Benoît XVI de A à Z

Grec - Grecs - Hellénistes

2005



18 décembre 2005 - Homélie Messe dans la paroisse romaine de Casalbertone
Le premier mot sur lequel que je voudrais méditer avec vous est le salut de l'Ange à Marie. Dans la traduction italienne, l'Ange dit: "Je te salue Marie". Mais la parole grecque qui est traduite, "Kaire", signifie en soi "réjouis-toi", "sois contente". Et il y a là un premier élément qui surprend: le salut entre les juifs était "Shalom", "paix", alors que le salut dans le monde grec était "Kaire", "réjouis-toi". Il est surprenant que l'Ange, en entrant dans la maison de Marie, salue avec le salut des grecs: "Kaire", "réjouis-toi, sois contente". Et les Grecs, lorsqu'ils lurent cet Evangile quarante ans plus tard, ont pu voir ici un message important: ils ont pu comprendre qu'avec le début du Nouveau Testament, auquel cette page de Luc faisait référence, avait également eu lieu l'ouverture au monde des peuples, à l'universalité du Peuple de Dieu, qui désormais n'embrassait plus seulement le peuple juif, mais également le monde dans sa totalité, tous les peuples. La nouvelle universalité du Royaume du vrai Fils de David apparaît dans ce salut grec de l'Ange….

"Réjouis-toi, sois contente". C'est la première parole qui retentit dans le Nouveau Testament comme tel, car l'annonce faite par l'ange à Zacharie à propos de la naissance de Jean Baptiste est une parole qui retentit encore sur le seuil entre les deux Testaments. Ce n'est qu'avec ce dialogue de l'Ange Gabriel avec Marie, que commence réellement le nouveau Testament. Nous pouvons donc dire que la première parole du Nouveau Testament est une invitation à la joie: "réjouis-toi, sois contente". Le Nouveau Testament est véritablement "Evangile", la "Bonne Nouvelle" qui nous apporte la joie. Dieu n'est pas loin de nous, inconnu, énigmatique, voire dangereux; Dieu est proche de nous, si proche qu'il se fait enfant, et que nous pouvons "tutoyer" ce Dieu.

C'est dans le monde grec qu'a été ressentie cette nouveauté, qu'a profondément été ressentie cette joie, car pour eux il n'apparaissait pas clairement s'il existait un Dieu bon ou un Dieu méchant, ou tout simplement aucun Dieu. La religion de l'époque leur parlait de nombreuses divinités: ils se sentaient donc entourés par des divinités très différentes, en opposition l'une avec l'autre, au point de devoir craindre que si l'on faisait quelque chose en faveur d'une divinité, l'autre pouvait s'offenser ou se venger. Ils vivaient ainsi dans un monde de peur, entourés par des démons dangereux, sans jamais savoir comment se sauver de ces forces en opposition entre elles. C'était un monde de peur, un monde obscur. Et à présent, ils entendaient dire: "Réjouis-toi, ces démons ne sont rien, il y a le Dieu véritable et ce vrai Dieu est bon, il nous aime, il nous connaît, il est avec nous, avec nous au point de s'être fait chair!". C'est la grande joie que le christianisme annonce. Connaître ce Dieu est vraiment la "bonne nouvelle", une parole de rédemption.



2007



10 janvier 2007 - Audience Générale
Le récit de Luc part de la constatation d'une sous-division établie au sein de l'Eglise primitive de Jérusalem : celle-ci était certes entièrement composée de chrétiens d'origine juive, mais certains d'entre eux étaient originaires de la terre d'Israël et était appelés « Hébreux », tandis que d'autres de foi juive vétérotestamentaire provenaient de la diaspora de langue grecque et était appelés « Hellénistes ». Voici le problème qui se présentait : les plus nécessiteux parmi les hellénistes, en particulier les veuves dépourvues de tout soutien social, couraient le risque d'être négligés dans l'assistance au service quotidien. Pour remédier à cette difficulté, les Apôtres, se réservant la prière et le ministère de la Parole comme devoir central propre, décidèrent de charger « sept hommes de bonne réputation, remplis de l'Esprit et de sagesse » afin d'accomplir le devoir de l'assistance (Ac 6, 2-4), c'est-à-dire du service social caritatif. Dans ce but, comme l'écrit Luc, sur l'invitation des Apôtres, les disciples élirent sept hommes. Nous connaissons également leurs noms. Il s'agit de : « Etienne, homme rempli de foi et de l'Esprit Saint, Philippe, Prochore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas prosélyte d'Antioche. On les présenta aux Apôtres et, après avoir prié, ils leur imposèrent les mains » (Ac 6, 5-6).

