Vie spirituelle

La question des vocations dans les familles catholiques, ce qu'il convient de faire… et de ne pas faire.

avec l'aimable autorisation de La Nef, mai 2012

La question des vocations dans les familles catholiques,
ce qu'il convient de faire… et de ne pas faire.

par Monique BERGER

 

Avant d'aborder ce sujet, une précision s'impose : c'est à l'évêque ou au supérieur que revient, en droit, le  discernement et l'accueil du candidat au sacerdoce ou à la vie consacrée.
Mais avant cette étape décisive, le jeune a grandi dans une famille, y a reçu une empreinte particulière.
Or, la famille chrétienne est le premier lieu de l’apprentissage de la vie chrétienne. Des parents qui prient, qui rassemblent leurs enfants pour un temps quotidien de prière familiale, créent un climat 
où Jésus est vraiment honoré comme Seigneur et Maître (cf. Jn 13, 14) 
et où les enfants apprennent à vivre en présence de Dieu. Un tel climat favorise l'accueil silencieux du Saint Esprit, le témoin intérieur, qui parle au cœur de l'enfant et fait reconnaître sa voix qui appelle.
Une famille, surtout quand elle est composée de plusieurs frères et sœurs, permet à chaque enfant de mettre en pratique, dès le plus jeune âge, la charité fraternelle par l'exercice du partage, de la patience, de l'indulgence, du pardon…
Aujourd’hui comme hier, la famille chrétienne est donc le premier lieu d’éveil et d’éclosion des vocations. Et lorsqu'un jeune reçoit l'appel du Seigneur, cela se passe au fond de son cœur, dans le silence.

Quels signes permettent aux parents ou à l'entourage de percevoir cet appel ?
C'est plutôt au cours de l'enfance ou de l'adolescence que les parents pourront noter des signes de vocation. Tous les cas de figure existent… depuis la confidence toute simple d'un enfant de 6 ou 7 ans à sa maman (souvent au moment de sa première communion) : "quand je serai grand, je serai prêtre", jusqu'au jeune adulte déjà établi dans la vie professionnelle et qui reçoit l'appel de Dieu à 30, 40 ans...
Ainsi, une simple petite phrase à la fin d'une prière du soir : "Maman, Dieu m'attire"… (à 8 ans). C'est tout. La vie de ce garçon se poursuit : à 18-20 ans, les JMJ, la mort accidentelle d'un prêtre très aimé, une vie professionnelle sans encombre… Rien ne transparaît qui puisse laisser prévoir une vocation… jusqu'à 26 ans : "j'entre au séminaire".
L'influence d'un prêtre (paroisse, mouvement de jeunes…) est souvent déterminante, suscitant chez  l'enfant le désir de l'imiter. Les parents remarquent alors un changement de comportement chez leur fils.
L'intérêt continu d'un jeune garçon pour le service d'autel est aussi un signe assez significatif.
Des parents ont remarqué chez leur fils, depuis son passage dans un bon lycée, une grande fidélité à la prière, la messe quotidienne, s'engageant plusieurs années de suite comme brancardier à Lourdes. Mais ce n'est qu'une fois ses études terminées qu'il annonce, radieux : "j'entre au séminaire".
Un autre, après une enfance facile dans un milieu "protégé", entre après son bac dans une école d'ingénieurs. C'est sa première année d'étudiant : logé en résidence universitaire, il découvre tout un monde nouveau et, pour tout dire, bien différent de l'horizon familial. Il voit et sent à quel point toute cette jeunesse qui l'entoure a besoin d'être évangélisée... Alors là, cela ne traîne pas. Dès février, il écrit à ses parents sa décision d'entrer au séminaire l'année suivante. Il n'en avait jamais parlé auparavant, mais le 'terreau" était prêt. Sa maman et son frère aîné le pressentaient.
Une petite fille de 6 ans, déjà catéchiste dans la cour de l'école aux heures de récréation, venait de faire sa première communion. Allant à la messe avec sa grand-mère et revenue à sa place après avoir communié, elle tombe dans les pommes (il faisait très chaud). Sa grand-mère, sans attendre la fin de la messe, la ramène à la maison. En attendant le déjeuner, elle joue à la poupée. Mais, tout d'un coup, sa grand-mère la voit poser sa poupée sur une chaise d'un air décidé, et se mettre à genoux, en prière, mains jointes, pendant cinq bonnes minutes : elle s'était souvenue qu'elle n'avait  pas fait son action de grâces !...Quinze ans après, la voici novice bénédictine.
De tels exemples se trouvent souvent dans la vie des saints. Certains avaient un tel besoin de recueillement qu'ils aimaient, même très jeunes, se réfugier dans un coin retiré pour penser à Dieu sans être dérangé : au fond d'un jardin (sainte Marguerite-Marie) d'une grange (le petit Jean-Marie Vianney, futur curé d'Ars), ou dans un recoin aménagé en oratoire derrière une armoire (saint Maximilien Kolbe).
Don Bosco, apôtre à 8 ans, attirait les gens du village par ses talents de prestidigitateur et acrobate, pour leur faire le catéchisme et… les empêcher d'aller au bistrot pendant ce temps-là…

