Benoît XVI de A à Z

Evangelium Vitae 2010

10 janvier 2010 – Méditation lors de la prière de l’Angelus

      Avec le sacrement du Baptême, l'homme devient réellement fils, fils de Dieu. À partir de ce moment, le but de son existence consiste à atteindre de façon libre et consciente, ce qui était et est le destin de l'homme. "Deviens ce que tu es" représente le principe éducatif de base de la personne humaine sauvée par la grâce. Ce principe a de nombreuses analogies avec la croissance humaine, dans laquelle la relation parents-enfants passe à travers des détachements et des crises, de la dépendance totale à la conscience d'être fils, à la reconnaissance pour le don de la vie reçue et à la maturité et la capacité de donner la vie. Engendré par le baptême à une vie nouvelle, le chrétien aussi entame son chemin de croissance dans la foi qui le conduira à invoquer consciemment Dieu comme "Abba - Père", à s'adresser à Lui avec reconnaissance et vivre la joie d'être son fils.

     Du baptême dérive aussi un modèle de société : celle des frères. On ne peut pas établir la fraternité avec une idéologie, encore moins avec un décret d'un quelconque pouvoir constitué. On se reconnaît frères à partir de la conscience humble mais profonde d'être enfants de l'unique Père céleste. En tant que chrétiens, grâce à l'Esprit Saint reçu dans le baptême, nous reviennent le don et l'engagement de vivre en fils de Dieu et en frères, pour être comme le "levain" d'une humanité nouvelle, solidaire et riche de paix et d'espérance. La conscience d'avoir non seulement un Père dans les cieux, mais aussi une mère, l'Église, dont la Vierge Marie est l'éternel modèle, nous aide en cela. Nous lui confions les enfants qui viennent d'être baptisés, ainsi que leurs familles, et nous demandons pour tous la joie de renaître chaque jour "d'en haut", de l'amour de Dieu, qui fait de nous ses enfants et entre nous des frères.

 

 

 

11 février 2010 – Message pour la Journée Mondiale du Malade

      Jésus dit: « Va, et toi aussi fais de même » (Lc 10, 37). Avec ces paroles, il s'adresse aussi à nous. Il nous exhorte à nous pencher sur les blessures du corps et de l'esprit de tant de nos frères et s½urs que nous rencontrons sur les routes du monde; il nous aide à comprendre que, par la grâce de Dieu accueillie et vécue dans la vie de chaque jour, l'expérience de la maladie et de la souffrance peut devenir une école d'espérance. En vérité, comme je l'ai affirmé dans l'encyclique Spe salvi, « ce n'est pas le fait d'esquiver la souffrance, de fuir devant la douleur, qui guérit l'homme, mais la capacité d'accepter les tribulations et de mûrir par elles, d'y trouver un sens par l'union au Christ, qui a souffert avec un amour infini » (n. 37).

     Je tiens à ajouter que, en ce moment historique et culturel actuel, on ressent encore plus l'exigence d'une présence ecclésiale attentive et étendue auprès des malades, ainsi qu'une présence dans la société qui soit capable de transmettre de façon efficace les valeurs évangéliques pour protéger la vie humaine à toutes ses étapes, de sa conception à sa fin naturelle.

 

11 février 2010 – Homélie de la Messe pour les malades

     Le récit évangélique de la Visitation (cf. Lc 1, 39-56) nous montre que la Vierge, après l'annonce de l'Ange, ne garda pas pour elle le don reçu, mais partit immédiatement pour aller aider sa cousine âgée Elisabeth, qui portait depuis six mois Jean en son sein. Dans le soutien apporté par Marie à cette parente qui vit, à un âge déjà avancé, une situation délicate comme celle de la grossesse, nous voyons préfigurée toute l'action de l'Eglise en faveur de la vie qui a besoin de soins.

     Ceux qui passent beaucoup de temps aux côtés des personnes souffrantes, connaissent l'angoisse et les larmes, mais également le miracle de la joie, fruit de l'amour.

