Benoît XVI de A à Z

Miséricorde Divine

Miséricorde Divine

dans l'enseignement de Benoit XVI

 

 

2005

1 – … Demandant au Seigneur avec un cœur sincère et une âme déterminée et courageuse d'éloigner de nous tout ce qui nous sépare de Lui et qui est en opposition avec la mission que nous avons reçue. Le Seigneur, nous en sommes sûrs, est miséricordieux et saura nous exaucer. – aux prêtres romains à Saint Jean de Latran 13.5.2005


2 -   L'Immaculée reflète la miséricorde du Père. Conçue sans péché, elle fut capable de pardonner également ceux qui abandonnèrent et blessèrent son Fils au pied de la croix. En tant qu'Avocate, elle nous aide dans nos besoins et intercède pour nous auprès de son Fils en lui disant, comme elle le fit à Cana de Galilée, "Ils n'ont pas de vin" (Jn 2, 3), confiante dans le fait que son coeur plein de bonté ne nous abandonnera pas dans un moment de difficulté. En indiquant clairement "Tout ce qu'il vous dira, faites-le" (Jn 2, 5), elle nous invite à nous approcher du Christ et, dans cette proximité, à faire l'expérience, à éprouver et à voir "combien le Seigneur est bon". De cette expérience naît dans le coeur humain une plus grande clairvoyance pour apprécier ce qui est bon, beau et vrai. – Aux Evêques d’Espagne 19.5.2005

3 - Le coeur qui ressemble plus que tout autre à celui du Christ est sans aucun doute le coeur de Marie, sa Mère immaculée…En répondant à l'invitation adressée par la Vierge à Fatima, confions à son Coeur immaculée… le monde entier, afin qu'il fasse l'expérience de l'amour miséricordieux de Dieu et qu'il connaisse la paix véritable. – Angelus 5.6.2005

 

4 - Le regard fixé vers la Journée mondiale de la Jeunesse, … Soyez toujours, pour les jeunes de votre âge, de fidèles témoins de l’amour miséricordieux du Christ, qui a sauvé le monde par le sacrifice de la croix. – Angelus 3.7.2005

 

18 août 2005 – JMJ Cologne - Discours d’accueil des jeunes

       Certains d'entre vous se reconnaîtront peut-être dans le témoignage qu'Edith Stein donnait de son adolescence, elle qui vécut ensuite au Carmel de Cologne : "J'avais consciemment et délibérément perdu l'habitude de prier". Faites l'expérience bouleversante de la prière comme dialogue avec Dieu, dont nous nous savons aimés et que nous voulons aimer en retour. A vous tous, je voudrais dire avec insistance : ouvrez tout grand votre cœur à Dieu, laissez-vous surprendre par le Christ ! Accordez-lui "le droit de vous parler " ! Ouvrez les portes de votre liberté à son amour miséricordieux! Exposez vos joies et vos peines au Christ, le laissant illuminer de sa lumière votre intelligence et toucher de sa grâce votre cœur ! En ces jours bénis de partage et de joie, faites l'expérience libératrice de l'Eglise comme lieu de la miséricorde et de la tendresse de Dieu envers les hommes! C'est en elle et par elle que vous rejoindrez le Christ, qui vous attend.

 

 

21 août 2005 – Homélie Messe JMJ à Cologne

    En aimant l'Eucharistie, vous redécouvrirez aussi le sacrement de la Réconciliation, dans lequel la bonté miséricordieuse de Dieu permet toujours un nouveau commencement à notre vie.

 

 

2006

 

 

 

 

1er janvier 2006 – Message pour la Journée Mondiale de la Paix

     À tout bien considérer, le nihilisme et le fondamentalisme ont un rapport erroné à la vérité: les nihilistes nient l'existence de toute vérité, les fondamentalistes ont la prétention de pouvoir l'imposer par la force. Tout en ayant des origines différentes et tout en étant des manifestations qui s'inscrivent dans des contextes culturels divers, le nihilisme et le fondamentalisme ont en commun un dangereux mépris pour l'homme et pour sa vie, et, en dernière analyse, pour Dieu lui-même. En effet, à la base de cette tragique issue commune il y a, en définitive, l'altération de la pleine vérité de Dieu: le nihilisme en nie l'existence et la présence providentielle dans l'histoire; le fondamentalisme fanatique en défigure le visage aimant et miséricordieux, Lui substituant des idoles faites à son image.

 

 

1er janvier 2006 – Homélie de la Messe

     Nous contemplons, de manière particulière, la maternité de la Vierge Marie. Dans le passage de saint Paul que nous venons d'écouter (cf. Ga 4, 4), l'apôtre évoque, de façon très discrète, celle par l'intermédiaire de laquelle le Fils de Dieu entre dans le monde : Marie de Nazareth, la Mère de Dieu, la Theotòkos. Au début d'une nouvelle année, nous sommes comme invités à nous mettre à son école, à l'école de la fidèle disciple du Seigneur, pour apprendre d'Elle et accueillir dans la foi et dans la prière le salut que Dieu veut offrir à ceux qui ont confiance en son amour miséricordieux.

 

 

Message Carême 2006

    Le Carême est le temps privilégié du pèlerinage intérieur vers Celui qui est la source de la Miséricorde. C'est un pèlerinage au cours duquel Lui-même nous accompagne à travers le désert de notre pauvreté, nous soutenant sur le chemin vers la joie profonde de Pâques…

 

     Aujourd'hui encore le Seigneur écoute le cri des multitudes affamées de joie, de paix, d'amour. Comme à chaque époque, elles se sentent abandonnées. Cependant, même dans la désolation de la misère, de la solitude, de la violence et de la faim, qui frappent sans distinction personnes âgées, adultes et enfants, Dieu ne permet pas que l'obscurité de l'horreur l'emporte. Comme l'a en effet écrit mon bien-aimé Prédécesseur Jean-Paul II, il y a une «limite divine imposée au mal», c'est la Miséricorde (Mémoire et identité, 4, Paris, 2005, pp. 35 ss.)…

 

      Les exemples des saints et les multiples expériences missionnaires qui caractérisent l'histoire de l'Église constituent des indications précieuses sur le meilleur moyen de soutenir le développement. Aujourd'hui encore, au temps de l'interdépendance globale, on peut constater qu'aucun projet économique, social ou politique ne remplace le don de soi à autrui, dans lequel s'exprime la charité. Celui qui agit selon cette logique évangélique vit la foi comme amitié avec le Dieu incarné et, comme Lui, se charge des besoins matériels et spirituels du prochain. Il le regarde comme un mystère incommensurable, digne d'une attention et d'un soin infinis. Il sait que celui qui ne donne pas Dieu donne trop peu, comme le disait la bienheureuse Teresa de Calcutta : «La première pauvreté des peuples est de ne pas connaître le Christ». Pour cela il faut faire découvrir Dieu dans le visage miséricordieux du Christ : hors de cette perspective, une civilisation ne se construit pas sur des bases solides.

 

    C'est justement à ce salut intégral que le Carême veut nous conduire en vue de la victoire du Christ sur tout mal qui opprime l'homme. En nous tournant vers le divin Maître, en nous convertissant à Lui, en faisant l'expérience de sa miséricorde grâce au sacrement de la Réconciliation, nous découvrirons un «regard» qui nous scrute dans les profondeurs et qui peut animer de nouveau les foules et chacun d'entre nous. Ce «regard» redonne confiance à ceux qui ne se renferment pas dans le scepticisme, en leur ouvrant la perspective de l'éternité bienheureuse. En fait, déjà dans l'histoire, même lorsque la haine semble dominer, le Seigneur ne manque jamais de manifester le témoignage lumineux de son amour.

 

19 mars 2006 – Homélie de la Messe

     Les commandements, si on les regarde en profondeur, sont le moyen que le Seigneur nous donne pour défendre notre liberté aussi bien des conditionnements internes des passions que des abus externes de personnes malintentionnées. Les "non" des commandements sont autant de "oui" à la croissance d'une liberté authentique. Il existe une deuxième dimension du Décalogue qu'il faut également souligner: à travers la loi donnée par la main de Moïse, le Seigneur révèle qu'il souhaite passer avec Israël un pacte d'alliance. Plus qu'un ordre, la loi est par conséquent un don. Plus que commander ce que l'homme doit faire, elle veut manifester à tous le choix de Dieu: il est du côté du peuple élu; il l'a libéré de l'esclavage et il l'entoure de sa bonté miséricordieuse. Le Décalogue est le témoignage d'un amour préférentiel.
 

 

26 mars 2006 – Homélie Messe dans une paroisse romaine

     Malgré notre indignité, nous sommes les destinataires de la Miséricorde infinie de Dieu. Dieu nous aime d'une façon que nous pourrions qualifier d'"obstinée", et il nous enveloppe de son inépuisable Tendresse…

 

    Dans le Livre des Chroniques de l'Ancien Testament (cf. 2 Ch 36, 14-16.19-23), l'auteur saint propose une interprétation synthétique et significative de l'histoire du peuple élu, qui fait l'expérience de la punition de Dieu comme conséquence de son comportement rebelle: le temple est détruit et le peuple en exil n'a plus de terre; il semble réellement qu'il ait été oublié par Dieu. Mais il se rend ensuite compte qu'à travers les châtiments, Dieu poursuit un dessein de Miséricorde. Ce sera la destruction de la ville Sainte et du Temple - comme on l'a dit -, ce sera l'exil, qui touchera le cœur du peuple et qui le fera revenir à son Dieu pour le connaître plus profondément. Et alors le Seigneur, démontrant le primat absolu de son initiative sur tout effort purement humain, se servira d'un païen, Cyrus, roi de Perse, pour libérer Israël. Dans le texte que nous venons d'entendre, la colère et la Miséricorde du Seigneur se confrontent au cours d'un épisode à caractère dramatique, mais à la fin, l'amour triomphe, car Dieu est Amour. Comment ne pas recueillir dans le souvenir de ces lointains événements le message qui est valable pour chaque époque, y compris la nôtre ? En pensant aux siècles passés, nous pouvons voir que Dieu continue à nous aimer également à travers les châtiments. Les desseins de Dieu, même lorsqu'ils passent à travers l'épreuve, visent toujours à un résultat de Miséricorde et de pardon.

 

     "Dieu, qui est riche en Miséricorde, à cause du grand amour dont Il nous a aimés, alors que nous étions morts par suite de nos fautes, nous a fait revivre avec le Christ" (Ep 2, 4-5). Pour exprimer cette réalité de salut l'Apôtre, à côté du terme de Miséricorde, eleos en grec, utilise également la parole Amour, agape, reprise et amplifiée ultérieurement dans la très belle … : "Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique: ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle" (Jn 3, 16). Nous savons que ce "don" de la part du Père a eu un développement dramatique : il est allé jusqu'au sacrifice du Fils sur la Croix. Si toute la mission historique de Jésus est le signe éloquent de l'amour de Dieu, sa mort l'est de manière tout à fait particulière, la Tendresse rédemptrice de Dieu s'étant pleinement exprimée en elle. Le centre de notre méditation doit donc toujours être, mais particulièrement en ce temps de Carême, la Croix. Dans celle-ci, nous contemplons la Gloire du Seigneur qui resplendit dans le corps martyrisé de Jésus. C'est précisément dans ce don total de soi qu'apparaît la grandeur de Dieu, qu'apparaît qu'il est Amour. C'est la gloire du Crucifié que chaque chrétien est appelé à comprendre, à vivre et à témoigner à travers son existence. La Croix - le don de soi-même du Fils de Dieu - est en définitive le "signe" par excellence qui nous est donné pour comprendre la vérité de l'homme et la vérité de Dieu : nous avons tous été créés et rachetés par un Dieu qui a immolé son Fils unique par amour. Voilà pourquoi dans la Croix, comme je l'ai écrit dans l'Encyclique Deus caritas est (DCE, 12), "s'accomplit le retournement de Dieu contre lui-même, dans lequel il se donne pour relever l'homme et le sauver - tel est l'amour dans sa forme la plus radicale".

