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Homélie de Mgr Nicolas Brouwet au pélerinage de Chartres - 13 juin 2011

Publiée le 21-07-2011

     Je voudrais tout d'abord saluer Mgr Michel Pansard, évêque de Chartres, qui nous accueille paternellement dans sa cathédrale. Il est le signe, au milieu de nous, du Bon Pasteur qui accueille ses brebis, les encourage et les bénit au terme de ce pèlerinage.

     Vous avez remarqué que Mgr Pansard, figure du Christ Pasteur présent au milieu de son peuple, nous a précisément accueilli au portail principal, le portail ouest de la cathédrale, appelé aussi le portail royal. Au-dessus de ce portail se dressent trois grandes verrières actuellement cachées par des échafaudages. Ces verrières du treizième siècle représentent les mystères de la vie du Christ. Il n'est pas étonnant que ces verrières soient à l'entrée : c'est le Christ qui nous fait entrer dans l'Eglise, il est lui-même la porte et nous baigne dans la lumière de son Evangile ; et c'est lui qui nous fera entrer dans sa demeure de gloire au terme de notre pèlerinage sur la terre.
 

Les verrières du centre et du sud représentent des scènes de la vie de Jésus de sa naissance à sa Résurrection. La verrière nord raconte la généalogie du Christ : c'est l'arbre de Jessé. Tout en haut, apparaît le Messie annoncé par les prophètes. Le Christ est représenté assis, entouré de sept colombes, les sept dons de l'Esprit Saint annoncés par le prophète Isaïe :

« Un rameau sortira de l'arbre de Jessé…Sur lui reposera l'Esprit du Seigneur, Esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur…Il ne jugera pas d'après ce que voient ses yeux, il ne se prononcera pas d'après ce qu'entendent ses oreilles ; il jugera les petits avec équité, il jugera les pauvres de la terre en toute justice ». Isaïe, 11, 1- ….

En ce lundi de Pentecôte, nous implorons le Saint Esprit de renouveler en nous ses dons reçus dans le sacrement de la confirmation. Et nous l'invoquons de manière toute particulière, cette année, comme celui « qui est Seigneur et qui donne la vie », ainsi que nous le confessons dans le Credo.

« Tu envoies ton souffle, ils sont créés, tu renouvelles la face de la terre » (Ps103, 30). L'Esprit Saint donne la vie parce qu'il est le don du Dieu très-haut, sa générosité, sa fécondité. Et nous l'invoquons pour qu'il nous donne la grâce d'aimer la vie, de la respecter, de comprendre à quel point elle est un don précieux du Seigneur, un don remis entre nos mains non pour nous en emparer ou pour la détruire mais pour l'accueillir et la porter à son accomplissement dans la grâce de l'Esprit.

« Il ne jugera pas d'après ce que voient ses yeux, dit le Prophète Isaïe, il ne se prononcera pas d'après ce qu'entendent ses oreilles ; il jugera les petits avec équité, il jugera les pauvres de la terre en toute justice. » L'Esprit aux sept dons, rectifie notre jugement et éduque ainsi notre conscience pour qu'elle ne se réfère pas seulement à ce que les yeux voient, c'est-à-dire à l'apparence, ou à ce que les oreilles entendent, c'est-à-dire à ce que tout le monde dit et répète.

L'Esprit aux sept dons illumine notre esprit de la lumière d'en haut pour que nous puissions poser sur chaque être humain le regard de Dieu ; même sur celui qui est malade, même sur celui qui a un handicap, ou sur celui dont la venue est imprévue. L'Esprit Saint purifie notre regard de la tentation d'adopter seulement des critères d'efficacité, de rentabilité, de performance, des critères de conformité aux canons de la beauté, de la santé, de l'intelligence. Il nous sauve également de la tentation de nous protéger pour ne pas être dérangé : dérangé par celui que l'on n'attendait pas, ou que l'on attendait différent, ou que l'on souhaitait conforme à nos attentes, à nos besoins, à nos projets, à nos désirs. L'Esprit Saint nous purifie de la tentation de chercher d'abord notre bien-être, notre confort dans notre relation aux autres.

Celui sur lequel reposera l'Esprit, dit Isaïe, jugera les petits avec équité et les pauvres de la terre avec justice. Oui, l'Esprit Saint nous réapprend la simple justice qui consiste à rendre à chacun la dignité qui lui est due, parce qu'il est fait à l'image et à la ressemblance du Dieu vivant.

Et c'est pourquoi il est urgent de demander au Seigneur de renouveler en nous les dons reçus pour être, au milieu du monde, des apôtres de l'Evangile de la vie.

L'Esprit de crainte ne provoque pas une peur de Dieu, une angoisse de Dieu. Il nous fait saisir la grandeur de Dieu ; il nous fait comprendre que Dieu est Dieu. Et nous l'adorons parce que nous comprenons qu'il est le Créateur et que nous sommes les créatures ; qu'il est la source, l'origine de toute vie et que nous sommes ceux qui reçoivent de lui la vie. Le don de crainte nous fait réaliser que nous ne sommes pas la source, l'origine, le principe. Nous serons les acteurs d'une véritable culture de la vie si nous reconnaissons, habités par la crainte de Dieu, que la vie nous est donnée, offerte et que nous n'en sommes pas les maîtres ; si nous acceptons de recevoir la vie d'en-haut et que nous savons rendre grâce pour cette vie reçue : notre propre vie et la vie de ceux qui nous entourent.