 

    Lorsque la Parole de Dieu parle de guérison, de salut, de santé du malade, elle conçoit ces concepts de façon intégrale en ne séparant jamais l'âme du corps:  un malade guéri par la prière du Christ, à travers l'Eglise, est une joie sur la terre et au ciel, les prémisses de vie éternelle.

 

 

 

 

13 février 2010 – A l’Académie Pontificale pour la Vie

     Les problématiques qui tournent autour du thème de la bioéthique permettent de vérifier à quel point les questions sous-jacentes mettent au premier plan la question anthropologique. Comme je l'affirme dans ma dernière lettre encyclique, Caritas in veritate: « Un domaine primordial et crucial de l'affrontement culturel entre la technique considérée comme un absolu et la responsabilité morale de l'homme est aujourd'hui celui de la bioéthique, où se joue de manière radicale la possibilité même d'un développement humain intégral. Il s'agit d'un domaine particulièrement délicat et décisif, où émerge avec une force dramatique la question fondamentale de savoir si l'homme s'est produit lui-même ou s'il dépend de Dieu. Les découvertes scientifiques en ce domaine et les possibilités d'intervention technique semblent tellement avancées qu'elles imposent de choisir entre deux types de rationalité, celle de la raison ouverte à la transcendance et celle d'une raison close dans l'immanence technologique » (n. 74). Face à de telles questions, qui touchent de façon si décisive la vie humaine dans sa tension permanente entre immanence et transcendance, et qui ont une grande importance pour la culture des générations à venir, il est nécessaire de mettre en ½uvre un projet pédagogique intégral, qui permette d'affronter de telles thématiques dans une vision positive, équilibrée et constructive, surtout dans le rapport entre la foi et la raison.

     Les questions de bioéthique mettent souvent au premier plan le rappel de la dignité de la personne, un principe fondamental que la foi en Jésus Christ crucifié et ressuscité a toujours défendu, surtout lorsqu'il est négligé quand il s'agit de sujets plus simples et sans défense: Dieu aime chaque être humain de façon unique et profonde. Comme toute discipline, la bioéthique aussi a besoin d'un rappel capable de garantir une lecture cohérente des questions éthiques, qui, inévitablement, sont soulevées par les conflits d'interprétation possibles. C'est dans cet espace que s'ouvre le rappel normatif à la loi morale naturelle. La reconnaissance de la dignité humaine, en effet, en tant que droit inaliénable, trouve son premier fondement dans cette loi – qui n'est pas écrite par la main de l'homme, mais est inscrite par le Dieu Créateur dans le c½ur de l'homme –, que toutes les législations sont appelées à reconnaître comme inviolable et que toute personne est tenue de respecter et de promouvoir (cf. Catéchisme de l'Eglise catholique, nn. 1954-1960). Sans le principe fondamental de la dignité humaine, il serait très difficile de trouver une source des droits de la personne, et impossible d'arriver à un jugement éthique face aux conquêtes de la science qui interviennent directement dans la vie humaine. Il est par conséquent nécessaire de répéter avec fermeté qu'il n'existe pas de compréhension de la dignité humaine liée seulement à des éléments extérieurs comme le progrès de la science, les étapes de la formation de la vie humaine, ou une piété facile devant des situations limites. Lorsque l'on invoque le respect de la dignité de la personne, il est fondamental qu'il soit complet, total, et sans contraintes, sauf celle de reconnaître que l'on se trouve toujours devant une vie humaine. Certes, la vie humaine connaît un développement propre, et l'horizon des recherches scientifiques et de la bioéthique est ouvert, mais il faut répéter que lorsqu'il s'agit de domaines relatifs à l'être humain, les scientifiques ne peuvent jamais penser qu'ils ont entre les mains seulement de la matière inanimée, et manipulable. En effet, dès le premier instant, la vie de l'homme est caractérisée par le fait d'être vie humaine, et pour cette raison, elle est toujours, partout et malgré tout, porteuse d'une dignité propre (cf. Congr. pour la doctrine de la foi, Instruction Dignitas personae sur certaines questions de bioéthique, n. 5). Sinon, nous nous trouverions toujours devant le danger d'une utilisation instrumentale de la science, avec cette inévitable conséquence de tomber facilement dans l'arbitraire, dans la discrimination, et dans l'intérêt économique du plus fort.