 

     Comment répondre à cet amour radical du Seigneur ? L'Evangile nous présente un personnage du nom de Nicodème, membre du Sanhédrin de Jérusalem, qui va chercher Jésus la nuit. Il s'agit d'un honnête homme, attiré par les paroles et par l'exemple du Seigneur, mais qui a peur des autres, qui hésite à franchir le pas de la foi. Il ressent la fascination de ce Rabbì si différent des autres, mais il ne réussit pas à se soustraire aux conditionnements du milieu, contraire à Jésus, et il restera hésitant sur le seuil de la foi. Que de personnes, à notre époque également, sont à la recherche de Dieu, à la recherche de Jésus et de son Eglise, à la recherche de la Miséricorde divine, et attendent un "signe" qui touche leur esprit et leur cœur ! Aujourd'hui, comme alors, l'évangéliste nous rappelle que le seul "signe" est Jésus élevé sur la Croix : Jésus mort et ressuscité est le signe absolument suffisant. En Lui, nous pouvons comprendre la vérité de la vie et obtenir le salut. Telle est l'annonce centrale de l'Eglise, qui demeure immuable au cours des siècles. La foi chrétienne n'est donc pas une idéologie, mais une rencontre personnelle avec le Christ crucifié et ressuscité. De cette expérience, qui est individuelle et communautaire, naît ensuite une nouvelle façon de penser et d'agir : c'est ainsi que trouve son origine, comme en témoignent les saints, une existence marquée par l'amour.

 

     En méditant sur la Miséricorde du Seigneur, qui s'est révélée de manière totale et définitive dans le mystère de la Croix, il me revient à l'esprit le texte que Jean-Paul II avait préparé pour la rencontre avec les fidèles du dimanche 3 avril, dimanche in Albis de l'année dernière. Dans les desseins divins, il était écrit qu'il devait nous quitter précisément la veille de ce jour, le samedi 2 avril - nous nous en souvenons tous parfaitement - et pour cette raison, il ne put pas prononcer ces paroles, qu'il me plaît à présent de vous reproposer, chers frères et sœurs. Le Pape avait écrit: "Le Seigneur ressuscité offre en don à l'humanité, qui semble parfois égarée et dominée par le pouvoir du mal, par l'égoïsme et par la peur, son amour qui pardonne, qui réconcilie et ouvre à nouveau l'âme à l'espérance. C'est l'amour qui convertit les cœurs et qui donne la paix". Dans ce dernier texte, qui est comme un testament, le Pape ajoutait: "Combien le monde a besoin de compréhension et d'accueillir la Divine Miséricorde!".

 

 

 

26 mars 2006 – Aux francophones, après l’Angelus

     Accueillez généreusement dans vos vies la richesse infinie de l'amour miséricordieux du Seigneur, afin d'agir selon la vérité. Alors vous viendrez à la lumière et votre lumière brillera au milieu de vos frères.

 

3 avril 2006 – Homélie de la Messe pour le 1er anniversaire de la mort de Jean Paul II

     Nous sentons résonner dans notre âme ses invitations répétées à avancer sans peur sur le chemin de la fidélité à l'Evangile pour être les messagers et les témoins du Christ dans le troisième millénaire. Ses exhortations incessantes à coopérer généreusement à la réalisation d'une humanité plus juste et plus solidaire, à être des artisans de paix et des bâtisseurs d'espérance nous reviennent à l'esprit. Notre regard reste toujours fixé sur le Christ qui est "le même hier, aujourd'hui et à jamais" (He 13, 8), qui guide solidement son Eglise. Nous avons cru à son amour et c'est la rencontre avec Lui "qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive" (Deus caritas est, n. 1). Que la force de l'Esprit de Jésus soit pour tous, chers frères et soeurs, comme elle le fut pour le Pape Jean-Paul II, une source de paix et de joie. Et que la Vierge Marie, Mère de l'Eglise, nous aide à être en toute circonstance, comme lui, des apôtres inlassables de son divin Fils et des prophètes de son amour miséricordieux

 

 

 

14 avril 2006 – Méditation Via Crucis, au Colisée

     Nous avons compris que la "Via Crucis" n'est pas simplement un succession des choses sombres et tristes du monde. Ce n'est pas non plus, à la fin, un moralisme inefficace. Ce n'est pas un cri de protestation qui ne change rien. La "Via Crucis" est la voie de la Miséricorde, et de la Miséricorde qui pose une limite au mal: c'est ce que nous avons appris du Pape Jean-Paul II. C'est la voie de la miséricorde et, ainsi, la voie du salut. Et nous sommes ainsi invités à emprunter la voie de la miséricorde et à poser, avec Jésus, une limite.
 

     Prions le Seigneur pour qu'il nous aide, pour qu'il nous aide à être "contaminés" par sa Miséricorde. Prions la Sainte Mère de Jésus, la Mère de la Miséricorde, afin que nous aussi nous puissions être des hommes et des femmes de Miséricorde et contribuer ainsi au salut du monde; au salut des créatures; pour être des hommes et des femmes de Dieu.
 

 

23 avril 2006 – Regina Caeli

     L'Evangéliste rappelle également qu'au cours des deux apparitions - le jour de la Résurrection et huit jours après -, le Seigneur Jésus montra aux disciples les signes de la crucifixion, bien visibles et tangibles également sur son corps glorieux (cf. Jn, 20, 20.27). Ces saintes plaies, sur les mains, sur les pieds et sur le côté, représentent des sources inépuisables de foi, d'espérance et d'amour auxquelles chacun peut puiser, en particulier les âmes les plus assoiffées de divine miséricorde. Pour cette raison, le serviteur de Dieu Jean-Paul II, valorisant l'expérience spirituelle d'une humble Sœur, sainte Faustina Kowalska, a voulu que le dimanche après Pâques soit consacré de façon particulière à la Divine Miséricorde; et la Providence a voulu qu'il meure précisément la veille de ce jour dans les mains de la Miséricorde divine. Le mystère de l'Amour Miséricordieux de Dieu est placé au centre du Pontificat de mon vénéré prédécesseur. Rappelons, en particulier, l'Encyclique Dives in Misericordia, de 1980, et la consécration du nouveau sanctuaire de la Divine Miséricorde à Cracovie, en 2002. Les paroles qu'il prononça en cette dernière occasion ont été comme une synthèse de son Magistère, soulignant que le culte de la miséricorde divine n'est pas une dévotion secondaire, mais une dimension intégrale de la foi et de la prière du chrétien.

     Que la Très Sainte Vierge Marie, Mère de l'Eglise, à laquelle nous nous adressons à présent à travers le Regina caeli, obtienne pour tous les chrétiens de vivre en plénitude le dimanche comme « pâque de la semaine », en goûtant à la beauté de la rencontre avec le Seigneur ressuscité et en puisant à la source de son amour miséricordieux, pour être apôtres de sa paix.

 

5 juin 2006 – Au Congrès du Diocèse de Rome

     Il existe un espace privilégié dans lequel cette rencontre se réalise de façon plus directe, se renforce et s'approfondit, et devient ainsi véritablement en mesure d'imprégner et de caractériser toute l'existence:  cet espace est la prière. Chers jeunes, un grand nombre d'entre vous étaient certainement présents à la Journée mondiale de la Jeunesse, à Cologne. Là, ensemble, nous avons prié le Seigneur, nous l'avons adoré à travers sa présence dans l'Eucharistie, nous avons offert son saint Sacrifice. Nous avons médité sur cet acte décisif d'amour à travers lequel Jésus, dans la dernière Cène, anticipe sa mort, l'accepte au plus profond de son être et la transforme en acte d'amour, dans cette révolution qui, seule, est véritablement capable de renouveler le monde et de libérer l'homme, en l'emportant sur la puissance du péché et de la mort. Je vous demande, chers jeunes, et à vous tous, chers frères et soeurs ici présents, et je demande à toute la bien-aimée Eglise de Rome, en particulier aux âmes consacrées, provenant notamment des monastères de clôture, d'être assidus dans la prière, spirituellement  unis à Marie, notre Mère, d'adorer le Christ vivant dans l'Eucharistie, de l'aimer toujours plus, Lui, qui est notre frère et véritable ami, l'Epoux de l'Eglise, le Dieu fidèle et miséricordieux qui nous a aimés en premier. Ainsi, vous, chers jeunes, serez prêts  et  disponibles à accueillir son appel, s'Il vous veut entièrement pour lui, dans le sacerdoce ou dans la vie consacrée.

 

 

15 aout 2006 – Homélie de la Messe à Castelgandolfo

     En voyant le visage de Marie, nous pouvons voir, plus que par d'autres moyens, la beauté de Dieu, sa bonté, sa miséricorde. Nous pouvons réellement percevoir la lumière divine dans ce visage.

 

 

1er septembre 2006 – Sanctuaire de la Sainte Face de Manopello

     Religieux et religieuses, …que chacune de vos activités soit un reflet visible de la bonté et de la miséricorde divine.

 

 

9 octobre 2006 – Aux Evêques du Canada-Occidental en Visite Ad Limina

     "Il fallait bien festoyer et se réjouir [...] il est revenu à la vie; il était perdu et il est retrouvé" (Lc 15, 32)….

     La parabole du fils prodigue est l'un des passages les plus appréciés de l'Ecriture Sainte. Sa profonde illustration de la Miséricorde de Dieu et l'important désir humain de conversion et de réconciliation, ainsi que la restauration des relations brisées, parlent aux hommes et aux femmes de tout âge. La tentation de l'homme d'exercer sa liberté en prenant de la distance par rapport à Dieu est fréquente. Or l'expérience du fils prodigue nous fait constater à la fois dans l'histoire et dans nos propres vies que, lorsque la liberté est recherchée en dehors de Dieu, le résultat est négatif : perte de la dignité personnelle, confusion morale et désintégration sociale. Cependant, l'amour passionné du Père pour l'humanité est vainqueur de l'orgueil humain. Prodigué gratuitement, c'est un amour qui pardonne et qui conduit les personnes à entrer plus profondément dans la communion de l'Eglise du Christ. Il offre vraiment pour tous les peuples l'unité en Dieu et, comme cela est parfaitement manifesté par le Christ sur la Croix, il réconcilie justice et amour (cfr Deus caritas est, n. 10). …

 

     La perte du sens du péché, cette priorité pastorale reflète l'espérance ardente que les fidèles fassent l'expérience de l'amour infini de Dieu comme un appel à renforcer leur unité ecclésiale et à surmonter la division et la fragmentation qui, si souvent, blessent les familles et les communautés d'aujourd'hui. De ce point de vue, la responsabilité de l'Evêque d'indiquer la présence destructrice du péché est déjà envisagée comme un service d'espérance: elle renforce les croyants afin qu'ils évitent le mal et choisissent la perfection de l'amour et la plénitude de la vie chrétienne. Je désire donc louer votre promotion du sacrement de la Pénitence. Tandis que ce sacrement est souvent considéré avec indifférence, ce qu'il produit est précisément la plénitude de la guérison à laquelle nous aspirons. Une appréciation renouvelée de ce Sacrement confirmera que le temps passé au confessionnal sépare le mal du bien, fait renaître la vie après la mort et révèle à nouveau le visage miséricordieux du Père.

