nous le faisons : dévaster la création, dévaster la vie, dévaster les cultures, dévaster les valeurs, dévaster l’espérance. Et combien avons-nous besoin de la force du Seigneur afin qu’il nous scelle de son amour et de sa force, pour arrêter cette folle course à la destruction ! Destruction de ce qu’Il nous a donné, des choses les plus belles qu’Il a faites pour nous, pour que nous les portions de l’avant, pour que nous les fassions croître, pour porter du fruit. Lorsque, dans la sacristie, je regardais les photos d’il y a 71 ans [le bombardement du Verano a eu lieu le 19 juillet 1943], j’ai pensé : « Cela a été si grave, si douloureux. Cela n’est rien en comparaison de ce qui a lieu aujourd’hui ». L’homme s’empare de tout, se prend pour Dieu, pour le roi. Et les guerres : les guerres qui continuent, pas précisément à semer le blé de la vie, mais à détruire. C’est l’industrie de la destruction. C’est un système, même de vie, qui fait que lorsque l’on n’arrive pas à arranger les choses, on les met au rebut : on met au rebut les enfants, on met au rebut les personnes âgées, on met au rebut les jeunes sans travail. Cette dévastation a produit cette culture du rebut : on met au rebut les peuples... C’est la première image qui m’est venue, lorsque j’ai entendu cette Lecture.

    La deuxième image, dans la même lecture : cette « foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, de toute nation, race, peuple et langue » (7, 9). Les peuples, les gens... À présent commence le froid : ces pauvres gens qui, pour sauver leur vie, doivent fuir leur maison, leurs peuples, leurs villages, dans le désert... et vivent sous des tentes, souffrent du froid, sans médicaments, affamés, parce que le « dieu-homme » s’est emparé de la création, de tout cette beauté que Dieu a faite pour nous. Mais qui paie la fête ? Eux ! Les petits, les pauvres, ceux qui, en tant que personnes, ont fini au rebut. Et cela n’est pas de l’histoire ancienne : cela a lieu aujourd’hui. « Mais, Père, c’est loin... ». Ici aussi, partout. Cela arrive aujourd’hui Je dirais même plus : il semble que ces gens, ces enfants affamés, malades, il semble qu’ils ne comptent pas, qu’ils soient d’une autre espèce, qu’ils ne soient pas humains. Et cette multitude est devant Dieu et demande : « S’il vous plaît, donnez-nous le salut ! S’il vous plaît, donnez-nous la paix ! S’il vous plaît, donnez-nous du pain ! S’il vous plaît, donnez-nous du travail ! S’il vous plaît, donnez-nous des fils et des grands-parents ! S’il vous plaît, donnez-nous des jeunes avec la dignité de pouvoir travailler ! ». Parmi ces persécutés, il y a également ceux qui sont persécutés à cause de la foi. « L’un des vieillards prit alors la parole et me dit : “Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d’où viennent-ils ?”... “Ce sont ceux qui viennent de la grande épreuve : ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l'Agneau” » (7, 13-14). Et aujourd’hui, sans exagérer, aujourd’hui, le jour de la Toussaint, je voudrais que l’on pense à eux tous, les saints inconnus. Des pécheurs comme nous, pires que nous, mais détruits. À tous ces gens qui vivent des grandes épreuves. La plupart du monde vit de grandes épreuves. Et le Seigneur sanctifie ce peuple, pécheur comme nous, mais il le sanctifie par les épreuves.