     Conjuguer bioéthique et loi morale naturelle permet de vérifier au mieux le rappel nécessaire et incontournable à la dignité que possède la vie humaine de façon intrinsèque, dès son premier instant jusqu'à sa fin naturelle. Au contraire, dans le contexte d'aujourd'hui, bien que le juste rappel des droits qui garantissent les droits de la personne émerge avec plus d'insistance, on remarque que de tels droits ne sont pas toujours reconnus à la vie humaine dans son développement naturel et au cours des étapes où elle est la plus faible. Une telle contradiction fait apparaître avec évidence l'engagement à assumer dans les différents milieux de la société et de la culture afin que la vie humaine soit toujours reconnue comme un sujet inaliénable de droit et jamais comme un objet soumis à l'arbitraire du plus fort. L'histoire a montré combien dangereux et délétère peut être un Etat qui légifère sur des questions qui touchent la personne et la société en prétendant être lui-même la source et le principe de l'éthique. Sans des principes universels qui permettent de vérifier un dénominateur commun pour toute l'humanité, le risque d'une dérive relativiste au niveau législatif ne doit absolument pas être sous-évalué (cf. Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1959). La loi morale naturelle, forte de son caractère universel, permet de conjurer ce danger et surtout elle offre au législateur la garantie d'un respect authentique de la personne et de tout l'ordre de la création. Elle se pose en force catalysante du consensus entre des personnes de cultures et de religions différentes et elle permet de dépasser les différences parce qu'elle affirme l'existence d'un ordre imprimé dans la nature par le Créateur et reconnu comme une instance de vrai jugement éthique rationnel pour chercher le bien et éviter le mal. La loi morale naturelle « appartient au grand patrimoine de la sagesse humaine que la Révélation, par sa lumière, a contribué à purifier et à développer davantage » (cf. Jean-Paul II, Discours à l'assemblée plénière de la Congrégation pour la doctrine de la foi, 6 février 2004).

     Illustres membres de l'Académie pontificale pour la vie, dans le contexte actuel, votre engagement apparaît toujours plus délicat et difficile, mais la sensibilité croissante à l'égard de la vie humaine encourage à poursuivre avec un élan toujours plus grand et avec courage cet important service de la vie et de l'éducation aux valeurs évangéliques des générations futures. Je vous souhaite à tous de poursuivre l'étude et la recherche afin que l'½uvre de promotion et de défense de la vie soit toujours plus efficace et féconde.

 

 

1er avril 2010 – Homélie de la Messe chrismale

    L’huile, sous ses différentes formes, nous accompagne tout au long de la vie: à commencer par le catéchuménat et le Baptême jusqu’au moment où nous nous préparons à la rencontre avec le Dieu Juge et Sauveur.

    Les chrétiens des premiers siècles aimaient orner les tombes de leurs défunts avec la couronne de la victoire et le rameau d’olivier, symbole de la paix. Ils savaient que le Christ a vaincu la mort et que leurs défunts reposaient dans la paix du Christ. Ils se savaient, eux-mêmes, attendus par le Christ qui leur avait promis la paix que le monde n’est pas en mesure de donner. Ils se rappelaient que la première parole du Ressuscité aux siens avait été: «La paix soit avec vous» (Jn 20,19)!

