Vie spirituelle

Lettre à un jeune - 28.7.2008 - Mgr léonard


Une Lettre à un jeune
lundi 28 juillet 2008
par Monseigneur léonard, Evêque de Namur, en Belgique

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Je ne sais pas par quelle voie cette lettre t'est parvenue. Peu importe, puisque tu l'as entre les mains. Par elle, je voudrais simplement te dire un petit quelque chose de ce que j'ai dans le coeur en pensant aux jeunes. C'est une pensée qui m'est venue après les Journées Mondiales de la Jeunesse, l'an 2000, à Rome. Après avoir vibré à la joie de ces centaines de milliers de jeunes réunis avec le Pape, j'ai pensé qu'il serait bien de rédiger un message spécial à l'intention des jeunes(...).

Dépasser les clichés

Une fois sur deux, la rencontre dans les écoles commence avec des questions passe-partout de style journalistique. On a un évêque sous la main, on s'imagine qu'il voit le Pape toutes les semaines et donc on sort les pelures de banane habituelles pour voir comment il va déraper dessus... Le premier quart d'heure est ainsi souvent consacré à démonter tous les racontars qui traînent régulièrement dans la presse. Je ne refuse pas les tartes à la crème et je m'efforce d'y répondre patiemment. Mais comme il est beau le moment de grâce où, en vérité, nous parlons ensemble, vous et moi, toi et moi, des questions de la vie! Cela arrive, de manière très personnelle, quand j'accueille des jeunes pour une conversation confidentielle ou pour le beau sacrement du pardon, lors de moments de retraite ou de pèlerinages. Mais aussi lors de rencontres dans le contexte scolaire. Et alors, tout sort : les difficultés du dialogue avec les parents, que ceux-ci soient ensemble ou séparés ; les espérances et les craintes liées aux premières relations amoureuses ; la manière de se situer par rapport aux sorties en discothèque, aux menaces de l'alcool et de la drogue ; la révolte face à la mort d'autres jeunes ; les craintes devant le fléau du chômage ; la peur d'un monde gangrené par la violence et le fanatisme, etc.
J'espère ne pas te scandaliser en confessant que, parmi toutes ces rencontres, celles qui vont le plus vite droit au but, ce sont les rencontres avec les jeunes en prison. Les prisons sont peuplées de jeunes. La plupart du temps en liaison avec ce qui tourne autour de la drogue. Là, on ne perd pas beaucoup de temps en propos de convenance. On est tout de suite à l'essentiel. Chacun des garçons, chacune des filles rencontrés en prison est, de manière unique, un résumé, un concentré, de toutes les difficultés de vivre que connaissent pas mal de jeunes aujourd'hui. Et les expériences de grâce et de conversion que certains vivent en prison sont le reflet, dans un contexte tragique, celui du monde carcéral, des découvertes spirituelles faites par de tant de jeunes, quoi qu'on dise.

Le courage de la foi

Je ne sais comment, tu te situes par rapport à la foi. Crois-tu en Dieu ? Crois-tu en Jésus ? Peut-être fais-tu partie de ceux qui, à des dosages divers, osent, dans l'intime de son coeur, répondre "oui" à ces questions. Dans ce cas, surtout face aux copains et copines dans le monde scolaire, il te faut du courage pour le laisser transparaître au dehors. Car la tentation qui guette beaucoup de jeunes et d'adultes aujourd'hui est celle du conformisme. Faire comme tout le monde ! Aussi étonnant que cela puisse paraître, nombre de jeunes sont menacés par "la pensée unique" : penser tous la même chose ! Ce qui me peine le plus, ce sont les pressions exercées sur ceux qui voudraient faire preuve d'indépendance d'esprit en croyant en Dieu et en Jésus. Ils seront parfois objet de dérision ou d'expulsion. Et de la part de qui ? Hélas ! d'autres jeunes qui, partant du préjugé que la religion est une affaire ringarde, n'hésite pas à se moquer de ceux qui exercent leur liberté de pensée et osent tenir que la foi en Dieu et en Jésus est l'affaire la plus importante de toute la culture humaine.