    

 

 

 

 

19 octobre 2006 – Discours au Congrès de l’Eglise Italienne, à Verona

     La personne humaine n'est, d'autre part, pas uniquement raison et intelligence, même si elles sont des éléments constitutifs de celle-ci. La personne humaine porte en elle-même, inscrit au plus profond de son être, le besoin d'amour, d'être aimée et d'aimer à son tour. C'est pourquoi elle s'interroge, et souvent s'égare devant les difficultés de la vie, devant le mal qui existe dans le monde et qui apparaît si fort et, dans le même temps, radicalement privé de signification. A notre époque en particulier, malgré tous les progrès accomplis, le mal n'est absolument pas vaincu ; au contraire, son pouvoir semble se renforcer et l'on a tôt fait de démasquer toutes les tentatives de le cacher, ainsi que le démontre à la fois l'expérience quotidienne et les grands événements historiques. La question de savoir si dans notre vie il peut exister un espace sûr pour l'amour authentique et en dernière analyse, si le monde est vraiment l'œuvre de la sagesse de Dieu, se repose donc avec insistance. Ici, bien plus que tous les raisonnements humains, vient à notre secours la nouveauté bouleversante de la révélation biblique : le Créateur du ciel et de la terre, l'unique Dieu qui est la source de tout être, cet unique Logos créateur, cette raison créatrice, sait aimer personnellement l'homme, plus encore il l'aime passionnément et il veut être à son tour aimé. Cette raison créatrice, qui dans le même temps est amour, donne pour cela vie à une histoire d'amour avec Israël, son peuple, et au cours de cette longue histoire, face aux trahisons du peuple, son amour se démontre riche d'une inépuisable fidélité et miséricorde, c'est l'amour qui pardonne au-delà de toute limite. En Jésus Christ, une telle attitude parvient à sa forme extrême, inouïe et dramatique : en Lui, en effet, Dieu se fait l'un d'entre nous, notre frère en humanité, et il va même jusqu'à sacrifier sa vie pour nous. Dans la mort sur la Croix - apparemment le plus grand mal de l'histoire - s'accomplit donc «le retournement de Dieu contre lui-même, dans lequel il se donne pour relever l'homme et le sauver - tel est l'amour dans sa forme la plus radicale», dans lequel se manifeste ce que signifie «Dieu est Amour» (1 Jn 4, 8) et l'on comprend également ce que l'on doit définir comme l'amour authentique (cf. Enc. Deus Caritas Est, 9-10 et 12)…

 

      C'est précisément parce qu'il nous aime véritablement que Dieu respecte et sauve notre liberté. Au pouvoir du mal et du péché, il n'oppose pas un pouvoir plus grand mais - comme nous l'a dit notre bien-aimé Pape Jean-Paul II dans l'Encyclique Dives in Misericordia et, une dernière fois, dans son livre Mémoire et identité, son véritable testament spirituel - il préfère mettre la limite de sa patience et de sa miséricorde, cette limite qui est, concrètement, la souffrance du Fils de Dieu.

 

 

19 octobre 2006 – Homélie de la Messe dans le stade de Verona

    La Résurrection du Christ (est) un événement qui a régénéré les croyants à une espérance vivante, comme l'exprime l'Apôtre Paul au début de sa Première Lettre. …. En tant que son successeur, je m'exclame moi aussi avec joie : «Béni soit Dieu, le Père de Jésus Christ notre Seigneur» (1 P 1, 3), car à travers la Résurrection de son Fils, il nous a régénérés et, dans la foi, il nous a donné une espérance invincible dans la vie éternelle, de sorte que nous vivons dans le présent toujours tendus vers l'objectif, qui est la rencontre finale avec notre Seigneur et Sauveur. Forts de cette espérance, nous n'avons pas peur des épreuves, qui, bien que douloureuses et difficiles, ne peuvent jamais entacher la joie profonde qui dérive du fait d'être aimé de Dieu. Dans sa miséricorde providentielle, il a donné son Fils pour nous et nous, sans le voir, nous croyons en Lui et nous L'aimons (cf. 1 P 1, 3-9). Son amour nous suffit.

 

 

1er novembre 2006 – Angelus

     L'homme moderne attend-il encore cette vie éternelle, ou bien considère-t-il qu'elle appartient à une mythologie désormais dépassée? A notre époque, plus que par le passé, nous sommes tellement occupés par les choses terrestres, qu'il est parfois difficile de penser à Dieu comme le protagoniste de l'histoire et de notre vie elle-même. Toutefois, par sa nature, l'existence humaine est tendue vers quelque chose de plus grand, qui la transcende; le désir de justice, de vérité, et de bonheur complet inscrit dans l'être humain est irrépressible. Face à l'énigme de la mort, sont présents chez de nombreuses personnes le désir et l'espérance de retrouver leurs proches dans l'au-delà. De même qu'il existe la profonde conviction d'un jugement dernier qui rétablisse la justice, et l'attente d'une confrontation finale dans laquelle chacun reçoive ce qui lui est dû.

     La "vie éternelle", pour nous, chrétiens, n'indique cependant pas une vie qui dure pour toujours, mais une nouvelle qualité de vie, pleinement plongée dans l'amour de Dieu, qui libère du mal et de la mort et nous place dans une communion sans fin avec tous les frères et les soeurs qui participent du même Amour. C'est pourquoi l'éternité peut être déjà présente au centre de la vie terrestre et temporelle, lorsque l'âme, à travers la grâce, est unie à Dieu, à son fondement ultime. Tout passe, seul Dieu reste immuable. Un Psaume dit:  "Et ma chair et mon coeur sont consumés:  roc de mon coeur, ma part, Dieu à jamais!" (Ps 73 [72], 26). Tous les chrétiens, appelés à la sainteté, sont des hommes et des femmes qui vivent solidement ancrés à ce "Roc"; ils ont les pieds sur terre, mais le coeur déjà au Ciel, demeure définitive des amis de Dieu.

     Chers frères et soeurs, méditons sur ces réalités l'âme tournée vers notre destin ultime et définitif, qui donne un sens aux situations quotidiennes. Ravivons le sentiment joyeux de la communion des saints et laissons-nous attirer vers le but de notre existence:  la rencontre face-à-face avec Dieu. Prions afin que cela soit l'héritage de tous les fidèles défunts, non seulement de nos proches, mais également de toutes les âmes, en particulier celles qui sont le plus oubliées et qui ont besoin de la miséricorde divine.

 

 

 

 

7 novembre 2006 – Homélie de la Messe avec les Evêques de Suisse- Chapelle Redemptoris Mater, au Vatican

     Nous devrions donc nous demander : Que signifie tout cela pour nous ? Cela signifie avant tout une certitude : Dieu n'échoue pas. Il "échoue" continuellement, mais précisément pour cela, il n'échoue pas, car il en tire de nouvelles opportunités de Miséricorde plus grande, et son imagination est inépuisable. Il n'échoue pas car il trouve toujours de nouveaux moyens d'atteindre les hommes et d'ouvrir davantage sa grande maison, afin qu'elle se remplisse complètement. Il n'échoue pas car il ne se soustrait pas à la perspective de solliciter les hommes afin qu'ils viennent s'asseoir à sa table, à prendre la nourriture des pauvres, dans laquelle est offert le don précieux, Dieu lui-même. Dieu n'échoue pas, pas même aujourd'hui. Même si nous entendons de nombreux "non", nous pouvons en être certains. De toute cette histoire de Dieu, à partir d'Adam, nous pouvons conclure: Il n'échoue pas. Aujourd'hui aussi, il trouvera de nouvelles voies pour appeler les hommes et il veut que nous soyons à ses côtés comme ses messagers et ses serviteurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2007

 

10 février 2007 - A la Confédération Nationale "Misericordie" et donneurs de sang

     Combien il est nécessaire qu'aujourd'hui aussi, en particulier à notre époque marquée par de nombreux défis humains et spirituels, les chrétiens proclament à travers les œuvres l'amour miséricordieux de Dieu!

 

11 février 2007 - Message pour la Journée Mondiale du Malade

     Je m'adresse à vous, chers frères et sœurs qui souffrez de maladies incurables ou en phase terminale. Je vous encourage à contempler les souffrances du Christ crucifié et, en union avec Lui, à vous adresser au Père avec une confiance totale dans le fait que toute la vie, et la vôtre en particulier, est entre ses mains. Sachez que vos souffrances, unies à celles du Christ, se révéleront fécondes pour les besoins de l'Eglise et du monde. Je demande au Seigneur de renforcer votre foi dans Son amour, en particulier au cours de ces épreuves que vous affrontez. Je forme le vœu que, partout où vous êtes, vous trouverez toujours l'encouragement et la force spirituelle nécessaires pour nourrir votre foi et vous conduire plus près du Père de la Vie. A travers ses prêtres et ses collaborateurs pastoraux, l'Eglise désire vous assister et être à vos côtés, en vous aidant à l'heure du besoin et en manifestant ainsi la miséricorde pleine d'amour du Christ envers ceux qui souffrent.
 

 

 

18 février 2007 - Angélus
      « Aimez vos ennemis » (Lc 6, 27).  Jésus prononça ces paroles en Galilée, au début de sa vie publique, comme un « manifeste » présenté à tous, pour lequel il demande l'adhésion de ses disciples, en leur proposant son modèle de vie, en termes radicaux. Mais quel est le sens de cette parole ? Pourquoi Jésus demande-t-il d'aimer ses ennemis, soit un amour qui dépasse les capacités humaines ? En réalité, la proposition du Christ est réaliste car elle tient compte du fait que dans le monde il existe trop de violence, trop d'injustice, et que par conséquent on ne peut dépasser cette situation qu'en lui opposant un plus d'amour, un plus de bonté. Ce plus vient de Dieu : c'est sa miséricorde, qui s'est faite chair en Jésus et qui seule peut « déséquilibrer » le monde du mal vers le bien, à partir de ce « monde » petit et décisif qu'est le cœur de l'homme.
 

     Cet Evangile est à juste titre considéré comme la grande charte de la non-violence chrétienne, qui ne consiste pas à se résigner au mal - selon une fausse interprétation du « tendre l'autre joue » (cf. Lc 6, 29), mais à répondre au mal par le bien (cf. Rm 12, 17-21), en brisant ainsi la chaîne de l'injustice. On comprend alors que la non-violence pour les chrétiens n'est pas un simple comportement tactique, mais bien une manière d'être de la personne, l'attitude de celui qui est tellement convaincu de l'amour de Dieu et de sa puissance qu'il n'a pas peur d'affronter le mal avec les seules armes de l'amour et de la vérité. L'amour de l'ennemi constitue le noyau de la « révolution chrétienne », une révolution qui n'est pas basée sur des stratégies de pouvoir économique, politique ou médiatique. La révolution de l'amour, un amour qui ne s'appuie pas en définitive sur les ressources humaines, mais qui est don de Dieu et s'obtient en faisant confiance uniquement et sans réserve à sa bonté miséricordieuse. Voilà la nouveauté de l'Evangile, qui change le monde sans faire de bruit. Voilà l'héroïsme des « petits », qui croient en l'amour de Dieu et le répandent même au prix de leur vie.
 