     Le fait que l’huile rende fort pour le combat appartient aussi à son symbolisme. Cela ne s’oppose pas au thème de la paix, mais en fait partie. Le combat des chrétiens consistait et consiste, non dans l’usage de la violence, mais dans le fait qu’ils étaient et sont toujours prêts à souffrir pour le bien, pour Dieu. Il consiste dans le fait que les chrétiens, en bons citoyens, respectent le droit et font ce qui est juste et bon. Il consiste dans le fait qu’ils refusent de faire ce qui, dans les dispositions juridiques en vigueur, n’est pas un droit, mais une injustice. Le combat des martyrs résidait dans leur ‘non’ concret à l’injustice: rejetant toute participation au culte idolâtre, à l’adoration de l’empereur, ils ont refusé de se plier au mensonge, à l’adoration de personnes humaines et de leur pouvoir. Avec leur ‘non’ au mensonge et à toutes ses conséquences, ils ont porté haut le pouvoir du droit et de la vérité. Ainsi, ils ont servi la véritable paix. Aujourd’hui encore, il est important pour les chrétiens de suivre le droit qui est le fondement de la paix. Aujourd’hui encore, il est important pour les chrétiens de ne pas accepter une injustice qui est élevée au rang de droit – par exemple, quand il s’agit du meurtre d’enfants innocents qui ne sont pas encore nés. C’est ainsi que nous servons la paix et c’est ainsi que nous nous mettons à suivre les traces de Jésus Christ dont saint Pierre dit: «Couvert d’insultes, il n’insultait pas; accablé de souffrances, il ne menaçait pas, mais il confiait sa cause à Celui qui juge avec justice. Dans son corps, il a porté nos péchés sur le bois de la croix, afin que nous puissions mourir à nos péchés et vivre dans la justice» (1 P 2, 23ss).

    

 

 

18 février 2010 – Rencontre avec les prêtres de Rome

     « Ayant présenté avec une violente clameur et des larmes, des implorations et des supplications » (He 5, 7). Il ne s'agit pas seulement d'une mention de l'heure de l'angoisse sur le Mont des Oliviers, mais c'est un résumé de toute l'histoire de la passion, qui embrasse toute la vie de Jésus. Des larmes: Jésus pleurait devant la tombe de Lazare, il était réellement touché intérieurement par le mystère de la mort, par la terreur de la mort. Des personnes perdent leur frère, comme dans ce cas, leur mère et leur fils, leur ami: tout l'aspect terrible de la mort, qui détruit l'amour, qui détruit les relations, qui est un signe de notre finitude, de notre pauvreté. Jésus est mis à l'épreuve et il se confronte jusqu'au plus profond de son âme avec ce mystère, avec cette tristesse qui est la mort, et il pleure. Il pleure devant Jérusalem, en voyant la destruction de cette belle cité à cause de la désobéissance; il pleure en voyant toutes les destructions de l'histoire dans le monde; il pleure en voyant que les hommes se détruisent eux-mêmes, ainsi que leurs villes dans la violence, dans la désobéissance.

      Jésus pleure, en poussant de grands cris. Les Evangiles nous disent que Jésus a crié de la Croix, il a crié: « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné? » (Mc 15, 34; cf. Mt 27, 46) et, à la fin, il a crié encore une fois. Et ce cri répond à une dimension fondamentale des Psaumes: dans les moments terribles de la vie humaine, de nombreux Psaumes constituent un cri puissant vers Dieu: « Aide-nous, écoute-nous! » Précisément aujourd'hui, dans le bréviaire, nous avons prié dans ce sens: Où es-tu Dieu? « Tu nous traites en bétail de boucherie » (Ps 44, 12). Un cri de l'humanité qui souffre! Et Jésus, qui est le véritable sujet des Psaumes, apporte réellement ce cri de l'humanité à Dieu, aux oreilles de Dieu: « Aide-nous et écoute-nous! ». Il transforme toute la souffrance humaine, en l'assumant en lui-même, en un cri aux oreilles de Dieu.