Quelle attitude avoir ?
- La discrétion
Un projet de vocation doit toujours être accueilli avec beaucoup de discrétion et demande de respecter
- le choix de Dieu sur cet enfant : nos enfants ne nous appartiennent pas, ils nous sont confiés par le Seigneur.
- et la liberté de l'enfant dans sa réponse à l'appel qu'il entend. Ce n'est encore qu'un "secret" entre l'enfant et Dieu : trésor beaucoup trop précieux pour être divulgué sur la place publique ...
S'il s'en est ouvert à ses parents, c'est qu'il a confiance en eux : il a besoin de leur soutien, de leur encouragement, de leur confiance. Mais s'il craint une opposition, il ne leur en parlera pas, ou beaucoup plus tard ; c'est d'abord à son directeur spirituel qu'il en aura parlé.

La discrétion consiste aussi à se taire : si un enfant de 6 ans parle facilement de son projet d'être prêtre, plus tard, à l'adolescence, assez souvent, il n'en parle plus. Il peut même donner le change, en parlant de commencer une "prépa".
Des parents témoignent : "Malgré l'envie qui nous démangeait de l'interroger, nous n'avons jamais posé la question : "mais enfin, ton projet d'entrer au séminaire, où en es-tu ?"

- Créer le climat favorable à l'éclosion d'une vocation : prière, environnement familial et scolaire, contacts avec de bons prêtres, équilibre de vie entre les lectures, les activités, le choix des amis...
Il ne s'agit pas de l'élever dans un "cocon", mais pas davantage d'exposer inutilement ce germe de vocation : un germe, c'est toujours fragile.
Avec un enfant tout jeune, les parents lui montreront que la meilleure façon pour lui de se préparer à répondre à cet appel de Dieu, c'est d'abord d'être fidèle à la volonté de Dieu dans les choses de la vie quotidienne : prière, travail de classe, services à rendre, obéissance, bonne humeur, efforts sur ses défauts... tout ce qui favorise déjà un bon équilibre humain. 
Avant d'être prêtre, on est d'abord un chrétien : "Commence par être un bon chrétien ... et après le Bon Dieu saura t'orienter. Est-ce que tu pries ? - est-ce que tu te confesses ? - est-ce que tu communies ? - est-ce que tu dis "oui" à Dieu dans tes actions quotidiennes ?" Par exemple :
- son devoir d'état d'écolier : bien faire son travail de classe, ou ce qu'on a à faire d'autre.
- vivre dans la charité avec son entourage : penser aux autres, rendre service, faire plaisir. 
- l'esprit de sacrifice : savoir se renoncer, passer après les autres ...
Ce qui favorise encore l'éclosion d'une vocation, c'est lorsque, dans la famille, on trouve normal d'envisager cette éventualité, tout comme d'autres, dans les projets d'avenir ... Ou encore, lorsqu'il y a déjà d'autres exemples de vocation dans la famille (oncles, cousins, grand frère...).

- Prier à cette intention.
Prière de remerciement d'abord, de demande ensuite : pour que les parents reçoivent les grâces nécessaires pour accompagner leur enfant ; et que celui-ci ait la grâce de fidélité et de persévérance.
Il faut beaucoup de prière pour qu'un germe de vocation aboutisse. Que les parents prient, que le jeune prie...

Ce qu'il faut surtout éviter de faire…
Ni  forcer…
Une maman témoigne : "Jamais nous n'avons fait de phrase du genre : "Nous aimerions bien avoir un fils prêtre". Préférer l'exemple d'une ordination, d'une profession religieuse, auxquels l'enfant peut assister.
Bien sûr, les parents peuvent prier à l'intention des vocations, mais le dire tout haut pourrait être perçu comme une sorte de "forcing".
Et rien de pire qu'une mère qui "a la vocation" pour son fils ! C'est risquer tôt ou tard une catastrophe !
Ni  freiner…
Pour différentes raisons, Il arrive que des parents s'opposent à la vocation de leur enfant. Temps d'épreuve pour le jeune, avec le risque que la vocation s'étiole.
Un enfant qui se voue à Dieu, c'est un réel sacrifice pour les parents. Soyons sûrs pourtant que Dieu les récompense généreusement.

En bref :
Que le jeune (et même l'enfant) se sente à la fois :
libre : ne cherchons pas à forcer les confidences, respectons son silence...
Qu'il ne se sente pas lié non plus par la confidence qu'il nous en a faite, ni "culpabilisé" si, par la suite, il ne donne pas suite à ce projet. Respecter sa liberté.
soutenu par nous, par notre attitude d'accueil à son projet. Nous sommes là pour l'aider.
Mais tout se passe entre Dieu et lui.

publié le : 14 mai 2012

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