     Et à la fin, la troisième image : Dieu. La première : la dévastatation ; la deuxième, les victimes ; la troisième, Dieu. Dans la deuxième lecture, nous avons entendu : « Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, et ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. Nous savons que lors de cette manifestation nous lui serons semblables, parce que nous le verrons tel qu'il est » (1 Jn 3, 2): c’est-à-dire l’espérance. Et c’est la bénédiction du Seigneur que nous avons encore: l’espérance. L’espérance qu’il ait pitié de son peuple, qu’il ait pitié de ceux qui vivent de grandes épreuves, qu’il ait pitié également des destructeurs, afin qu’ils se convertissent. Ainsi, la sainteté de l’Église va de l’avant : avec ces gens, avec nous qui verrons Dieu tel qu’il est. Quelle doit être notre attitude si nous voulons entrer dans ce peuple et marcher vers le Père, dans ce monde de dévastation, dans ce monde de guerres, dans ce monde d’épreuves ? Notre attitude, nous l’avons écouté dans l’Évangile, est l’attitude des Béatitudes. Seul ce chemin nous conduira à la rencontre avec Dieu. Seul ce chemin nous sauvera de la destruction, de la dévastation de la terre, de la Création, de la morale, de l’histoire, de la famille, de tout. Seul ce chemin: mais il nous fera passer des choses terribles ! Il nous apportera des problèmes, la persécution. Mais seul ce chemin nous mènera de l’avant. Et ainsi, ce peuple qui souffre tant aujourd’hui à cause de l’égoïsme des dévastateurs, de nos frères dévastateurs, ce peuple va de l’avant avec les Béatitudes, avec l’espérance de trouver Dieu, d’être face à face avec le Seigneur, avec l’espérance de devenir saints, au moment de la rencontre définitive avec Lui.

     Que le Seigneur nous aide et nous donne la grâce de cette espérance, mais également la grâce du courage de sortir de tout ce qui est destruction, dévastation, relativisme de vie, exclusion des autres, exclusion des valeurs, exclusion de tout ce que le Seigneur nous a donné: exclusion de la paix. Qu’il nous libère de cela et qu’il nous donne la grâce de marcher avec l’espérance de nous retrouver un jour face à face avec Lui. Et cette espérance, frères et sœurs, ne déçoit pas !

 

 

 

 

 

 

28 décembre 2014 -  Rencontre avec l’association italienne des familles nombreuses

     Je suis heureux de vous rencontrer à l’occasion du dixième anniversaire de l’association qui réunit en Italie les familles nombreuses. On voit que vous aimez la famille et que vous aimez la vie ! Et il est beau de rendre grâce au Seigneur pour cela le jour où nous célébrons la Sainte-Famille.

     L’Évangile d’aujourd’hui nous montre Marie et Joseph qui emmènent l’enfant Jésus au temple, et là, ils rencontrent deux vieillards, Syméon et Anne, qui font des prophéties sur l’Enfant. C’est l’image d’une famille « nombreuse », un peu comme le sont vos familles, où les diverses générations se rencontrent et s’aident.

     Vous êtes venus avec les fruits les plus beaux de votre amour. Maternité et paternité sont un don de Dieu, mais accueillir le don, s’émerveiller de sa beauté et le faire resplendir dans la société, cela est votre devoir. Chacun de vos enfants est une créature unique qui ne se répétera jamais plus dans l’histoire de l’humanité. Lorsque l’on comprend cela, c’est-à-dire que chacun a été voulu par Dieu, on est émerveillé du grand miracle que représente un enfant ! Un enfant change la vie ! Nous avons tous vu — hommes et femmes — que lorsqu’un enfant arrive, la vie change, c’est autre chose. Un enfant est un miracle qui change une vie. Vous, petits garçons et petites filles, êtes précisément cela : chacun de vous est le fruit unique de l’amour, vous venez de l’amour et vous grandissez dans l’amour. Vous êtes uniques, mais pas seuls ! Et le fait d’avoir des frères et sœurs vous fait du bien: les fils et les filles d’une famille nombreuse sont davantage capables de communion fraternelle dès leur tendre enfance. Dans un monde souvent marqué par l’égoïsme, la famille nombreuse est une école de solidarité et de partage ; et ces manières d’être bénéficient par la suite à toute la société.

