Benoît XVI de A à Z

Ascèse

2005



13 mai 2005 - Aux prêtres romains à Saint Jean de Latran
Du Seigneur Jésus Christ, qui s'est sacrifié lui-même pour faire la volonté du Père, nous apprenons en outre l'art de l'ascèse sacerdotale, qui aujourd'hui aussi est nécessaire: celle-ci ne doit pas être placée à côté de l'action pastorale, comme un poids supplémentaire qui rend notre journée encore plus difficile. Au contraire, dans l'action même nous devons apprendre à nous dépasser, à quitter et à donner notre vie. Mais pour que tout cela se produise réellement en nous, pour que notre action soit réellement dans le même temps notre ascèse et notre manière de nous donner, pour que tout cela ne demeure pas seulement un désir, nous avons sans aucun doute besoin de moments pour retremper nos énergies, même physiques, et surtout pour prier et méditer, en retournant dans notre intériorité et en trouvant le Seigneur en nous. C'est pourquoi le temps pour demeurer en la présence de Dieu dans la prière est une véritable priorité pastorale, ce n'est pas un à-côté du travail pastoral, demeurer face au Seigneur est une priorité pastorale, en dernière analyse la plus importante. Jean-Paul II nous l'a montré de la manière la plus concrète et la plus lumineuse en chaque circonstance de sa vie et de son ministère.



2007



21 février 2007 - Homélie Messe Mercredi des Cendres
Dans sa tradition, l'Eglise ne se limite pas à nous offrir la thématique liturgique et spirituelle de l'itinéraire quadragésimal, mais elle nous indique également les instruments ascétiques et pratiques pour le parcourir de façon fructueuse.

"Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les pleurs et les cris de deuil". C'est par ces paroles que débute la Première Lecture, tirée du livre du prophète Joël (2, 12). Les souffrances, les catastrophes qui affligeaient à cette époque la terre de Judée poussent l'auteur saint à encourager le peuple élu à la conversion, c'est-à-dire à retourner avec une confiance filiale au Seigneur en se lacérant le cœur et non les vêtements. En effet, Celui-ci, rappelle le prophète, "est tendresse et pitié, lent à la colère, riche en grâce, et il a regret du mal" (2, 13). L'invitation que Joël adresse à ceux qui l'écoutent vaut également pour nous, chers frères et sœurs. N'hésitons pas à retrouver l'amitié de Dieu perdue avec le péché; en rencontrant le Seigneur, faisons l'expérience de la joie de son pardon. Et ainsi, en répondant presque aux paroles du prophète, nous avons fait nôtre l'invocation du refrain du Psaume responsorial: "Pardonne-nous, Seigneur, nous avons péché". En proclamant le Psaume 50, le grand Psaume pénitentiel, nous en avons appelé à la miséricorde divine; nous avons demandé au Seigneur que la puissance de son amour nous redonne la joie d'être sauvés.

L'appel à la conversion, à la pénitence résonne aujourd'hui de toute sa force, pour que son écho nous accompagne à tous les moments de notre vie.

Chers frères et sœurs, nous avons quarante jours pour approfondir cette extraordinaire expérience ascétique et spirituelle. Dans l'Evangile qui a été proclamé, Jésus indique quels sont les instruments utiles pour accomplir l'authentique renouvellement intérieur et communautaire: les œuvres de charité (l'aumône), la prière et la pénitence (le jeûne). Ce sont trois pratiques fondamentales chères également à la tradition juive, parce qu'elles contribuent à purifier l'homme devant Dieu (cf. Mt 6, 1-6.16-18). Ces gestes extérieurs, qui sont accomplis pour plaire à Dieu et non pour obtenir l'approbation ou l'assentiment des hommes, sont acceptés par Lui s'ils expriment la détermination du cœur à le servir, avec simplicité et générosité. Cela nous est rappelé également par une des Préfaces quadragésimales où, à propos du jeûne, nous lisons cette expression singulière: "ieiunio... mentem elevas: par le jeûne, tu élèves ton esprit" (Préface IV).

Le jeûne, auquel l'Eglise nous invite en ce temps fort, ne naît certes pas de motivations d'ordre physique ou esthétique, mais provient de l'exigence que l'homme a d'une purification intérieure qui le désintoxique de la pollution du péché et du mal; qui l'éduque à ces renonciations salutaires qui affranchissent le croyant de l'esclavage de son moi; qui le rende plus attentif et disponible à l'écoute de Dieu et aux services de ses frères. C'est pour cette raison que le jeûne et les autres pratiques quadragésimales sont considérées par la tradition chrétienne comme des "armes" spirituelles pour combattre le mal, les mauvaises passions et les vices. A ce sujet, je suis heureux d'écouter à nouveau avec vous un bref commentaire de saint Jean Chrysostome. "De même qu'à la fin de l'hiver - écrit-il - revient la saison estivale et le marin tire le bateau à la mer, le soldat nettoie ses armes et entraîne son cheval pour la lutte, l'agriculteur affile sa faux, le pèlerin revigoré se prépare à son long voyage et l'athlète dépose ses vêtements et se prépare à la compétition; ainsi, nous aussi, au début de ce jeûne, comme une sorte de retour à un printemps spirituel, nous fourbissons les armes comme les soldats, nous affilons la faux comme les agriculteurs, et comme les maîtres d'équipage, nous remettons en ordre le navire de notre esprit pour affronter les flots des passions absurdes, comme des pèlerins, nous reprenons le voyage vers le ciel et comme des athlètes, nous nous préparons à la lutte en nous dépouillant de tout" (Homélies au peuple d'Antioche, n. 3).