     Le Carême, qui commencera mercredi prochain avec le rite des Cendres, est le temps favorable au cours duquel tous les chrétiens sont invités à se convertir toujours plus profondément à l'amour du Christ. Demandons à la Vierge Marie, disciple docile du Rédempteur, de nous aider à nous laisser conquérir sans réserve par cet amour, à apprendre à aimer comme Il nous a aimés, pour être miséricordieux comme est miséricordieux notre Père qui est aux cieux (cf. Lc 6, 36).

 

21 février 2007 – Homélie Messe Mercredi des Cendres

        "Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les pleurs et les cris de deuil". C'est par ces paroles que débute la Première Lecture, tirée du livre du prophète Joël (2, 12). Les souffrances, les catastrophes qui affligeaient à cette époque la terre de Judée poussent l'auteur saint à encourager le peuple élu à la conversion, c'est-à-dire à retourner avec une confiance filiale au Seigneur en se lacérant le cœur et non les vêtements. En effet, Celui-ci, rappelle le prophète, "est tendresse et pitié, lent à la colère, riche en grâce, et il a regret du mal" (2, 13). L'invitation que Joël adresse à ceux qui l'écoutent vaut également pour nous, chers frères et sœurs. N'hésitons pas à retrouver l'amitié de Dieu perdue avec le péché; en rencontrant le Seigneur, faisons l'expérience de la joie de son pardon. Et ainsi, en répondant presque aux paroles du prophète, nous avons fait nôtre l'invocation du refrain du Psaume responsorial:  "Pardonne-nous, Seigneur, nous avons péché". En proclamant le Psaume 50, le grand Psaume pénitentiel, nous en avons appelé à la miséricorde divine; nous avons demandé au Seigneur que la puissance de son amour nous redonne la joie d'être sauvés.

 

 

Message pour le Carême 2007
     Le Tout-puissant attend le « oui » de sa créature comme un jeune marié celui de sa promise. Malheureusement, dès les origines, l'humanité, séduite par les mensonges du Malin, s'est fermée à l'amour de Dieu, dans l'illusion d'une impossible autosuffisance (Jn 3, 1-7). En se repliant sur lui-même, Adam s'est éloigné de cette source de la vie qu'est Dieu lui-même, et il est devenu le premier de « ceux qui, leur vie entière, étaient tenus en esclavage par la crainte de la mort » (Hb 2, 15). Dieu, cependant, ne s'est pas avoué vaincu, mais au contraire, le « non » de l'homme a été comme l'impulsion décisive qui l'a conduit à manifester son amour dans toute sa force rédemptrice…

 

     C'est dans le mystère de la Croix que se révèle pleinement la puissance irrésistible de la miséricorde du Père céleste….

 

     Regardons le Christ transpercé sur la Croix ! Il est la révélation la plus bouleversante de l'amour de Dieu, un amour dans lequel eros et agape, loin de s'opposer, s'illuminent mutuellement. Sur la Croix c'est Dieu lui-même qui mendie l'amour de sa créature : Il a soif de l'amour de chacun de nous…

 

     Seul l'amour dans lequel s'unissent le don désintéressé de soi et le désir passionné de réciprocité, donne une ivresse qui rend légers les sacrifices les plus lourds. Jésus a dit : « Quand je serai élevé de terre, j'attirerai à moi tous les hommes. » (Jn 12, 32). La réponse que le Seigneur désire ardemment de notre part est avant tout d'accueillir son amour et de se laisser attirer par lui. Accepter son amour, cependant, ne suffit pas. Il s'agit de correspondre à un tel amour pour ensuite s'engager à le communiquer aux autres : le Christ « m'attire à lui » pour s'unir à moi, pour que j'apprenne à aimer mes frères du même amour.

 

 

     Le sang et l'eau.
     « Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé ». Regardons avec confiance le côté transpercé de Jésus, d'où jaillissent « du sang et de l'eau » (Jn 19, 34) ! Les Pères de l'Église ont considéré ces éléments comme les symboles des sacrements du Baptême et de l'Eucharistie. Avec l'eau du Baptême, grâce à l'action du Saint Esprit, se dévoile à nous l'intimité de l'amour trinitaire. Pendant le chemin du Carême, mémoire de notre Baptême, nous sommes exhortés à sortir de nous-mêmes pour nous ouvrir, dans un abandon confiant, à l'étreinte miséricordieuse du Père (cf. saint Jean Chrysostome, Catéchèses 3,14). Le sang, symbole de l'amour du Bon Pasteur, coule en nous tout spécialement dans le mystère eucharistique : « L'Eucharistie nous attire dans l'acte d'offrande de Jésus... nous sommes entraînés dans la dynamique de son offrande » (Encyclique Deus caritas est, 13). Nous vivons alors le Carême comme un temps « eucharistique », dans lequel, en accueillant l'amour de Jésus, nous apprenons à le répandre autour de nous dans chaque geste et dans chaque parole.

 

25 février 2007 - Angelus

     En contemplant le Crucifié avec les yeux de la foi nous pouvons comprendre en profondeur ce qu'est le péché, combien sa gravité est tragique, et dans le même temps, l'incommensurabilité de la puissance du pardon et de la miséricorde du Seigneur. …. En regardant le Christ, sentons dans le même temps son regard posé sur nous. Celui que nous avons nous-mêmes transpercé par nos fautes, ne se lasse pas de reverser sur le monde un torrent inépuisable d'amour miséricordieux. Puisse l'humanité comprendre que l'on ne peut puiser que de cette source l'énergie spirituelle indispensable pour construire la paix et le bonheur dont tout être humain est en quête sans relâche.

 

11 mars 2007 – Après l’Angelus, aux francophones

     Le temps du Carême nous révèle l'amour patient et miséricordieux que le Seigneur a pour nous, et il nous appelle aussi à nous réveiller, à nous convertir, pour porter du fruit et pour répondre avec générosité aux attentes de Dieu.

 

11 mars 2007 – Après l’Angelus, aux polonais

     L'examen de conscience est nécessaire pour connaître l'état d'âme, l'humilité pour reconnaître la faute, la foi dans la miséricorde pour demander pardon à Dieu et aux frères et l'amour pour adhérer de nouveau à la vérité, au bien et au beau.

 

25 mars 2007 - Angelus

        « Je suis la servante du Seigneur ; qu'il m'advienne selon ta parole ! ». La réponse de Marie à l'Ange se prolonge dans l'Eglise, appelée à rendre le Christ présent dans l'histoire, en donnant sa propre disponibilité afin que Dieu puisse continuer à visiter l'humanité par sa miséricorde.

 

15 avril 2007 – Homélie Messe 80 ans du Saint-Père Benoit XVI

     Le Saint-Père Jean-Paul II a voulu que soit célébrée en ce dimanche d’après Pâques, la fête de la Miséricorde divine : dans le mot « miséricorde », il trouvait le résumé et l'interprétation nouvelle pour notre temps de tout le mystère de la Rédemption. Il a vécu sous deux régimes dictatoriaux, et, en contact avec la pauvreté, le besoin, et la violence, il a fait l'expérience profonde de la puissance des ténèbres, qui est installée dans le monde également à notre époque. Mais il a aussi fait l'expérience, et pas moins fortement, de la présence de Dieu qui s'oppose à toutes ces forces par son pouvoir totalement différent et divin : le pouvoir de la Miséricorde. C'est la Miséricorde qui met une limite au mal. En elle s'exprime la nature particulière de Dieu - sa sainteté, le pouvoir de la vérité et de l'amour. Il y a maintenant deux ans, après les premières vêpres de cette fête, Jean-Paul II achevait son existence terrestre. En mourant, il est entré dans la lumière de la Miséricorde divine, dont il nous parle maintenant, au-delà de la mort, et à partir de Dieu, de façon tout à fait nouvelle. Ayez confiance, nous dit-il, dans la Miséricorde divine ! Devenez jour après jour des hommes et des femmes de la Miséricorde de Dieu ! La Miséricorde est le vêtement de lumière que le Seigneur nous a donné au baptême. Nous ne devons pas laisser cette lumière s'éteindre. Au contraire, elle doit grandir en nous chaque jour et apporter ainsi au monde la joyeuse annonce de Dieu.

 

      Le Seigneur souffle sur ses disciples. Il leur accorde son Esprit - l'Esprit saint : « A qui vous remettrez les péchés, il leur seront remis... ». L'Esprit de Jésus Christ est puissance de pardon. Il est puissance de la Miséricorde divine. De là la possibilité de recommencer « da capo » - toujours de nouveau. L'amitié de Jésus Christ est l'amitié de Celui qui fait de nous des personnes qui pardonnent, de Celui qui nous pardonne aussi à nous, nous relève continuellement de notre faiblesse et nous éduque ainsi, répand en nous la conscience du devoir intérieur de l'amour, du devoir de correspondre à sa confiance par notre fidélité.

 

    Il est accordé à l’Apôtre Thomas de toucher les blessures de Jésus, et ainsi il le reconnaît - il le reconnaît au-delà de l'identité humaine de Jésus de Nazareth, dans son identité véritable, son identité la plus profonde : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (Jn 20, 28). Le Seigneur a emporté avec lui ses blessures dans l'Eternité. Il est un Dieu blessé ; il s'est laissé blesser par son amour pour nous. Ses blessures sont pour nous le signe qu'Il nous comprend et qu'Il se laisse blesser par son amour pour nous. Ces blessures qui sont les siennes, comme nous pouvons les toucher dans l'histoire de notre temps ! En effet, Il se laisse toujours de nouveau blesser pour nous. Quelle certitude de sa Miséricorde et quelle consolation ne signifient-elles pas pour nous ! Et quelle sécurité ne nous donnent-elles pas sur ce qu'Il est : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Et combien ne constituent-elles pas pour nous un devoir de nous laisser blesser à notre tour par Lui !

 

29 avril 2007 – Homélie Messe ordinations Sacerdotales à Saint Pierre de Rome

      Le sacrement de l'ordre, que vous allez recevoir, vous fera participer à la même mission que le Christ ; vous serez appelés à répandre la semence de sa Parole, la semence qui contient en elle le Royaume de Dieu, à dispenser la divine miséricorde et à nourrir les fidèles à la table de son Corps et de son Sang.

 

16 septembre 2007 - Angélus
     C'est beau de penser que dans le monde entier, partout où la communauté chrétienne se rassemble pour célébrer l'Eucharistie du dimanche, résonne en ce jour cette Bonne Nouvelle de vérité et de salut : Dieu est Amour miséricordieux. L'évangéliste Luc a réuni dans ce chapitre trois paraboles sur la Miséricorde divine : les deux plus brèves, qu'il possède en commun avec Matthieu et Marc, sont celles de la brebis perdue et de la pièce de monnaie perdue ; la troisième, plus longue, plus développée et propre à lui seul, est la célèbre parabole du Père miséricordieux, dite habituellement du « fils prodigue ». Dans ce passage de l'Evangile, on a presque l'impression d'entendre la voix de Jésus qui nous révèle le Visage de son Père et de notre Père. Au fond, c'est pour cela qu'Il est venu dans le monde : pour nous parler du Père ; pour nous le faire connaître, à nous, enfants égarés, et ressusciter en nos cœurs la joie de lui appartenir, l'espérance d'être pardonnés et de retrouver notre pleine dignité, le désir d'habiter pour toujours dans sa maison, qui est également notre maison.