     Vous, enfants et jeunes, êtes les fruits de l’arbre qu’est la famille : vous êtes de bons fruits lorsque l’arbre a de bonnes racines — qui sont les grands-parents — et un bon tronc — qui sont les parents. Jésus disait que tout bon arbre produit de bons fruits, tandis que l’arbre gâté produit de mauvais fruits (cf. Mt 7, 17). La grande famille humaine est comme une forêt, où les bons arbres apportent solidarité, communion, confiance, soutien, sécurité, juste sobriété, amitié. La présence des familles nombreuses est une espérance pour la société. Et pour cela, la présence des grands-parents est très importante : une présence précieuse, tant pour leur aide pratique que, surtout, pour leur contribution éducative. Les grands-parents conservent en eux les valeurs d’un peuple, d’une famille, et aident les parents à les transmettre aux enfants. Au cours du siècle dernier, dans de nombreux pays d’Europe, ce sont les grands-parents qui ont transmis la foi: ils emmenaient l’enfant en cachette recevoir le baptême et lui transmettaient la foi.

     Chers parents, je vous suis reconnaissant pour l’exemple d’amour de la vie, que vous protégez de la conception à la mort naturelle, en dépit de toutes les difficultés et des fardeaux de la vie, et que malheureusement, les institutions publiques ne vous aident pas toujours à porter. Vous rappelez à juste titre que l’article 31 de la Constitution italienne demande une considération particulière pour les familles nombreuses: mais cela ne se traduit pas de façon adéquate dans les faits. Cela demeure à l’état de paroles. Je souhaite donc, notamment en pensant à la faible natalité que l’on enregistre depuis longtemps en Italie, une plus grande attention de la politique et des administrateurs publics, à tous les niveaux, afin d’apporter le soutien prévu à ces familles. Chaque famille est une cellule de la société, mais la famille nombreuse est une cellule plus riche, plus vitale, et l’État a tout intérêt à investir sur elle !

     C’est pourquoi il faut saluer les familles réunies en association — comme la vôtre italienne, ainsi que celles d’autres pays européens, ici représentées — ; et il faut saluer un réseau d’associations familiales capables d’être présentes et visibles dans la société et dans la politique. Saint Jean-Paul ii écrivait à ce propos : « Il faut à cet égard que les familles aient une conscience toujours plus vive d’être les “protagonistes” de ce qu’on appelle “la politique familiale” et qu’elles assument la responsabilité de transformer la société ; dans le cas contraire, elles seront les premières victimes des maux qu’elles se sont contentées de constater avec indifférence » (Exhort. apost. Familiaris consortio, n. 44). L’engagement que les associations familiales accomplissent dans les divers « Forum », nationaux et locaux, est précisément celui de promouvoir dans la société et dans les lois de l’État les valeurs et les nécessités de la famille.

     Il faut saluer également les mouvements ecclésiaux, dans lesquels vous, membres de familles nombreuses, êtes particulièrement présents et actifs. Je rends toujours grâce au Seigneur de voir des pères et des mères de familles nombreuses, avec leurs enfants, engagés dans la vie de l’Église et de la société. Pour ma part, je suis proche de vous dans la prière, et je vous place sous la protection de la Sainte-Famille de Jésus, Joseph et Marie. Et une bonne nouvelle est qu’à Nazareth précisément est en cours de réalisation une maison pour les familles du monde qui se rendent en pèlerinage là où Jésus a grandi en âge, en sagesse et en grâce (cf. Lc 2, 40).

Je prie en particulier pour les familles les plus éprouvées par la crise économique, celles où le père ou la mère ont perdu leur travail — et cela est dur —, où les jeunes n’arrivent pas à en trouver ; les familles éprouvées dans leurs liens d’affection les plus chers et celles tentées de s’abandonner à la solitude et à la division.

     Chers amis, chers parents, chers jeunes, chers enfants, chers grands-parents, bonne fête à vous tous ! Que chacune de vos familles soit toujours riche de la tendresse et du réconfort de Dieu. Je vous bénis avec affection.

 

 

 

publié le : 27 février 2014

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