Le geste de l'imposition des mains peut avoir diverses significations. Dans l'Ancien Testament, ce geste a surtout la signification de transmettre une charge importante, comme le fit Moïse avec Josué (cf. Mb 27, 18-23), désignant ainsi son successeur. Dans ce sillage, l'Eglise d'Antioche utilisera également ce geste pour envoyer Paul et Barnabé en mission aux peuples du monde (cf. Ac 13, 3). C'est à une imposition analogue des mains sur Timothée, pour lui transmettre une fonction officielle, que font référence les deux Epîtres de Paul qui lui sont adressées (cf. 1 Tm 4, 14; 2 Tm 1, 6). Le fait qu'il s'agisse d'une action importante, devant être accomplie avec discernement, se déduit de ce que l'on lit dans la Première Epître à Timothée : « Ne te hâte pas d'imposer les mains à qui que ce soit. Ne te fais pas complice des péchés d'autrui » (5, 22). Nous voyons donc que le geste d'imposition des mains se développe dans la lignée d'un signe sacramentel. Dans le cas d'Etienne et de ses compagnons, il s'agit certainement de la transmission officielle, de la part des Apôtres, d'une charge et, dans le même temps, de l'imploration d'une grâce pour l'exercer.

La chose la plus importante à remarquer est que, outre les services caritatifs, Etienne accomplit également une tâche d'évangélisation à l'égard de ses compatriotes, de ceux qu'on appelle « hellénistes ». Luc insiste en effet sur le fait que lui, « plein de grâce et de puissance » (Ac 6, 8), présente au nom de Jésus une nouvelle interprétation de Moïse et de la Loi même de Dieu, il relit l'Ancien Testament à la lumière de l'annonce de la mort et de la résurrection de Jésus. Cette relecture de l'Ancien Testament, une relecture christologique, provoque les réactions des Juifs qui perçoivent ses paroles comme un blasphème (cf. Ac 6, 11-14). C'est pour cette raison qu'il est condamné à la lapidation. Et saint Luc nous transmet le dernier discours du saint, une synthèse de sa prédication. Comme Jésus avait montré aux disciples d'Emmaüs que tout l'Ancien Testament parle de lui, de sa croix et de sa résurrection, de même saint Etienne, suivant l'enseignement de Jésus, lit tout l'Ancien Testament d'un point de vue christologique. Il démontre que le mystère de la Croix se trouve au centre de l'histoire du salut raconté dans l'Ancien Testament, il montre que réellement Jésus, le crucifié et le ressuscité, est le point d'arrivée de toute cette histoire. Et il démontre donc également que le culte du temple est fini et que Jésus, le ressuscité, est le nouveau et véritable « temple ». C'est précisément ce « non » au temple et à son culte qui provoque la condamnation de saint Etienne, qui, à ce moment - nous dit saint Luc -, fixant les yeux vers le ciel vit la gloire de Dieu et Jésus qui se trouvait à sa droite. Et voyant le ciel, Dieu et Jésus, saint Etienne dit : « Voici que je contemple les cieux ouverts : le Fils de l'homme est debout à la droite de Dieu » (Ac 7, 56). Suit alors son martyre, qui, de fait, est modelé sur la passion de Jésus lui-même, dans la mesure où il remet au « Seigneur Jésus » son esprit et qu'il prie pour que les péchés de ses meurtriers ne leur soient pas imputés (cf. Ac 7, 59-60).



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