Des valeurs auxquelles tu vibres

Mais peut-être te situes-tu autrement. Tu ne crois pas vraiment en un Dieu personnel qui te connaît et qui t'aime, mais tu penses qu'il y a quelque avant nous et au-dessus de nous. Tu ne crois pas vraiment que Jésus est le Fils même de Dieu venu en ce monde, mais son personnage et son message ne te laisse pas indifférent. Dans une enquête sociologique, tu irais même jusqu'à déclarer - anonymement - que tu es chrétien, mais tu l'es à ta manière. Tu ne pries pas très souvent. On te voit encore moins souvent à la messe. Mais tu vibres à certaines valeurs qui ne sont pas sans rapport avec l'Evangile de Jésus. Par exemple, à la beauté, comme le montre ton intérêt pour la musique, le cinéma, la photo ou, tout simplement, les paysages de la nature. Et s'il s'agit d'être solidaire avec les plus démunis de nos sociétés d'opulence, s'il s'agit de travailler au développement des pays du Tiers-Monde, s'il est question de protéger l'environnement contre le saccage systématique de la planète, ou, plus simplement, si une personne dans la détresse a besoin de ta présence, tu seras vite prêt à t'engager. Parfois même avec une très grande générosité ; Tout cela est formidable. N'est-on pas déjà chrétien en vivant tout cela ? On l'est même parfois beaucoup. Car, comme le dit Jésus : " Il ne suffit pas de me dire : Seigneur ! Seigneur ! pour entrer dans le Royaume des cieux" (Évangile de Matthieu, 7, 21). Or la volonté du Père, c'est certainement que nous nous aimions comme des frères et soeurs en humanité et que nous combattions ensemble pour la justice dans le monde. Et s'il fallait aller plus loin encore... S'il fallait aussi te poser, sérieusement, la question de Dieu. Car cela fait une grande différence si tu viens du néant pour retourner au néant, ou si tu viens de Quelqu'un pour aller vers Quelqu'un. Cela change tout dans ta vie présente.

Ne pas avoir peur de poser la question de Dieu

Je suppose qu'il t'arrive de te demander pourquoi tu existes et pourquoi existe tout ce monde qui te porte et te précède. Car il y a un ordre fabuleux dans l'univers, spécialement dans le monde des vivants. Nous commençons à le décoder un peu, mais, manifestement, ce n'est pas nous qui l'avons conçu. Difficile de penser que cela s'est construit tout seul, à partir d'une matière éternelle, sans aucune intelligence qui soit à la source d'une construction aussi élaborée... Autant imaginer qu'un ordinateur s'est construit tout seul à partir de la masse informe des atomes qui le composent ! Difficile aussi de ne pas se poser la question d'un Dieu personnel... Car, à supposer que l'Intelligence divine qui porte le monde soit simplement une Équation universelle, une Énergie supérieure, un rayonnement cosmique, il faudrait accepter que le plus est sorti du moins ! Il faudrait avaler que de ce Grand Machin anonyme est sorti le coeur humain, le coeur d'une personne capable de vouloir, de désirer, et d'aimer... D'une Source impersonnelle serait née une personne avec toute sa liberté ? "Bizarre autant qu'étrange", diraient Dupont et Dupont. Il vaut la peine de ruminer ces questions essentielles. Peut-être as-tu (eu) l'occasion d'y réfléchir dans un cours de religion ou de philosophie. C'est une chance à saisir.

Ne pas avoir peur de te situer par rapport à Jésus

Croire en Dieu, c'est bien. Mais, malgré tout, cela te laisse démuni devant la terrible question du mal. Si le monde a été créé par Dieu, alors pourquoi y a-t-il tant d'horreurs dans le monde à côté de tant de beauté ? Tant d'ordre, mais aussi de désordre... Valait-il la peine de créer un Univers si beau, certes, mais si redoutablement tragique ?
Tu sais comme moi que les explications du mal ne manquent pas. Tous les mots savants en "isme" sont là pour te l'expliquer à l'envi. Je m'en méfie comme de la peste en cette matière. Car tous "expliquent" le mal sans l'endurer vraiment, sans le prendre vraiment au sérieux. C'est pourquoi, au risque de t'étonner, je me méfie, dans un premier temps, du "Christianisme ". De même, tous les discours sur les "valeurs évangéliques" et les couplets sur les "valeurs chrétiennes" me laissent plutôt froid. Quand je suis dans le pétrin, ce ne sont pas les "valeurs" qui vont me tendre la main. Par contre, Jésus le peut, lui. Ah ! comme il vaut la peine de le connaître ! Tu n'en trouveras pas un autre comme lui !

Un homme qui se présente comme Dieu !