Le don de piété nous parle de la tendresse paternelle de Dieu qui n'est pas seulement le Créateur mais un Père qui prend soin de nous. Et la piété est notre réponse filiale à cet amour du Père. Réponse donnée d'abord par la prière, par la fidélité aux sacrements, la confiance dans la Providence et la miséricorde de Dieu. Mais la piété n'est pas seulement une attitude juste envers Dieu. Elle est aussi une attitude juste envers l'homme. Et elle n'est réelle que si elle s'accompagne d'un amour généreux envers tous ceux que le Seigneur met sur notre route. C'est pourquoi l'accueil d'un enfant, même s'il est inattendu, même s'il est porteur d'un handicap, c'est pourquoi le soin des personnes malades et âgées jusqu'à leur mort naturelle, sont le témoignage d'une piété véritable, d'un amour de Dieu qui s'étend à tout homme, et en particulier à ceux qui sont vulnérables.

Et cela est possible parce que le don de piété, en nous mettant dans un rapport juste avec Dieu, nous détourne de l'idolâtrie du moi, de l'ego qui veut d'abord prendre pour soi et organiser son confort matériel, psychologique et même spirituel.

Le don de conseil nous aide à comprendre, de manière concrète, la volonté de Dieu dans la lumière du Saint Esprit. Il évangélise nos choix et nous fait saisir par où le Seigneur veut nous conduire à travers les décisions les plus quotidiennes. Il écarte de nous le manque d'objectivité dans nos jugements ; il nous assiste dans notre travail de discernement et purifie l'intelligence de la recherche de soi.

C'est le don de conseil qu'il faut demander au moment de prendre des initiatives, de bâtir des projets, de s'engager dans des actions en faveur de la vie humaine. Il fortifie la vertu de prudence quand il s'agit de prendre la parole ou de ne pas la prendre, d'écrire aux autorités ou de ne pas écrire, de réagir vigoureusement à des atteintes à la vie ou de garder le silence. Nous avons besoin de ce don pour y voir clair là où règnent le désordre, la confusion et les ténèbres.

Et nous en avons besoin ensemble pour que le tentateur, le Diviseur ne s'empare pas des œuvres bonnes pour y semer le désordre.

Le don de force nous aide à mettre en œuvre les décisions que nous avons prises. Mais cette force n'est pas une force à la manière des hommes. Elle n'est pas une forme de toute-puissance ou de pouvoir à conquérir. Elle est d'abord un dynamisme intérieur qui nous permet de réaliser ce qui nous semble correspondre à la volonté de Dieu. Mais elle doit porter, en toute logique, les fruits de l'Esprit que sont la bonté, l'humilité et la maîtrise de soi (Ga 5, 23).

 


Cette force surnaturelle nous permet de franchir les obstacles, en particulier la peur d'être minoritaire, la peur d'être contredit ou d'être mis à l'écart. La peur aussi de prendre la parole, de dire nos convictions. Cette force peut nous permettre de dépasser la tentation de taire le drame objectif de l'avortement et de s'enfermer dans le silence imposé par les institutions et les media, silence qui tente de faire croire que l'avortement est sans effet sur les consciences des hommes et des femmes qui y ont recours.

La force de l'Esprit Saint, si elle est demandée avec foi, nous donne du courage au milieu du procès que le monde nous intente à propos du respect absolu de la vie humaine.

Mais le don de force est aussi la capacité de dire non aux tentations de baisser les bras, aux tentations de porter atteinte, nous aussi, à la vie humaine et de nous en prendre, par démission, par facilité, aux plus vulnérables et aux sans-voix de notre société.

Le don d'intelligence nous permet de regarder le monde qui nous entoure avec le regard de Dieu et de lire l'actualité dans un regard de foi, d'espérance et de charité. Il nous aide donc à comprendre les enjeux véritables des évènements du monde et, en particulier, de ce qui relève de la culture de mort. Il nous fait saisir les courants profonds qui traversent notre vie sociale pour les analyser dans la lumière de l'Evangile. Le don d'intelligence nous aide à faire la vérité, à lui appartenir. Il nous protège ainsi des idées toutes faites, des regards de surface, des opinions trop rapides sur des situations concrètes.

Le don de sagesse, enfin, est un don qui unifie notre savoir, nos décisions, nos mouvements intérieurs, nos désirs, toute notre personne, pour nous mettre résolument à la suite du Christ, le Verbe de Vie. Dans l'encyclique Evangelium Vitae, Le bienheureux Jean-Paul II écrit : « On doit commencer par renouveler la culture de la vie à l'intérieur des communautés chrétiennes elles-mêmes. Les croyants, même ceux qui participent activement à la vie ecclésiale, tombent trop souvent dans une sorte de dissociation entre la foi chrétienne et ses exigences éthiques à l'égard de la vie, en arrivant ainsi au subjectivisme moral et à certains comportements inacceptables. » (EV, 95).

Le don de sagesse fait grandir l'homme intérieur en l'unifiant, en le sauvant de l'incohérence, de l'éparpillement ; en le préservant de la tentation de distinguer une vie privée conforme à l'Evangile et une vie publique ou professionnelle soumise uniquement aux lois de la république ou aux lois du marché. Le don de sagesse nous procure une vigueur spirituelle pour être, dans toutes les circonstances de notre existence, un témoin de l'Evangile de la vie.

Que l'Esprit Saint nous guide, jour après jour, pour étendre dans nos familles, dans nos entreprises, dans nos institutions, dans nos écoles, dans nos groupes d'amis, dans nos paroisses et nos diocèses une authentique culture de la vie humaine !

 

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