Dans le message pour le Carême, j'ai invité à vivre ces quarante jours de grâce particulière comme un temps "eucharistique". En puisant à la source intarissable de l'amour qu'est l'Eucharistie, dans laquelle le Christ renouvelle le sacrifice rédempteur de la Croix, chaque chrétien peut persévérer sur l'itinéraire que nous entreprenons aujourd'hui solennellement. Les œuvres de charité (l'aumône), la prière et le jeûne en même temps que tout autre effort sincère de conversion trouvent leur plus haute signification et valeur dans l'Eucharistie, centre et sommet de la vie de l'Eglise et de l'histoire du salut. "Que ce sacrement que nous avons reçu, ô Père - ainsi prierons-nous à la fin de la messe -, nous soutienne sur le chemin quadragésimal, qu'il sanctifie notre jeûne et le rende efficace pour la guérison de notre esprit".

Message pour le Carême 2007
« Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé. » (Jn 19, 37). Le Carême est une période propice pour apprendre à faire halte avec Marie et Jean, le disciple préféré, auprès de Celui qui, sur la Croix, offre pour l'Humanité entière le sacrifice de sa vie (cf. Jn 19, 25). Aussi, avec une participation plus fervente, nous tournons notre regard, en ce temps de pénitence et de prière, vers le Christ crucifié qui, en mourant sur le Calvaire, nous a révélé pleinement l'amour de Dieu.



12 mai 2007 - Visite à la Ferme de l'Espérance, à Guaratinguetá, au Brésil
Ma pensée se tourne à présent vers les nombreuses institutions du monde entier qui travaillent pour rendre la vie, et une vie nouvelle, à nos frères présents dans notre société, et que Dieu aime avec un amour préférentiel. Je pense également aux nombreux groupes des alcooliques anonymes et des toxicomanes anonymes, et à la pastorale de l'"abstinence" qui œuvre déjà au sein de nombreuses communautés, en apportant son aide généreuse en faveur de la vie.



14 novembre 2007 - Audience Générale
Jérôme, défini par Prospère d'Aquitaine « modèle de conduite et maître du genre humain » (Carmen de ingratis, 57), nous a également laissé un enseignement riche et varié sur l'ascétisme chrétien. Il rappelle qu'un courageux engagement vers la perfection demande une vigilance constante, de fréquentes mortifications toutefois, avec modération et prudence, un travail intellectuel ou manuel assidu pour éviter l'oisiveté (cf. Epp 125, 11 et 130, 15), et surtout l'obéissance à Dieu : « Rien... ne plaît autant à Dieu que l'obéissance..., qui est la plus excellente et l'unique vertu» (Hom. de oboedientia : CCL 78,552). La pratique des pèlerinages peut également appartenir au chemin ascétique. Jérôme donna en particulier une impulsion à ceux en Terre Sainte, où les pèlerins étaient accueillis et logés dans des édifices élevés à côté du monastère de Bethléem, grâce à la générosité de la noble dame Paola, fille spirituelle de Jérôme (cf. Ep 108, 14).



2008



18 juillet 2008 - Rencontre Interreligieuse à Sydney
Le sens religieux, enraciné dans le cœur de l'homme, ouvre les hommes et les femmes à Dieu et les porte à découvrir que la réalisation personnelle ne consiste pas dans la satisfaction égoïste de désirs éphémères. Il nous amène plutôt à aller au-devant des nécessités des autres et à chercher des voies concrètes pour contribuer au bien commun. Les religions ont un rôle particulier en ce sens, car elles enseignent aux personnes qu'un service authentique demande sacrifice et autodiscipline, qui, eux-mêmes, doivent être cultivés à travers l'abnégation, la tempérance et l'usage modéré des biens de ce monde. De cette manière, les hommes et les femmes sont amenés à considérer l'environnement comme une merveille à contempler et à respecter plutôt que comme un produit simplement à consommer. Il incombe aux personnes qui ont une croyance religieuse de démontrer qu'il est possible de trouver le bonheur en vivant simplement et modestement, en partageant avec générosité son propre superflu avec ceux qui sont dans le besoin.

Chers amis, ces valeurs - je suis certain que vous êtes de mon avis - sont particulièrement importantes pour une formation adéquate des jeunes, qui sont très souvent tentés de considérer la vie elle-même comme un produit de consommation. Ils sont aussi capables d'autocontrôle : comme par exemple dans le sport, dans les arts créatifs et dans les études universitaires qu'ils sont facilement prêts à accueillir comme un défi. N'est-il pas vrai que lorsque leur sont offerts des idéaux élevés, de nombreux jeunes sont attirés par l'ascétisme et par la pratique de la vertu morale à travers le respect de soi et l'attention envers les autres ?



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