     Jésus a raconté les trois paraboles de la Miséricorde parce que les pharisiens et les scribes le critiquaient, voyant qu'il laissait les pécheurs s'approcher de lui et qu'il mangeait même avec eux (cf. Lc 15, 1-3). Il a alors expliqué, avec son langage typique, que Dieu ne veut pas que même un seul de ses enfants ne se perde, et que son âme déborde de joie lorsqu'un pécheur se convertit. La vraie religion consiste alors à entrer en harmonie avec ce Cœur « riche en Miséricorde », qui nous demande d'aimer toutes les personnes, même les plus éloignées et les personnes ennemies, en imitant le Père céleste qui respecte la liberté de chacun et attire toute personne à lui avec la force invincible de sa fidélité. C'est le chemin que Jésus indique à ceux qui veulent être ses disciples : « Ne jugez pas... ne condamnez pas... remettez et il vous sera remis. Donnez, et l'on vous donnera.... Montrez-vous compatissant comme votre Père est compatissant » (Lc 6, 36-38). Dans ces paroles nous trouvons des indications très concrètes pour notre attitude quotidienne de croyant.

     A notre époque, l'humanité a besoin que l'on proclame avec force la Miséricorde de Dieu et qu'on en témoigne. Le bien-aimé Jean-Paul II, qui fut un grand apôtre de la divine Miséricorde, a eu l'intuition de cette urgence pastorale, de manière prophétique. Il a dédié sa deuxième Encyclique au Père miséricordieux, et tout au long de son pontificat il s'est fait missionnaire de l'amour de Dieu à toutes les nations. Après les tragiques événements du 11 septembre 2001 qui ont obscurci l'aube du troisième millénaire, il a invité les chrétiens et les hommes de bonne volonté à croire que la Miséricorde de Dieu est plus forte que tout mal, et que le salut du monde ne se trouve que dans la Croix du Christ.

     Que la Vierge Marie, Mère de Miséricorde, nous obtienne le don de toujours mettre notre confiance dans l'amour de Dieu et nous aide à être miséricordieux comme notre Père qui est aux cieux.
 

    16 septembre 2007 – Après l’Angélus, aux francophones
     Puissiez-vous contempler le Visage miséricordieux de notre Père des cieux, que Jésus nous présente dans la parabole du Fils prodigue. Ainsi, vous serez poussés à vous tourner avec toujours plus de confiance vers Dieu, notamment par le sacrement de la Réconciliation, que je vous invite à pratiquer régulièrement.

 

 

 

 

 

 

2008

 21 janvier 2008 – Lettre aux Romains sur l’éducation

     Seule une espérance fiable peut être l'âme de l'éducation, comme de la vie tout entière. Aujourd'hui notre espérance est assiégée de toutes parts et nous risquons de redevenir nous aussi, comme les païens d'autrefois, des hommes "sans espérance et sans Dieu dans ce monde", comme l'écrivait l'Apôtre Paul aux chrétiens d'Ephèse (Ep 2, 12). C'est ici précisément que naît la difficulté peut-être la plus profonde pour une véritable œuvre éducative:  à la racine de la crise de l'éducation se trouve, en effet, une crise de confiance dans la vie.

     Je ne peux donc pas terminer cette lettre sans une chaleureuse invitation à placer en Dieu notre espérance. Lui seul est l'espérance qui résiste à toutes les déceptions; seul son amour ne peut pas être détruit par la mort; seules sa justice et sa miséricorde peuvent panser les injustices et récompenser les souffrances subies. L'espérance qui s'adresse à Dieu n'est jamais une espérance pour moi seul, c'est toujours aussi une espérance pour les autres:  elle ne nous isole pas, mais nous rend solidaires dans le bien, nous stimule à nous éduquer réciproquement à la vérité et à l'amour.

    

 

2 avril 2008 – Hmélie de la Messe pour le 3ème anniversaire de la mort de Jean Paul II

     Le serviteur de Dieu Jean-Paul II avait connu et vécu personnellement les terribles tragédies du XX siècle, et il se demanda pendant longtemps ce qui pouvait freiner la montée du mal. La réponse ne pouvait se trouver que dans l'amour de Dieu. Seule la divine Miséricorde est en effet en mesure d'imposer une limite au mal; seul l'amour tout-puissant de Dieu peut vaincre la violence des méchants et le pouvoir destructeur de l'égoïsme et de la haine. C'est pourquoi, au cours de sa dernière visite en Pologne, revenant dans sa terre natale, il dit:  "Il n'y a pas d'autre source d'espérance pour l'homme que la miséricorde de Dieu" (ibid.).

 

 

5 avril 2008 - Au Congrès "De l'huile sur les blessures de l'avortement et du divorce"
     C'est avec une grande joie que je vous rencontre à l'occasion du congrès international « L'huile sur les blessures : une réponse aux blessures de l'avortement et du divorce », organisé par l'Institut pontifical Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille, en collaboration avec les Chevaliers de Colomb. Je me réjouis avec vous du sujet qui fait l'objet de vos réflexions durant ces journées, tant il est actuel et complexe, et en particulier pour la référence à la parabole du bon samaritain (Lc 10, 25-37), que vous avez choisi comme clé pour aborder les blessures de l'avortement et du divorce, qui comportent tant de souffrances dans la vie des personnes, des familles et de la société. Oui, de nos jours les hommes et les femmes se trouvent parfois réellement dépouillés et blessés, aux marges des chemins que nous parcourons, souvent sans que personne n'écoute leur appel à l'aide et ne s'approche de leur peine, pour la soulager et la guérir. Dans le débat, souvent purement idéologique, une espèce de conjuration du silence se crée à leur égard. Ce n'est que dans l'attitude de l'amour miséricordieux que l'on peut se rapprocher des victimes pour leur porter secours et leur permettre de se relever et de reprendre le chemin de l'existence.

     Dans un contexte culturel marqué par un individualisme grandissant, par l'hédonisme et, trop souvent également, par un manque de solidarité et de soutien social approprié, la liberté humaine, face aux difficultés de la vie, est amenée dans sa fragilité à prendre des décisions contraires à l'indissolubilité du pacte conjugal et au respect dû à la vie humaine à peine conçue et encore protégée dans le sein maternel. Le divorce et l'avortement sont des choix de nature certes différentes, parfois faits dans des circonstances difficiles et dramatiques, qui comportent souvent des traumatismes et qui sont à l'origine de souffrances profondes pour ceux qui les font. Ils font aussi des victimes innocentes : l'enfant à peine conçu et pas encore né, les enfants impliqués dans la rupture des liens familiaux. Tous gardent des blessures qui marquent leur vie de façon indélébile. Le jugement éthique de l'Eglise à l'égard du divorce et de l'avortement est clair et connu de tous : il s'agit de fautes graves qui, dans une mesure différente et exception faite de l'évaluation des responsabilités subjectives, lèsent la dignité de la personne humaine, entraînent une profonde injustice dans les rapports humains et sociaux et offensent Dieu lui-même, garant du pacte conjugal et auteur de la vie. Et cependant l'Eglise, sur l'exemple de son Maître Divin, a toujours face à elle les personnes concrètes, surtout les plus faibles et les plus innocentes, qui sont victimes des injustices et des péchés, et également ces autres hommes et femmes qui, ayant commis ces actes, sont entachés de leurs fautes et en portent les blessures intérieures, cherchant la paix et la possibilité d'une reprise.

     L'Eglise a comme premier devoir de se rapprocher de ces personnes avec amour et délicatesse, avec égard et attention maternelle, pour annoncer la proximité miséricordieuse de Dieu en Jésus Christ. C'est en effet lui, comme nous l'enseignent les Pères, le véritable bon samaritain, qui s'est fait notre prochain, qui verse l'huile et le vin sur nos blessures et qui nous conduit à l'auberge, l'Eglise, dans laquelle il nous fait soigner, en nous confiant à ses ministres et en payant en personne à l'avance pour notre guérison. Oui, l'Evangile de l'amour et de la vie est toujours également l'Evangile de la Miséricorde, qui s'adresse à l'homme concret et pécheur que nous sommes, pour le relever après toutes ses chutes, pour le guérir de toutes ses plaies. Mon bien-aimé prédécesseur, le serviteur de Dieu Jean-PauI Il, dont nous venons de célébrer le troisième anniversaire de la mort, dit à l'occasion de l'inauguration du nouveau sanctuaire de la divine miséricorde à Cracovie : «Il n'existe pas pour l'homme d'autre source d'espérance en dehors de la miséricorde de Dieu » (17 août 2002). A partir de cette miséricorde l'Eglise nourrit une confiance énorme dans l'homme et dans sa capacité à se relever. Elle sait que, avec l'aide de la grâce, la liberté humaine est capable du don de soi définitif et fidèle, qui rend possible le mariage d'un homme et d'une femme comme pacte indissoluble, que la liberté humaine, même dans les circonstances les plus difficiles, est capable de gestes extraordinaires de sacrifice et de solidarité pour accueillir la vie d'un nouvel être humain. On peut ainsi voir que les « non » que l'Eglise prononce dans ses indications morales et sur lesquels l'attention de l'opinion publique s'arrête de façon unilatérale, sont en réalité des grands « oui » à la dignité de la personne humaine, à sa vie et à sa capacité d'aimer. Ils sont l'expression de la confiance constante que, malgré leur faiblesse, les êtres humains sont en mesure de répondre à la vocation la plus haute pour laquelle ils ont été créés : celle d'aimer.

     A cette même occasion, Jean-Paul II poursuivait : « Il faut transmettre au monde ce feu de la miséricorde. Dans la miséricorde de Dieu, le monde trouvera la paix » (ibid.). Ici se greffe la grande tâche des disciples du Seigneur Jésus, qui se trouvent des compagnons de route dans les nombreux frères, hommes et femmes de bonne volonté. Leur programme, le programme du bon samaritain, est « un coeur qui voit. Ce coeur voit où l'amour est nécessaire et il agit en conséquence » (Encyclique Deus caritas est, 31). En ces jours de réflexion et de dialogue, vous vous êtes penchés sur les victimes touchées par les blessures du divorce et de l'avortement. Vous avez avant tout constaté les souffrances, parfois traumatisantes, qui touchent les « enfants du divorce », marquant leur vie jusqu'à rendre beaucoup plus difficile leur chemin. Quand se rompt le pacte conjugal, ceux qui en souffrent par dessus tout sont inévitablement les enfants, qui sont le signe vivant de son indissolubilité. L'attention solidaire et pastorale devra donc faire en sorte que les enfants ne soient pas les victimes innocentes des conflits des parents qui divorcent, et que soit assurée dans la mesure du possible la continuité du lien avec leurs parents et aussi ce rapport avec leurs origines familiales et sociales indispensable à une croissance équilibrée, psychologique autant qu'humaine.