Jésus est le seul homme, dans toute l'histoire du monde, qui a prétendu être l'égal de Dieu. Il l'a signifié clairement par ses paroles et par ses gestes. Il a demandé pour lui ce que Dieu seul peut demander, à savoir qu'on le préfère à tout. Ses adversaires ont très bien compris où il voulait en venir. Ils le lui envoient à la figure avec hargne : "Toi que n'es qu'un homme, tu te fais Dieu !" (Évangile de Jean, 10,33). Finalement, Jésus a été condamné à mort pour blasphème, parce qu'il appelait Dieu son Père, se faisant ainsi l'égale de Dieu (cf. Évangile de Jean, 5,18). Cela est unique. De grâce, ne te fabrique jamais un Jésus à ta mesure, qui serait simplement un prophète généreux et sympathique, accueillant gentiment tout le monde. Laisse Jésus venir à toi avec toute sa simplicité et sa cordialité, mais aussi avec toute sa grandeur de Fils de Dieu.

Un Dieu qui descend au fond de l'abîme

Et pourtant, ce Jésus qui a revendiqué une telle intimité avec Dieu est mort dans la solitude et l'angoisse. Au moment de mourir, il a poussé un cri qui a bouleversé ceux qui l'on entendu, il a poussé le cri qui poussent tant de gens de par le monde, le cri que tu pousses peut-être parfois toi-même quand tu es au fond du trou : "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?" (Évangile de Matthieu, 27,46). Tous les autres t'expliqueront le mal avec des mots prétentieux. Jésus, lui, pleure tout simplement devant la tombe de son ami Lazare (cf. Évangile de Jean, 11, 35). Et, à l'heure de la propre mort, en proie aux ténèbres, il pousse ce cri de détresse. Jamais tu ne viendras à bout de la détresse que laisse entrevoir ce cri.
Cela peut paraître étonnant. Mais si Jésus est bien celui qu'il a prétendu être, alors son désarroi à l'agonie et sa solitude en croix, loin de Dieu, signifient que désormais tu as un Dieu qui peut te rejoindre, aussi seul que tu puisse être et aussi bas que tu sois peut-être tombé. Lui pourra toujours venir te prendre par la main.

Un Vivant qui a traversé la mort

Jésus est enfin le seul homme dans l'histoire du monde dont, au prix de leur vie, des témoins disent que Dieu l'a ressuscité des morts. Je sais bien que ce n'est pas facile à croire. Et pourtant, sans cette réalité, jamais l'Évangile ni l'Église ne seraient nés. À limite, sans la résurrection de Jésus, une bonne part de l'histoire du monde serait incompréhensible. La toute première fois qu'on a parlé au nom de Jésus en ce monde, lors de la Pentecôte de l'an 30, ce fut pour proclamer cela : "Celui que vous avez humilié jusqu'à la mort en croix parce qu'il se disait le Fils même de Dieu, eh bien ! Dieu l'a glorifié en lui faisant traverser la mort. Vous l'avez discrédité. Dieu, lui, l'a accrédité. Vous lui avez donné tort. Mais Dieu lui a donné raison !" (cf. Acte des Apôtres, 2, 14-36).
Alors une petite lumière commence à éclairer le terrible drame du mal dans le monde. Pour Jésus et ses disciples, le monde actuel n'est plus comme Dieu l'a créé. C'est un monde cassé, abîmé, par des puissances diaboliques et humaines perverses. Car, comme l'écrit l'apôtre Paul, la création tout entière, en son état présent "est livrée au pouvoir du néant, non de son propre gré, mais par l'autorité de celui qui l'y a livrée" (cf. Lettre aux Romains, 8, 18-25). Ce monde blessé, Jésus n'est pas d'abord venu l'expliquer comme le font les philosophies et les religions. Il est venu le porter. Il est venu l'endurer dans toute sa dureté. Ton Dieu, si tu es chrétien est un Dieu crucifié. Mais c'est aussi un Ressuscité, qui à traversé le double mur de la solitude du coeur humain et de la mort. Si tu mets ta main dans la sienne, tu pourras finalement tout traverser. Si tu lui ouvres ton coeur, il y déposera cette espérance folle que le monde pourra un jour être libéré du mal et déboucher sur la vraie vie, celle que la souffrance et la mort n'abîmeront plus jamais.

Un Dieu présent à tes côtés aujourd'hui

Jésus n'est pas un mythe, une belle histoire inventée par les hommes. Il est mort et ressuscité sous Ponce Pilate, alors que Tibère était empereur de Rome. Et cependant, il n'est pas seulement un homme illustre, derrière nous dans l'histoire, dont on pourrait simplement se souvenir en cultivant les "valeurs" qui furent les siennes. Ses derniers mots avant de nous quitter sont : "Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde" (Évangile de Matthieu,28, 20). Jésus est un Vivant qui marche aujourd'hui avec nous sur les routes de notre vie et de l'histoire. Si tu ne le connais pas, va lire en de sens le splendide épisode des pèlerins d'Emmaüs (Évangile de Luc, 24, 13-35).