     L'auteur de la Lettre aux Hébreux dit que Jésus a prié, avec une violente clameur et des larmes, Dieu qui pouvait le sauver de la mort et qu'en raison de sa piété, il est exaucé (cf. 5, 7). Ici, nous voudrions dire: « Non, ce n'est pas vrai, il n'a pas été exaucé, il est mort ». Jésus a prié d'être libéré de la mort, mais il n'a pas été libéré, il est mort de manière très cruelle. C'est pourquoi le grand théologien libéral Harnack a dit: « Il manque ici une négation », il faut écrire: « Il n'a pas été exaucé » et Bultmann a accepté cette interprétation. Il s'agit toutefois d'une solution qui n'est pas une exégèse, mais une violence faite au texte. Dans aucun des manuscrits n'apparaît la négation, mais bien « il a été exaucé »; nous devons donc apprendre à comprendre ce que signifie cet « être exaucé », malgré la Croix.

     Je vois trois niveaux de compréhension de cette expression. A un premier niveau, on peut traduire le texte grec ainsi: « il a été racheté de son angoisse » et en ce sens Jésus est exaucé. Ce serait donc une allusion à ce que raconte saint Luc, qu'« un ange a réconforté Jésus » (cf. Lc 22, 43), de façon qu'après le moment de l'angoisse, il puisse aller droit et sans crainte vers son heure, comme nous le décrivent les Evangiles, en particulier celui de saint Jean. Il aurait été exaucé, au sens où Dieu lui donne la force de pouvoir porter tout ce poids et il est ainsi exaucé. Mais, pour ma part, il me semble que ce n'est pas une réponse tout à fait suffisante. Exaucé de manière plus profonde – le père Vanhoye l'a souligné – cela veut dire: « il a été racheté de la mort », mais pas en ce moment, pas à ce moment-là, mais pour toujours, dans la Résurrection: la vraie réponse de Dieu à la prière d'être racheté de la mort est la Résurrection et l'humanité est rachetée de la mort précisément dans la Résurrection, qui est la vraie guérison de nos souffrances, du mystère terrible de la mort.
Ici est déjà présent un troisième niveau de compréhension: la Résurrection de Jésus n'est pas seulement un événement personnel. Il semble qu'il peut être utile d'avoir à l'esprit le bref texte dans lequel saint Jean, dans le chapitre 12 de son Evangile, présente et raconte, de manière très synthétique, l'épisode du Mont des Oliviers. Jésus dit: « Mon âme est troublée » (Jn 12, 27), et, dans toute l'angoisse du Mont des Oliviers, que puis-je dire? « Père, sauve-moi de cette heure ou glorifie ton nom » (cf. Jn 12, 27-28). C'est la même prière que celle que nous trouvons dans les Synoptiques: « Si cela est possible, sauve-moi, mais que ta volonté sois faite » (cf. Mt 26, 42; Mc 14, 36; Lc 22, 42) qui, dans le langage johannique, apparaît justement sous la forme: « Père, sauve-moi, Père, glorifie ». Et Dieu répond: « Je t'ai glorifié et de nouveau je te glorifierai » (cf. Jn 12, 28). Telle est la réponse, le v½u exaucé par Dieu: je glorifierai la Croix; c'est la présence de la gloire divine, parce que c'est l'acte suprême de l'amour. Dans la Croix, Jésus est élevé sur toute la terre et attire la terre à lui; dans la croix apparaît à présent le « Kabod », la vraie gloire divine du Dieu qui aime jusqu'à la Croix et transforme ainsi la mort et crée la Résurrection.

 

 

 

15 juin 2010 – Au Congrès du diocèse de Rome

     La nature elle-même de l'amour requiert des choix de vie définitifs et irrévocables. Je m'adresse en particulier à vous, très chers jeunes: n'ayez pas peur de choisir l'amour comme la règle suprême de la vie. N'ayez pas peur d'aimer le Christ dans le sacerdoce et, si vous entendez dans votre c½ur l'appel du Seigneur, suivez-le dans cette extraordinaire aventure d’amour, en vous abandonnant avec confiance à Lui! N'ayez pas peur de former des familles chrétiennes qui vivent l'amour fidèle, indissoluble et ouvert à la vie! Témoignez que l'amour, ainsi que l'a vécu le Christ et l'enseigne le Magistère de l'Eglise, n'ôte rien à notre bonheur, mais au contraire donne cette joie profonde que le Christ a promise à ses disciples.