     Vous avez aussi porté votre attention sur le drame de l'avortement, qui laisse des marques profondes, parfois indélébiles sur la femme qui l'accomplit et sur les personnes qui l'entourent, et qui provoque des conséquences dévastatrices dans la famille et dans la société, notamment par la mentalité matérialiste de mépris de la vie qu'il entretient. Combien de complicités égoïstes sont souvent à la racine d'une décision douloureuse que tant de femmes ont dû affronter seules et dont elles gardent une blessure dans l'âme jamais cicatrisée ! Bien que ce qui s'est produit demeure une grave injustice et ne soit pas en soi remédiable, je fais mienne l'exhortation adressée dans l'Encyclique Evangelium vitae aux femmes qui ont eu recours à l'avortement : « Ne vous laissez pas aller au découragement et ne renoncez pas à l'espérance. Sachez plutôt comprendre ce qui s'est passé et interprétez-le en vérité. Si vous ne l'avez pas encore fait, ouvrez-vous avec humilité et avec confiance au repentir : le Père de toute miséricorde vous attend pour vous offrir son pardon et sa paix dans le sacrement de la réconciliation. [Vous pouvez confier avec espérance votre enfant à ce même Père et à sa miséricorde] » (n.99).

     J'exprime ma profonde appréciation pour toutes les initiatives sociales et pastorales qui visent à la réconciliation et au soin des personnes blessées par le drame de l'avortement et du divorce. Elles constituent, avec tant d'autres formes d'engagement, des éléments essentiels pour la construction de cette civilisation de l'amour, dont l'humanité n'a jamais eu autant besoin qu'aujourd'hui.

     En implorant le Seigneur Dieu miséricordieux, qu'Il vous invite toujours plus à imiter Jésus, bon samaritain, pour que son Esprit vous enseigne à regarder avec un regard neuf la réalité de nos frères qui souffrent, qu'Il vous aide à réfléchir avec de nouveaux critères et vous pousse à agir dans un élan généreux dans la perspective d'une authentique civilisation de l'amour et de la vie.

 

 

9 juin 2008 – Au Congrès du Diocèse de Rome

     Je souhaite souligner cette attitude et ce style avec lesquels celui qui place avant tout son espérance en Dieu travaille et s'engage. C'est en premier lieu une attitude d'humilité, qui ne prétend pas toujours réussir, ou être en mesure de résoudre tous les problèmes avec ses propres forces. Mais c'est également, et pour la même raison, une attitude de grande confiance, de ténacité et de courage:  le croyant sait en effet que, malgré toutes les difficultés et les échecs, sa vie, son travail et l'histoire dans son ensemble sont protégés par le pouvoir indestructible de l'amour de Dieu; qu'ils ne sont jamais pour cela sans fruit et vides de sens. Dans cette perspective, nous pouvons comprendre plus facilement que l'espérance chrétienne vit également dans la souffrance, et même, que c'est justement la souffrance qui éduque et fortifie de manière particulière notre espérance. Nous devons certainement "faire tout ce qui est possible pour atténuer la souffrance:  empêcher, dans la mesure où cela est possible, la souffrance des innocents; calmer les douleurs; aider à surmonter les souffrances psychiques" (Spe salvi, n. 36) et de grands progrès ont été effectivement réalisés, en particulier dans la lutte contre la douleur physique. Nous ne pouvons cependant éliminer complètement la souffrance du monde, parce qu'il n'est pas en notre pouvoir d'en tarir les sources:  la finitude de notre être et le pouvoir du mal et de la faute. De fait, la souffrance des innocents ainsi que les malaises psychiques tendent malheureusement à s'accroître dans le monde. En réalité, l'expérience humaine d'aujourd'hui et de toujours, en particulier l'expérience des saints et des martyrs, confirme la grande vérité chrétienne que ce n'est pas la fuite face à la douleur qui guérit l'homme, mais la capacité à accepter ses souffrances et de grandir en elles, en y trouvant un sens à travers l'union au Christ. C'est dans notre rapport avec la souffrance et avec les personnes souffrantes que se détermine la mesure de notre humanité, pour chacun de nous comme pour la société dans laquelle nous vivons. C'est à la foi chrétienne que revient le mérite historique d'avoir suscité en l'homme, d'une manière nouvelle et à une profondeur nouvelle, la capacité de partager intérieurement la souffrance même de l'autre, qui n'est ainsi plus seul dans sa souffrance, et également de souffrir par amour du bien, de la vérité et de la justice:  tout cela est bien au delà de nos forces, mais devient possible à partir du compatir de Dieu par amour de l'homme dans la passion du Christ.

     Eduquons-nous chaque jour à l'espérance qui fait grandir dans la souffrance. Nous sommes appelés à le faire en premier lieu quand nous sommes personnellement touchés par une maladie grave ou par quelque autre dure épreuve. Mais nous grandirons également dans l'espérance à travers l'aide concrète et la proximité quotidienne à la souffrance des personnes qui nous sont proches ainsi que de notre famille comme de toute autre personne qui est notre prochain, parce que nous l'abordons dans une attitude d'amour. Et encore, nous apprenons à offrir à Dieu riche de miséricorde les petites peines de l'existence quotidienne, en les insérant humblement dans le grand "compatir" de Jésus, dans ce trésor de compassion dont a besoin le genre humain. L'espérance des croyants dans le Christ ne peut, de toutes façons, s'arrêter à ce monde-ci, mais est intrinsèquement orienté vers la communion entière et éternelle avec le Seigneur. C'est pour cela qu'à la fin de mon Encyclique je me suis arrêté sur le Jugement de Dieu comme lieu d'apprentissage et d'exercice de l'espérance. J'ai ainsi tenté, en quelque sorte, de rendre  de  nouveau  familier et compréhensible à l'humanité et à la culture de notre époque le salut qui nous est promis dans le monde au delà de la mort, même si nous ne pouvons pas avoir ici-bas de véritable et propre expérience de ce monde. Pour rendre ses vraies dimensions et sa motivation décisive à l'éducation à l'espérance, nous tous, devons remettre au centre de la proposition de la foi cette grande vérité, qui a ses "prémices" en Jésus Christ ressuscité d'entre les morts (cf. 1 Co 15, 20-23).

 

 

17 juillet 2008 – Accueil des jeunes à Sydney

      Je pense spécialement aux malades ou aux handicapés mentaux, aux jeunes qui sont en prison, à ceux qui connaissent des situations difficiles en marge de nos sociétés et à ceux qui, pour une raison ou une autre se sentent loin de l'Église. À chacun, je dis : Jésus est proche de toi ! Fais l’expérience de son étreinte qui guérit, de sa compassion et de sa miséricorde !

 

 

 

 

 

 

 

2009

 

 

11 février 2009 – Message pour la Journée Mondiale du Malade

     Puisque l'enfant malade appartient à une famille qui partage sa souffrance souvent avec des problèmes et des difficultés graves, les communautés chrétiennes ne peuvent que prendre également en charge l'aide aux cellules familiales frappées par la maladie d'un fils ou d'une fille. A l'exemple du "Bon Samaritain", il faut se pencher sur les personnes si durement éprouvées et leur offrir le soutien d'une solidarité concrète. De cette façon, l'acceptation et le partage de la souffrance se traduit par un soutien concret des familles des enfants malades, en créant chez elles un climat de sérénité et d'espérance, en leur faisant sentir autour d'elles une famille plus vaste de frères et de sœurs en Christ. La compassion de Jésus pour les pleurs de la veuve de Naïm (cf. Lc 7, 12-17) et pour la prière implorante de Jaïre (cf. Lc 8, 41-56), notamment, constituent des points de référence utiles pour apprendre à partager les moments de peine physique et morale de tant de familles éprouvées. Tout cela présuppose un amour désintéressé et généreux, reflet et signe de l'amour miséricordieux de Dieu, qui n'abandonne jamais ses enfants dans l'épreuve, mais leur fournit toujours des ressources admirables de cœur et d'intelligence pour être en mesure de faire face de manière adaptée aux difficultés de la vie.

 

 

11 février 2009 – A l’issue de la Messe pour les malades, Basilique Saint Pierre

     Les enfants malades, sont les créatures les plus faibles et sans défense. C'est vrai! Si l'on reste déjà sans paroles devant un adulte qui souffre, que dire lorsque le mal frappe un petit innocent? Comment percevoir, également dans des situations aussi difficiles, l'amour miséricordieux de Dieu, qui n'abandonne jamais ses enfants dans l'épreuve?

     Ce sont des interrogations fréquentes et parfois inquiétantes, qui en vérité sur le plan simplement humain ne trouvent pas de réponses adaptées, car la douleur, la maladie et la mort demeurent, dans leur signification, insondables pour notre esprit. La lumière de la foi nous vient cependant en aide. La Parole de Dieu nous révèle que ces maux aussi sont mystérieusement "embrassés" par le dessein divin de salut; la foi nous aide à considérer la vie humaine belle et digne d'être vécue en plénitude, même lorsqu'elle est affaiblie par le mal. Dieu a créé l'homme pour le bonheur et pour la vie, alors que la maladie et la mort sont entrées dans le monde comme conséquence du péché. Mais le Seigneur ne nous a pas abandonnés à nous-mêmes; Lui, le Père de la vie, est le médecin par excellence de l'homme et il ne cesse de se pencher avec amour sur l'humanité qui souffre.

 

 

 

 

2010

 

 

 

11 février 2010 – Homélie de la Messe pour les malades

     La Liturgie de la Parole nous présente aujourd'hui deux thèmes principaux:  le premier est à caractère marial et relie l'Evangile et la première lecture, tirée du chapitre final du Livre d'Isaïe, ainsi que le Psaume responsorial, tiré du cantique de louange à Judith. L'autre thème, que nous trouvons dans le passage de la Lettre de Jacques, est celui de la prière de l'Eglise pour les malades et, en particulier, du sacrement qui leur est réservé. Dans la mémoire des apparitions à Lourdes, lieu choisi par Marie pour manifester sa sollicitude maternelle pour les malades, la liturgie fait retentir de façon opportune le Magnificat, le cantique de la Vierge qui exalte les merveilles de Dieu dans l'histoire du salut:  les humbles et les indigents, comme tous ceux qui craignent Dieu, font l'expérience de sa miséricorde, qui renverse les destins terrestres et qui démontre ainsi la sainteté du Créateur et Rédempteur. Le Magnificat n'est pas le cantique de ceux auxquels la fortune sourit qui ont toujours "le vent en poupe"; c'est plutôt l'action de grâce de ceux qui connaissent les drames de la vie, mais qui placent leur confiance dans l'œuvre rédemptrice de Dieu. C'est un chant qui exprime la foi vécue par des générations d'hommes et de femmes, qui ont placé leur espérance en Dieu et qui se sont engagés de manière personnelle, comme Marie, pour venir en aide à leurs frères dans le besoin. Dans le Magnificat, nous entendons la voix de nombreux saints et saintes de la charité, je pense en particulier à ceux qui ont passé leur vie parmi les malades et les personnes souffrantes, comme Camille de Lellis et Jean de Dieu, Damien de Veuster et Benedetto Menni. Ceux qui passent beaucoup de temps aux côtés des personnes souffrantes, connaissent l'angoisse et les larmes, mais également le miracle de la joie, fruit de l'amour.