Une parole d'amour qui peut t'éclairer

Oui, sa parole continue à retentir aujourd'hui. Tu en as l'écho dans l'Évangile tel que l'Eglise nous l'annonce depuis vingt siècles. Il s'agit d'une parole d'amour extraordinaire ! À travers Jésus, qui est à la fois ton Dieu et ton frère, Dieu te dit qu'il t'aime. Il te dit que sa vie et la tienne ne font désormais plus qu'un. Il ne peut plus être heureux sans toi. Si, en Jésus, Dieu et l'homme sont unis pour l'éternité, alors ta vie humaine a toutes les chances d'aboutir. Et à travers Jésus crucifié, abandonné, humilié, Dieu te dit : "Je t'aime tellement que jamais, même dans la pire détresse, je ne t'abandonnerai. Je t'aime à la vie et à la mort". Et à travers Jésus ressuscité, Dieu te dit "Mon amour pour toi traversera tout et te conduira jusqu'à une joie que rien ni personne ne pourra t'enlever".
Penses-y ! Quand tu aimes quelqu'un, cela signifie pour toi : "Je pense à cette personne, j'ai envie de la rencontrer, je voudrais pouvoir passer du temps avec elle, je désirerai partager ma vie avec elle, construire mon avenir avec elle, à la limite ne faire plus qu'un avec elle". Eh bien ! c'est ainsi que Dieu t'aime, en vérité. Ah ! si nous pouvions deviner avec quel amour il pense à nous à chaque instant ! Combien il nous désire ! Et chaque fois que nous aimons ainsi, en profondeur, d'un amour authentique, il nous rejoint et, si nous le voulons bien, vient faire couler dans les fragilités de notre amour la force de son amour à lui, si grand qu'il est capable de nous guérir de tous nos manques d'amour.

Un pain de vie qui peut te nourrir

Oui, sa vie continue à couler dans notre vie. C'est le sens propre de l'Eucharistie. Je pense que Jésus ne nous a pas trompés quand il nous a dit : "Prenez et mangez, ceci est mon corps qui est livré pour vous" (cf. Première Lettre aux Corinthiens, 11, 23-26). Je pense qu'il dit la vérité quand il a affirmé : " celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle, et moi, je le ressusciterai au dernier jour" (Évangile de Jean, 6, 54). C'est parce que je crois dur comme fer à ces paroles que je suis devenu prêtre. Sinon, j'avais mieux à faire. Sinon, à quoi bon passer sa vie à faire des simagrées autour de quelques morceaux de pain ! Mais si Jésus est bien présent, en personne, comme il nous l'a dit, dans ce Pain de vie, alors oui, cela vaut la peine d'être prêtre, notamment pour célébrer l'Eucharistie. Et les jeunes qui ont compris que l'Eucharistie, c'est Jésus en personne, ne se posent plus tellement la question de savoir à quoi ça sert la messe. Ils ont perçu que la messe, c'est Jésus lui-même, présent avec nous, en personne, à travers les siècles. C'est nous ensemble, avec lui, sur les chemins de l'homme et du monde. Cela en vaut la peine !

À quoi ça sert, l'Eglise ?

Franchement, si l'Eglise n'était qu'une institution humaine comme les autres, je ne suis pas certain que je m'y serais engagé. Mais l'Église, c'est d'abord nous tous, cette grande famille où je peux recevoir la Parole de Dieu et accueillir le Pain de la Vie. Elle a des défauts ? Forcément, puisque c'est nous qui la composons. Mais ce ne sont pas toujours les défauts qu'on dit. Parfois l'Église est critiquée justement sur les points où elle a pleinement raison. Comme il y a des dérives dans le monde, elle doit bien, de temps en temps, ramer à contre-courant. D'autres fois, ce sont les membres de l'Église, y compris de hauts responsables, qui agissent de travers, en étant infidèles à l'Évangile. C'est alors qu'il faut se convertir. Et l'Église doit demander pardon pour ceux de ses enfants, fussent-ils évêques ou Papes, qui ont trahi le Christ. Mais demande le Christ à l'Église, demande-le à ses saints et à ses saintes, à commencer par la Vierge Marie, et toujours elle te le donnera. Sur ce point, qui est essentiel, elle ne te décevra Jamais.
L'Église peut donc nous donner beaucoup. Et nous pouvons lui apporter beaucoup. Dès lors, si tu me demandes ce qu'il faut, de tout urgence, changer en elle pour qu'elle remplisse mieux sa mission, je te répondrai comme Mère Teresa de Calcutta : "Ce qu'il faut changer d'abord dans l'Église ? Eh bien, toi et moi !". Tu changeras plus l'Église en l'aimant et en t'y engageant qu'en tapant dessus...