 

 

 

1er novembre 2010 – Angelus

     La mort chrétienne fait partie du chemin d’assimilation à Dieu et disparaîtra lorsque Dieu sera tout en tous. La séparation des liens d’affection terrestres est assurément douloureuse, mais nous ne devons pas la craindre, car celle-ci, accompagnée par la prière d’intention de l’Eglise, ne peut pas briser le lien profond qui nous unit au Christ. A cet égard, saint Grégoire de Nysse affirmait: «Celui qui a créé chaque chose dans la sagesse, a donné cette disposition douloureuse comme instrument de libération du mal et possibilité de participer aux biens espérés » (De mortuis oratio, IX, 1, Leiden 1967, 68).

     L’éternité n’est pas une succession continue des jours du calendrier, mais quelque chose comme le moment rempli de satisfaction, dans lequel la totalité nous embrasse et dans lequel nous embrassons la totalité (cf. Enc. Spe salvi, n. 12).

 

 

 

27 novembre 2010 – Vêpres et 1ère Veillée Mondiale pour la Vie

     Avec cette célébration des Vêpres, le Seigneur nous donne la grâce et la joie d’inaugurer la Nouvelle Année liturgique à partir de sa première étape: l’Avent, la période qui fait mémoire de la venue de Dieu parmi nous. Chaque début comporte une grâce particulière, car il est béni par le Seigneur. Au cours de cet Avent, il nous sera donné, une fois de plus, de faire l’expérience de la proximité de Celui qui a créé le monde, qui oriente l’histoire et qui a pris soin de nous jusqu’à arriver au sommet de sa complaisance: en se faisant homme. C’est précisément le grand et fascinant mystère du Dieu avec nous, et même du Dieu qui se fait l’un de nous, que nous célébrerons au cours des prochaines semaines, en nous mettant en marche vers Noël. Au cours du temps de l’Avent, nous sentirons l’Eglise nous prendre par la main et, à l’image de la Très Sainte Vierge Marie, nous exprimer sa maternité en nous faisant faire l’expérience de l’attente joyeuse de la venue du Seigneur, qui nous embrasse tous dans son amour qui sauve et réconforte.

      Tandis que nos c½urs tendent vers la célébration annuelle de la naissance du Christ, la liturgie de l’Eglise oriente notre regard vers le but ultime: la rencontre avec le Seigneur, qui viendra dans la splendeur de la gloire. C’est pourquoi, nous qui, dans chaque Eucharistie, «annonçons sa mort, proclamons sa résurrection dans l’attente de sa venue», nous veillons dans la prière. La liturgie ne se lasse jamais de nous encourager et de nous soutenir, en plaçant sur nos lèvres, au cours des jours de l’Avent, le cri par lequel se conclut toute la Sainte Ecriture, dans la dernière page de l’Apocalypse de Jean: «Viens, Seigneur Jésus!» (22, 20).

     Chers frères et s½urs, notre rassemblement ce soir en vue de commencer le chemin de l’Avent s’enrichit d’un autre motif important: avec toute l’Eglise, nous voulons célébrer solennellement une veillée de prière pour la vie naissante. Je désire exprimer mes remerciements à tous ceux qui ont répondu à cette invitation et à ceux qui se consacrent de façon spécifique à accueillir et à protéger la vie humaine dans ses diverses situations de fragilité, en particulier à ses débuts et dans ses premiers pas. Le début de l’Année liturgique nous fait vivre précisément à nouveau l’attente de Dieu qui se fait chair dans le sein de la Vierge Marie, de Dieu qui se fait petit, devient enfant; il nous parle de la venue d’un Dieu proche, qui a voulu reparcourir la vie de l’homme, depuis ses débuts, et ce pour la sauver totalement, en plénitude. Et ainsi, le mystère de l’Incarnation du Seigneur et le début de la vie humaine sont intimement et harmonieusement liés entre eux au sein de l’unique dessein salvifique de Dieu, Seigneur de la vie de tous et de chacun. L’Incarnation nous révèle avec une lumière intense et de façon surprenante que chaque vie humaine possède une dignité très élevée, incomparable.