    

 

18 février 2010 – Rencontre avec les prêtres de Rome

     « Ayant présenté avec une violente clameur et des larmes, des implorations et des supplications » (He 5, 7). Il ne s'agit pas seulement d'une mention de l'heure de l'angoisse sur le Mont des Oliviers, mais c'est un résumé de toute l'histoire de la passion, qui embrasse toute la vie de Jésus. Des larmes: Jésus pleurait devant la tombe de Lazare, il était réellement touché intérieurement par le mystère de la mort, par la terreur de la mort. Des personnes perdent leur frère, comme dans ce cas, leur mère et leur fils, leur ami: tout l'aspect terrible de la mort, qui détruit l'amour, qui détruit les relations, qui est un signe de notre finitude, de notre pauvreté. Jésus est mis à l'épreuve et il se confronte jusqu'au plus profond de son âme avec ce mystère, avec cette tristesse qui est la mort, et il pleure. Il pleure devant Jérusalem, en voyant la destruction de cette belle cité à cause de la désobéissance; il pleure en voyant toutes les destructions de l'histoire dans le monde; il pleure en voyant que les hommes se détruisent eux-mêmes, ainsi que leurs villes dans la violence, dans la désobéissance.

      Jésus pleure, en poussant de grands cris. Les Evangiles nous disent que Jésus a crié de la Croix, il a crié: « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné? » (Mc 15, 34; cf. Mt 27, 46) et, à la fin, il a crié encore une fois. Et ce cri répond à une dimension fondamentale des Psaumes: dans les moments terribles de la vie humaine, de nombreux Psaumes constituent un cri puissant vers Dieu: « Aide-nous, écoute-nous! » Précisément aujourd'hui, dans le bréviaire, nous avons prié dans ce sens: Où es-tu Dieu? « Tu nous traites en bétail de boucherie » (Ps 44, 12). Un cri de l'humanité qui souffre! Et Jésus, qui est le véritable sujet des Psaumes, apporte réellement ce cri de l'humanité à Dieu, aux oreilles de Dieu: « Aide-nous et écoute-nous! ». Il transforme toute la souffrance humaine, en l'assumant en lui-même, en un cri aux oreilles de Dieu.

     Et ainsi, nous voyons que précisément de cette manière se réalise le sacerdoce, la fonction du médiateur, en transportant en soi, en assumant en soi la souffrance et la passion du monde, en la transformant en cri vers Dieu, en l'apportant devant les yeux et entre les mains de Dieu, et en l'apportant réellement ainsi au moment de la Rédemption.

     En réalité, la Lettre aux Hébreux dit qu'« il offrit des implorations et des supplications », « une clameur et des larmes » (5, 7). C'est une juste traduction du verbe prosphèrein, qui est une parole cultuelle et qui exprime l'acte de l'offrande des dons humains à Dieu, qui exprime précisément l'acte de l'offertoire, du sacrifice. Ainsi, avec ce terme cultuel appliqué aux prières et aux larmes du Christ, elle démontre que les larmes du Christ, l'angoisse du Mont des Oliviers, le cri de la Croix, toute sa souffrance font partie de sa grande mission. Précisément de cette manière, Il offre le sacrifice, il fait le prêtre. La Lettre aux Hébreux, avec cet « il offrit », prosphèrein, nous dit: il s'agit de l'accomplissement de son sacerdoce, il conduit ainsi l'humanité vers Dieu, il devient ainsi le médiateur, il fait ainsi le prêtre.

     Disons, précisément, que Jésus n'a pas offert quelque chose à Dieu, mais qu'il s'est offert lui-même et que cet acte de s'offrir lui-même se réalise précisément dans cette compassion, qui transforme en prière et en cri au Père la souffrance du monde. Dans ce sens, notre sacerdoce ne se limite pas lui non plus à l'acte cultuel de la Messe, dans lequel tout est remis entre les mains du Christ, mais toute notre compassion envers la souffrance de ce monde si éloigné de Dieu, est un acte sacerdotal, est prosphèrein, est offrir. C'est pourquoi, il me semble que nous devons comprendre et apprendre à accepter plus profondément les souffrances de la vie pastorale; car précisément là se trouvent l'action sacerdotale, la médiation, le fait d'entrer dans le mystère du Christ, de communiquer avec le mystère du Christ, très réel et essentiel, existentiel et ensuite sacramentel.

     Dans ce contexte, un deuxième terme est important. Il est dit que le Christ – à travers cette obéissance – est rendu parfait, en grec teleiothèis (cf. He 5, 8-9). Nous savons que dans toute la Torah, c'est-à-dire dans toute la législation cultuelle, le mot tèleion, ici utilisé, indique l'ordination sacerdotale. La Lettre aux Hébreux nous dit que c'est précisément en accomplissant cela que Jésus a été fait prêtre, que son sacerdoce s'est réalisé. Notre ordination sacerdotale sacramentelle doit être réalisée et concrétisée de manière existentielle, mais également de manière christologique, précisément dans cette manière de porter le monde avec le Christ et au Christ et, avec le Christ, à Dieu: ainsi nous devenons réellement des prêtres, teleiothèis. Le sacerdoce n'est donc pas quelque chose qui dure quelques heures, mais il se réalise précisément dans la vie pastorale, dans ses souffrances et dans ses faiblesses, dans ses tristesses et naturellement également dans ses joies. Nous devenons ainsi toujours plus des prêtres en communion avec le Christ.

La Lettre aux Hébreux résume, enfin, toute cette compassion dans le mot hypakoèn, obéissance: tout cela est obéissance. C'est un mot qui ne nous plaît pas, à notre époque. L'obéissance apparaît comme une aliénation, comme une attitude servile. La personne n'utilise pas sa liberté, sa liberté se soumet à une autre volonté, la personne n'est donc plus libre, mais elle est déterminée par un autre, alors que l'autodétermination, l'émancipation serait la véritable existence humaine. Au lieu du terme « obéissance », nous voulons comme parole-clef anthropologique celle de « liberté ». Mais en considérant de près ce problème, nous voyons que les deux choses vont de pair: l'obéissance du Christ est la conformation de sa volonté à la volonté du Père; c'est une manière de porter la volonté humaine à la volonté divine, à la conformation de notre volonté avec la volonté de Dieu.

     Saint Maxime le Confesseur, dans son interprétation du Mont des Oliviers, de l'angoisse exprimée dans la prière de Jésus, « non pas ma volonté mais la tienne », a décrit ce processus, que le Christ porte en lui comme vrai homme, avec la nature, la volonté humaine; dans cet acte – « non pas ma volonté, mais la tienne » – Jésus a résumé tout le processus de sa vie, c'est-à-dire celui de porter la vie naturelle humaine à la vie divine et, de cette manière, celui de transformer l'homme: divinisation de l'homme et ainsi rédemption de l'homme, parce que la volonté de Dieu n'est pas une volonté tyrannique, ce n'est pas une volonté qui est hors de notre être, mais c'est précisément la volonté créatrice, c'est précisément le lieu où nous trouvons notre véritable identité.

     Dieu nous a créés et nous sommes nous-mêmes si nous sommes conformes à sa volonté; ainsi seulement nous entrons dans la vérité de notre être et nous ne sommes pas aliénés. Au contraire, l'aliénation naît, précisément, lorsque l'on sort de la volonté de Dieu, parce que ce cette manière, nous sortons du dessein de notre être, nous ne sommes plus nous-mêmes et nous tombons dans le vide. En vérité, l'obéissance à Dieu, c'est-à-dire la conformité, la vérité de notre être, est la vraie liberté, parce que c'est la divinisation. Jésus, en portant l'homme, l'être homme, en lui-même et avec lui-même, conformément à Dieu, dans la parfaite obéissance, c'est-à-dire dans la parfaite conformation entre les deux volontés, nous a rachetés et la rédemption est toujours ce processus de porter la volonté humaine dans la communion avec la volonté divine. C'est un processus sur lequel nous prions chaque jour: « Que ta volonté soit faite ». Et nous voulons prier réellement le Seigneur, pour qu'il nous aide à voir intimement que cela est la liberté, et à entrer, ainsi, avec joie dans cette obéissance et à « recueillir » l'être humain pour le porter – à travers notre exemple, notre humilité, notre prière, notre action pastorale – dans la communion avec Dieu.

     En poursuivant la lecture, suit une phrase difficile à interpréter. L'auteur de la Lettre aux Hébreux dit que Jésus a prié, avec une violente clameur et des larmes, Dieu qui pouvait le sauver de la mort et qu'en raison de sa piété, il est exaucé (cf. 5, 7). Ici, nous voudrions dire: « Non, ce n'est pas vrai, il n'a pas été exaucé, il est mort ». Jésus a prié d'être libéré de la mort, mais il n'a pas été libéré, il est mort de manière très cruelle. C'est pourquoi le grand théologien libéral Harnack a dit: « Il manque ici une négation », il faut écrire: « Il n'a pas été exaucé » et Bultmann a accepté cette interprétation. Il s'agit toutefois d'une solution qui n'est pas une exégèse, mais une violence faite au texte. Dans aucun des manuscrits n'apparaît la négation, mais bien « il a été exaucé »; nous devons donc apprendre à comprendre ce que signifie cet « être exaucé », malgré la Croix.

     Je vois trois niveaux de compréhension de cette expression. A un premier niveau, on peut traduire le texte grec ainsi: « il a été racheté de son angoisse » et en ce sens Jésus est exaucé. Ce serait donc une allusion à ce que raconte saint Luc, qu'« un ange a réconforté Jésus » (cf. Lc 22, 43), de façon qu'après le moment de l'angoisse, il puisse aller droit et sans crainte vers son heure, comme nous le décrivent les Evangiles, en particulier celui de saint Jean. Il aurait été exaucé, au sens où Dieu lui donne la force de pouvoir porter tout ce poids et il est ainsi exaucé. Mais, pour ma part, il me semble que ce n'est pas une réponse tout à fait suffisante. Exaucé de manière plus profonde – le père Vanhoye l'a souligné – cela veut dire: « il a été racheté de la mort », mais pas en ce moment, pas à ce moment-là, mais pour toujours, dans la Résurrection: la vraie réponse de Dieu à la prière d'être racheté de la mort est la Résurrection et l'humanité est rachetée de la mort précisément dans la Résurrection, qui est la vraie guérison de nos souffrances, du mystère terrible de la mort.
Ici est déjà présent un troisième niveau de compréhension: la Résurrection de Jésus n'est pas seulement un événement personnel. Il semble qu'il peut être utile d'avoir à l'esprit le bref texte dans lequel saint Jean, dans le chapitre 12 de son Evangile, présente et raconte, de manière très synthétique, l'épisode du Mont des Oliviers. Jésus dit: « Mon âme est troublée » (Jn 12, 27), et, dans toute l'angoisse du Mont des Oliviers, que puis-je dire? « Père, sauve-moi de cette heure ou glorifie ton nom » (cf. Jn 12, 27-28). C'est la même prière que celle que nous trouvons dans les Synoptiques: « Si cela est possible, sauve-moi, mais que ta volonté sois faite » (cf. Mt 26, 42; Mc 14, 36; Lc 22, 42) qui, dans le langage johannique, apparaît justement sous la forme: « Père, sauve-moi, Père, glorifie ». Et Dieu répond: « Je t'ai glorifié et de nouveau je te glorifierai » (cf. Jn 12, 28). Telle est la réponse, le vœu exaucé par Dieu: je glorifierai la Croix; c'est la présence de la gloire divine, parce que c'est l'acte suprême de l'amour. Dans la Croix, Jésus est élevé sur toute la terre et attire la terre à lui; dans la croix apparaît à présent le « Kabod », la vraie gloire divine du Dieu qui aime jusqu'à la Croix et transforme ainsi la mort et crée la Résurrection.