Le coeur de Dieu et le coeur des jeunes sont faits pour s'entendre !

J'entends souvent dire par des adultes que Dieu, Jésus et la religion, ça ne vous intéresse plus, vous les jeunes. Je ne méconnais pas le problème. Je sais que vous n'avez que faire d'une pratique purement extérieure, par convenance ou obligation. Je sais aussi que le produit ne vous est pas toujours présenté avec un emballage adéquat. Mais quand j'entends ces jugements sur "les jeunes" en général, je sursaute et je proteste. Car je sais aussi, par la foi, que le coeur de Dieu bat d'amour pour vous. Je sais que le coeur de Jésus déborde d'amour pour vous. Et, par expérience directe, je sais que vous ètes merveilleusement doués pour ouvrir votre vie à la vie du Christ. Voilà près de quarante ans que je le vois, comme prêtre. On ne me fera donc jamais dire que vous n'ètes pas capables d'un grand élan d'amour pour le Seigneur en même temps que pour vos frères et soeurs en humanité. Jamais !

Vous avez surtout besoin de témoins et d'expériences vécues !

Mais vous ètes ainsi faits que, en matière de religion, vous avez plus besoin de témoins que de longs baratins. C'est pourquoi je vais d'ailleurs bientôt m'arrêter... Les discours théoriques vous laissent presque toujours de marbre. Vous vous méfiez d'instinct de ce qui ressemble à de la récupération idéologique. Et vous n'avez pas tort. Mais les témoins ne vous laissent pas indifférents. Quand la parole est portée par la vie, elle trouve chez vous une remarquable écoute. C'est pourquoi le plus grand service qu'on puisse vous rendre sur le plan de la foi est de vous permettre de rencontrer librement des témoins, des jeunes notamment, mais pas exclusivement, qui ont rencontré le Christ, vivent de lui, et ainsi relaient auprès de vous l'invitation de Jésus : "Venez et voyez !" (Évangile de Jean, 1, 39). L'essentiel est que vous puissiez venir et voir personnellement combien il est beau et bienfaisant d'ouvrir son coeur à Jésus et à Dieu. Les hommes vous décevront parfois, y compris les hommes d'Église, mais le Seigneur, une fois que vous l'aurez rencontré personnellement, ne vous décevra jamais !
J'ai été souvent le témoin émerveillé de vos découvertes de la foi et de la vraie vie en Église. Parfois à travers un bon cours de religion donné par un témoin convaincu et respectueux. Ou à l'occasion d'une retraite dans le cadre scolaire ou paroissial. Assez souvent dans le contexte d'une marche ou d'un pèlerinage ou lors d'une rencontre avec des personnes ou des communautés qui vivent simplement de l'Évangile, dans le quotidien de leur vie. Mais parfois aussi lors d'événements exceptionnels comme les Journées Mondiales de la Jeunesse avec le Pape. En ces diverses circonstances, vous êtes alors capables de faire en quelques jours, voire en quelques heures, des expériences spirituelles qui ont pris des années chez vos aînés.

Tel que tu es, crie vers Jésus ta soif de vivre en plénitude ! Tu ne seras pas déçu...

Pour Conclure, je voudrai t'inviter à faire comme Charles de Foucauld, ce jeune officier français qui avait perdu la foi et menai une vie de bâton de chaise, mais qui, au fond de son désarroi, criait déjà vers un Dieu auquel il ne croyait pas encore : Mon Dieu, si tu existes, manifeste-toi à moi !". Sa prière était honnête. Il parlait seulement au conditionnel : "si tu existes...". Mais il était ouvert à la lumière de Dieu : "manifeste-toi à moi!". Et Dieu s'est révélé à lui, jusqu'à faire de lui un grand prophète pour notre temps...
Eh bien, toi aussi, tel que tu es, dans le secret de ton coeur ou avec d'autres, crie vers Jésus ta soif de vivre en plénitude, crie-lui cette soif qui t'habite et dont tu pressens que rien ne pourra finalement l'étancher. Ouvre-lui ta vie, ne fût-ce qu'en entrebâillant la porte, et lui fera le reste. Ma seule récompense, en mettant un point final à cette lettre, c'est que tu puisses découvrir dans la personne de Jésus la source d'un vrai bonheur. Je te souhaite bonne route dans la vie ! Et, si tu me le permets, je te bénis.

Mgr Léonard, évêque de Namur en Belgique

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