     L’homme présente une originalité indéniable par rapport à tous les autres êtres vivants qui peuplent la terre. Il se présente comme sujet unique et singulier, doté d’intelligence et de volonté libre, et composé de réalité matérielle. Il vit de façon simultanée et indissociable dans la dimension spirituelle et dans la dimension corporelle. C’est ce que suggère également le texte de la Première  Lettre aux Thessaloniciens, qui a été proclamée: «Que le Dieu de la paix lui-même — écrit saint Paul — vous sanctifie totalement, et que votre être entier, l'esprit, l'âme et le corps, soit gardé sans reproche à l'Avènement de notre Seigneur Jésus Christ» (5, 23). Nous sommes donc esprit, âme et corps. Nous faisons partie de ce monde, liés aux possibilités et aux limites de la condition matérielle; dans le même temps, nous sommes ouverts à un horizon infini, capables de dialoguer avec Dieu et de l’accueillir en nous. Nous ½uvrons dans les réalités terrestres et à travers elles, nous pouvons percevoir la présence de Dieu et tendre vers Lui, vérité, bonté et beauté absolue. Nous goûtons des fragments de vie et de bonheur et nous aspirons à la plénitude totale.

     Dieu nous aime de façon profonde, totale, sans distinction; il nous appelle à l’amitié avec Lui; il nous fait participer à une réalité au delà de toute imagination et de toute pensée et parole: sa vie divine elle-même. Avec émotion et gratitude, nous prenons conscience de la valeur, de la dignité incomparable de toute personne humaine et de la responsabilité que nous avons envers tous. «Nouvel Adam, le Christ, dans la révélation même du mystère du Père et de son amour, manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation... par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme» (Const. Gaudium et spes, n. 22).

     Croire en Jésus Christ exige également de porter un regard nouveau sur l’homme, un regard de confiance, d’espérance. Du reste, l’expérience même et la juste raison attestent que l’être humain est un sujet capable d’entendre et de vouloir, conscient de lui-même et libre, unique et irremplaçable, sommet de toutes les réalités terrestres, qui exige d’être reconnu comme valeur en lui-même et mérite toujours d’être accueilli avec respect et amour. Il a le droit de ne pas être traité comme un objet à posséder ou comme une chose que l’on peut manipuler selon son bon vouloir, de ne pas être réduit à un simple instrument au bénéfice des autres et de leurs intérêts. La personne est un bien en elle-même et il faut toujours rechercher son développement intégral. Ensuite, l’amour envers tous, s’il est sincère, tend spontanément à devenir une attention préférentielle pour les plus pauvres et les plus faibles. C’est dans cette optique que s’inscrit la sollicitude de l’Eglise pour la vie naissante, la plus fragile, la plus menacée par l’égoïsme des adultes et par l’obscurcissement des consciences. L’Eglise réaffirme sans cesse ce qu’a déclaré le Concile Vatican II: «La vie, une fois conçue, doit être protégée avec le plus grand soin» (ibid., n. 51).

     Il existe des tendances culturelles qui cherchent à anesthésier les consciences par des motivations qui sont des prétextes. A propos de l’embryon dans le sein maternel, la science elle-même met en évidence son autonomie capable d’interagir avec sa mère, la coordination de processus biologiques, la continuité du développement, la complexité croissante de l’organisme. Il ne s’agit pas d’une accumulation de matériel biologique, mais d’un nouvel être vivant, dynamique et merveilleusement ordonné, un nouvel individu de l’espèce humaine. Il en a été ainsi pour Jésus dans le sein de Marie; il en a été ainsi pour chacun de nous, dans le sein de sa mère. Avec l’antique auteur chrétien Tertullien, nous pouvons affirmer: «Il est déjà un homme celui qui le sera» (Apologétique, IX, 8); il n’y a aucune raison de ne pas le considérer comme une personne dès sa conception.