 

15 juin 2010 – Au Congrès du diocèse de Rome

     Dans toute sa vie publique, Jésus, à travers la prédication de l'Evangile et les signes miraculeux, a annoncé la bonté et la miséricorde du Père à l'égard de l'homme.

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1er avril 2010 – Homélie de la Messe chrismale

     Dans les divers sacrements, l’huile consacrée est toujours signe de la miséricorde de Dieu. C’est pourquoi l’onction pour le sacerdoce signifie toujours aussi la charge de porter la miséricorde de Dieu aux hommes. L’huile de la miséricorde ne devrait jamais manquer dans la lampe de notre vie. Procurons-nous en toujours à temps auprès du Seigneur – dans la rencontre avec sa Parole, dans la réception des Sacrements, dans notre présence priante auprès de Lui.

    

 

 

 

 

8 décembre 2010 – Méditation Place d’Espagne à Rome

     Ce que nous recevons de Marie est beaucoup plus important que ce que nous lui offrons. En effet, elle nous adresse un message destiné à chacun de nous… Et qu’est-ce que nous dit Marie? Elle nous parle avec la Parole de Dieu, qui s’est faite chair dans son sein. Son «message» n’est autre que Jésus, Lui qui est toute sa vie. C’est grâce à Lui et pour Lui qu’elle est l’Immaculée. Et comme le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous, ainsi elle aussi, sa Mère, a été préservée du péché pour nous, pour tous, comme anticipation du salut de Dieu pour chaque homme. Ainsi, Marie nous dit que nous sommes tous appelés à nous ouvrir à l’action de l’Esprit Saint pour pouvoir parvenir, dans notre destin final, à être immaculés, pleinement et définitivement libérés du mal. Elle nous le dit à travers sa sainteté même, avec un regard plein d’espérance et de compassion, qui évoque des paroles comme celles-ci: «Ne crains rien, mon fils, Dieu t’aime; il t’aime personnellement; il t’a pensé avant que tu ne viennes au monde et il t’a appelé à l’existence pour te combler d’amour et de vie; et c’est pour cela qu’il est venu à ta rencontre, qu’il s’est fait comme toi, qu’il est devenu Jésus, Dieu-Homme, en tout semblable à toi, mais sans le péché; il s’est donné lui-même pour toi, jusqu’à mourir sur la croix, et ainsi il t’a donné une vie nouvelle, libre, sainte et immaculée» (cf. Ep 1, 3-5).

     Marie nous fait don de ce message, et lorsque je viens ici, en cette fête, il me touche, car je sens qu’il est adressé à toute la ville, à tous les hommes et les femmes qui vivent à Rome: également à celui qui n’y pense pas, à celui qui ne se rappelle même pas que c’est la fête de l’Immaculée; à celui qui se sent seul et abandonné. Le regard de Marie est le regard de Dieu sur chacun. Elle nous regarde avec l’amour même du Père et nous bénit. Elle se comporte comme notre «avocate» — et c’est ainsi que nous l’invoquons dans le Salve, Regina: «Advocata nostra». Même si tous parlaient mal de nous, elle, la Mère, dirait du bien, car son cœur immaculé est en harmonie avec la miséricorde de Dieu.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2012

 

11 février 2012 – Message pour la Journée Mondiale du Malade

      Durant sa vie, Jésus annonce et rend présente la miséricorde du Père. Il est venu non pour condamner mais pour pardonner et sauver, pour donner de l’espérance même dans les ténèbres les plus profondes de la souffrance et du péché, pour donner la vie éternelle.

      À l’exemple du Bon Pasteur et comme guides du troupeau qui leur est confié, que les prêtres soient pleins de joie, attentifs aux plus faibles, aux simples, aux pécheurs, manifestant l’infinie miséricorde de Dieu par les paroles rassurantes de l’espérance (cf. saint Augustin, Lettre 95, 1 : PL 33, 351-352).

 

 

3 mai 2012 – A l’Université catholique du Sacré-Coeur.

     Religion du Logos, le christianisme ne relègue pas la foi au domaine de l’irrationnel, mais attribue l’origine et le sens de la réalité à la Raison créatrice, qui, dans le Dieu crucifié, s’est manifestée comme amour et qui invite à parcourir la voie du quaerere Deum : « Je suis le chemin, la vérité, la vie ». Saint Thomas d’Aquin commente : « Le terme de ce chemin est la fin du désir humain. Or, l’homme désire avant tout deux choses: premièrement, la connaissance de la vérité, ce qui lui est propre ; en second lieu, la conservation de son être, ce qui est commun à toutes les réalités. Le Christ se trouve dans l’une et dans l’autre... Si donc tu cherches par où passer, accueille le Christ, parce qu’il est lui-même le Chemin » (Commentaire sur saint Jean, chap. 14, lectio 2). L’Évangile de la vie illumine alors le chemin difficile de l’homme, et devant la tentation de l’autonomie absolue, il rappelle que « la vie de l’homme vient de Dieu, c’est son don, son image et son empreinte, la participation à son souffle vital » (Jean-Paul II, Evangelium vitae, n. 39). Et c’est précisément en parcourant le sentier de la foi que l’homme peut entrevoir dans les réalités mêmes de la souffrance et de la mort qui traversent son existence, une possibilité authentique de bien et de vie. Dans la croix du Christ, il reconnaît l’Arbre de la vie, révélation de l’amour passionné de Dieu pour l’homme. Le soin des personnes qui souffrent est alors une rencontre quotidienne avec le visage du Christ, et le dévouement de l’intelligence et du cœur devient un signe de miséricorde de Dieu et de sa victoire sur la mort.

    

13 mai 2012 – Visite au sanctuaire de La Verna, en Italie

     «Simon, fils de Jonas, m’aimes-tu plus que ne m’aiment ceux-ci?... Pais mes brebis» (Jn 21, 15). C’est l’amour pour le Christ qui est à la base de la vie du pasteur, ainsi que de celle du consacré; un amour qui n’a pas peur de s’engager, ni des difficultés. Apportez cet amour à l’homme de notre temps, souvent enfermé dans son individualisme; soyez des signes de l’immense Miséricorde de Dieu.

 

 

 

26 mai 2012 – Audience au Renouveau charismatique

      Il faut renouveler l’âme des institutions et féconder l’histoire par des semences de vie nouvelle. Aujourd’hui, les croyants sont appelés à un témoignage de foi convaincu, sincère et crédible, étroitement uni à l’engagement de la charité. En effet, grâce à la charité, même des personnes qui sont éloignées du message de l’Evangile, ou indifférentes, réussissent à s’approcher de la vérité et à se convertir à l’amour miséricordieux du Père céleste.

 

 

 

 

 

31 mai 2012 – Au terme de la Veillée mariale à la Grotte de Lourdes, dans les Jardins du Vatican.

     Le Magnificat est le chant de louange qui s’élève de l’humanité rachetée par la divine miséricorde, qui s’élève de tout le peuple de Dieu; dans le même temps, c’est l’hymne qui dénonce l’illusion de ceux qui se croient être les seigneurs de l’histoire et les arbitres de leur propre destin.

 

 

 

 

 

 

29 juin 2012 – Homélie de la Messe

     Jésus par sa mort a vaincu les puissances de l’enfer, par son Sang il a reversé sur le monde un immense fleuve de Miséricorde, qui irrigue de ses eaux assainissantes l’humanité tout entière.

 

 

 

 

1er juillet 2012 – Aux pélerins francophones, au terme d el’Angelus

     Pendant cette période estivale, je vous invite à savoir prendre du temps pour Dieu. Sachez témoigner de sa présence au milieu de nous. Soyez des porteurs de sa miséricorde et de sa tendresse à chacun de ceux qu’il vous est donné de rencontrer, plus particulièrement à ceux qui souffrent.

 

 

22 juillet 2012 - Angelus

     La Parole de Dieu de ce dimanche nous repropose un thème fondamental et toujours fascinant de la Bible: elle nous rappelle que Dieu est le pasteur de l’humanité. Cela signifie que Dieu veut pour nous la vie, il veut nous guider vers de bons pâturages où nous pouvons nous nourrir et nous reposer. Il ne veut pas que nous nous perdions et que nous mourrions, mais que nous parvenions au but de notre chemin, qui est justement la plénitude de la vie. C’est ce que tout père et toute mère désire pour ses enfants: le bien, le bonheur, la réalisation. Dans l’Evangile d’aujourd’hui, Jésus se présente comme un Pasteur des brebis égarées de la maison d’Israël. Son regard sur les gens est un regard pour ainsi dire «pastoral». Par exemple, dans l’Evangile de ce dimanche, il est dit qu’«en débarquant, il vit une foule nombreuse et il en eut pitié, parce qu’ils étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger, et il se mit à les enseigner longuement» (Mc 6, 34). Jésus incarne le Dieu Pasteur avec sa façon de prêcher et avec ses œuvres, en prenant soin des malades et des pécheurs, de ceux qui sont «égarés» (cf. Lc 19, 10), pour les ramener en sécurité, dans la miséricorde du Père.

     Parmi les «brebis égarées» que Jésus a conduites en sécurité, il y a aussi une femme nommée Marie, originaire du village de Magdala, sur le Lac de Galilée, et appelée pour cela Madeleine. C’est aujourd’hui sa mémoire liturgique dans le calendrier de l’Eglise. L’évangéliste Luc dit que Jésus fit sortir d’elle sept démons (cf. Lc 8, 2), c’est-à-dire qu’il l’a sauvée d’un asservissement total au malin. En quoi consiste cette guérison profonde que Dieu opère au moyen de Jésus? Elle consiste en une paix vraie, complète, fruit de la réconciliation de la personne en elle-même et dans toutes ses relations: avec Dieu, avec les autres, avec le monde. En effet, le malin cherche toujours à gâcher l’œuvre de Dieu, en semant la division dans le cœur de l’homme, entre corps et âme, entre l’homme et Dieu, dans les rapports interpersonnels, sociaux, internationaux, et aussi entre l’homme et la création. Le malin sème la guerre; Dieu crée la paix. Plus encore, comme saint Paul l’affirme, le Christ «est notre paix, lui qui des deux peuples n’en a fait qu'un, détruisant la barrière qui les séparait, supprimant en sa chair la haine» (Ep 2, 14). Pour accomplir cette œuvre de réconciliation radicale, Jésus, le Bon Pasteur, a dû devenir l’Agneau, «l’Agneau de Dieu… qui enlève le péché du monde» (Jn 1, 29). Ce n’est qu’ainsi qu’il a pu réaliser l’étonnante promesse du psaume: «Oui, grâce et bonheur me pressent tous les jours de ma vie; ma demeure est la maison du Seigneur en la longueur des jours» (Ps 22/23, 6).

     Chers amis, ces paroles font vibrer notre cœur, parce qu’elles expriment notre désir le plus profond, elles disent ce pour quoi nous sommes faits: la vie, la vie éternelle! Ce sont les paroles de qui, comme Marie Madeleine, a fait l’expérience de Dieu dans sa vie, et connaît sa paix. Des paroles plus vraies que jamais sur les lèvres de la Vierge Marie, qui vit déjà pour toujours dans les pâturages du Ciel, où l’a conduite l’Agneau Pasteur. Marie, Mère du Christ notre paix, prie pour nous!

 

 

 

publié le : 20 décembre 2015

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