     Malheureusement, après la naissance également, la vie des enfants continue à être exposée à l’abandon, à la faim, à la misère, à la maladie, aux abus, à la violence, à l’exploitation. Les multiples violations de leurs droits qui sont commises dans le monde blessent douloureusement la conscience de chaque homme de bonne volonté. Devant le triste panorama des injustices commises contre la vie de l’homme, avant et après la naissance, je fais mien l’appel passionné du Pape Jean-Paul II à la responsabilité de tous et de chacun: «Respecte, défends, aime et sers la vie, toute la vie humaine! C’est seulement sur cette voie que tu trouveras la justice, le développement, la liberté véritable, la paix et le bonheur!» (Enc. Evangelium vitae, n. 5). J’exhorte les acteurs de la politique, de l’économie et de la communication sociale à faire ce qui est en leur pouvoir, pour promouvoir une culture toujours respectueuse de la vie humaine, pour créer des conditions favorables et des réseaux de soutien à l’accueil et au développement de celle-ci.

     Nous confions à la Vierge Marie, qui a accueilli le Fils de Dieu fait homme par sa foi, dans son sein maternel, avec une sollicitude prévenante, en l’accompagnant de façon solidaire et vibrante d’amour, la prière et l’engagement en faveur de la vie naissante. Nous le faisons dans la liturgie — qui est le lieu où nous vivons la vérité et où la vérité vit avec nous — en adorant la divine Eucharistie, dans laquelle nous contemplons le Corps du Christ, ce Corps qui s’incarna en Marie par l’½uvre de l’Esprit Saint, et qui naquit d’elle à Bethléem, pour notre salut. Ave, verum corpus, natum de Maria Virgine !

 

8 décembre 2010 – Méditation Place d’Espagne à Rome

     Le don le plus beau que nous offrons, et qui est le plus agréable (à Marie), est notre prière, celle que nous portons dans notre c½ur et que nous confions à son intercession. Ce sont des invocations de remerciement et de supplication: remerciement pour le don de la foi et pour tout le bien que nous recevons quotidiennement de Dieu ; et supplication pour les diverses nécessités, pour la famille, la santé, le travail, pour chaque difficulté que la vie nous fait rencontrer.

     … Ce que nous recevons de Marie est beaucoup plus important que ce que nous lui offrons. En effet, elle nous adresse un message destiné à chacun de nous… Et qu’est-ce que nous dit Marie? Elle nous parle avec la Parole de Dieu, qui s’est faite chair dans son sein. Son «message» n’est autre que Jésus, Lui qui est toute sa vie. C’est grâce à Lui et pour Lui qu’elle est l’Immaculée. Et comme le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous, ainsi elle aussi, sa Mère, a été préservée du péché pour nous, pour tous, comme anticipation du salut de Dieu pour chaque homme. Ainsi, Marie nous dit que nous sommes tous appelés à nous ouvrir à l’action de l’Esprit Saint pour pouvoir parvenir, dans notre destin final, à être immaculés, pleinement et définitivement libérés du mal. Elle nous le dit à travers sa sainteté même, avec un regard plein d’espérance et de compassion, qui évoque des paroles comme celles-ci: «Ne crains rien, mon fils, Dieu t’aime; il t’aime personnellement; il t’a pensé avant que tu ne viennes au monde et il t’a appelé à l’existence pour te combler d’amour et de vie; et c’est pour cela qu’il est venu à ta rencontre, qu’il s’est fait comme toi, qu’il est devenu Jésus, Dieu-Homme, en tout semblable à toi, mais sans le péché; il s’est donné lui-même pour toi, jusqu’à mourir sur la croix, et ainsi il t’a donné une vie nouvelle, libre, sainte et immaculée» (cf. Ep 1, 3-5).


 

 

publié le : 08 janvier 2025

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